Deux décennies après l'effondrement de l'URSS, l'économie libérale est encore toute jeune. La Presse Affaires a discuté avec trois spécialistes pour faire le point: Paul Robinson, professeur à l'École supérieure d'affaires publiques et internationales de l'Université d'Ottawa; Jacques Lévesque, professeur de science politique de l'UQAM; Aurel Braun, professeur de relations internationales et de science politique à l'Université de Toronto.

Quel est l'état de l'économie russe?

R: Le PIB s'est effondré dans les années 90, mais s'est redressé par la suite, propulsé par les prix du gaz et du pétrole. La Russie s'est même taillé une place dans le BRIC, acronyme utilisé pour désigner les grandes économies émergentes, où la Russie accompagne la Chine, l'Inde et le Brésil.

Le PIB russe a crû d'environ 7% par années dans les années 2000, pour atteindre 1780 milliards de dollars en 2008. C'est à peine plus élevé que le Canada, pour une population pourtant quatre fois plus grande. Il faudra voir le portrait en 2009, car la récession a durement atteint l'économie de l'ancienne superpuissance, largement dépendante de l'énergie. La diversification est moindre que dans plusieurs autres pays de l'ancien bloc de l'Est.

L'argent est aussi mal distribué. Les régions de Moscou, Saint-Pétersbourg et leurs banlieues accaparent beaucoup de richesses. Et globalement, le fossé entre riches et pauvres est profond. Et si la Russie a adopté l'économie libérale, l'ingérence de l'État ou des autorités locales dans certaines entreprises cause encore des problèmes. La corruption est encore beaucoup présente.

Est-il facile pour des entreprises ou des investisseurs étrangers de faire des affaires en Russie?

R: Le marché russe est attrayant, et la forte croissance des années 2000 a attiré l'attention des investisseurs. Mais les règles du jeu ne sont pas toujours claires et le droit des affaires n'y est pas toujours respecté, selon les spécialistes joints par La Presse Affaires. Le jeu est risqué.

Les Russes veulent attirer des investissements étrangers, mais veulent en même temps éviter les prises de contrôle. Ils ont été capables de forcer des géants pétroliers comme Shell ou BP à renoncer à des parts importantes dans des projets énergétiques. Ils sont très protecteurs de leurs marchés et il peut être difficile d'y percer. L'imposante présence de l'État rend peut-être les choses plus faciles aux plus petites entreprises, qui passent sous le radar.

Par ailleurs, la crise a malmené les banques russes, ce qui cause un manque de liquidités qui pourrait favoriser les investissements étrangers.

Quel est le portrait des relations commerciales entre le Canada et la Russie?

R: La Russie est un partenaire commercial marginal du Canada. Les exportations canadiennes vers la Russie s'élevaient en 2008 à 1,5 milliard, soit à peine 0,3% des exportations du pays. Les importations de Russie représentent 2,1 milliards, soit 0,5% du total canadien. Environ 75% de ces importations sont composées d'hydrocarbures, surtout du pétrole.