L'assureur américain AIG, sauvé de la faillite à coups de milliards par le gouvernement, va verser cette année 450 millions de dollars de primes, une nouvelle qui suscitait dimanche la fureur des responsables économiques de l'équipe Obama, mais aussi de l'opposition.

Selon le Wall Street Journal, l'assureur versera ces primes aux responsables de ses activités financières, ceux-là même qui furent à l'orgine de ses pertes historiques de 99,3 milliards de dollars l'an dernier.Ces bonus sont en effet destinés aux cadres de la filiale londonienne AIG Financial Products, qui ont provoqué la chute, puis la nationalisation de l'ancien numéro un mondial de l'assurance, en ayant souscrit des contrats protégeant les investisseurs contre le risque de non-remboursement d'investissements à risque.

Une partie de ces primes devait être versée dès ce dimanche.

Le principal conseiller économique de la Maison-Blanche, Lawrence Summers, a qualifié de «scandaleuse» la conduite d'AIG, sur la chaîne de télévision ABC.

«Beaucoup de choses terribles se sont passées au cours des 18 derniers mois, mais ce qui s'est passé chez AIG est le plus scandaleux» a-t-il dit.

Le secrétaire au Trésor Timothy Geithner a écrit au président d'AIG Edward Liddy, mis en place par le gouvernement en septembre après la quasi-faillite du groupe, pour se plaindre de cette situation.

M. Liddy, tout en reconnaissant que le versement de ces primes était «de mauvais goût et difficile à recommander», a souligné qu'il lui fallait aller de l'avant pour des raisons légales.

C'est aussi ce qu'a reconnu Lawrence Summers dimanche. «Nous sommes un pays où la loi prévaut. Il y a des contrats. Le gouvernement ne peut pas tout simplement les annuler», a-t-il dit, ajoutant que M. Geithner prenait «toutes les dispositions légales possibles pour limiter ces bonus».

«Nous sommes les premiers à être en colère», a renchéri sur la chaîne NBC une autre des principaux conseillers économique du président Obama, Christina Romer.

Timothy Geithner, a-t-elle dit, «a poussé (les dirigeants d'AIG) à renégocier» ces contrats. «Nous mettons en oeuvre tous les moyens légaux», a insisté Mme Romer, tout en reconnaissant une certaine impuissance. «La vérité, c'est qu'AIG représente un problème. Ce n'est pas un problème que quiconque voudrait avoir à affronter. C'est un problème dont nous avons hérité et que nous gérons du mieux que nous le pouvons».

Mais ces explications n'ont pas convaincu le leader de la minorité républicaine au Sénat, Mitch McConnell. «C'est une situation scandaleuse», a-t-il dit sur ABC, accusant l'administration Obama de vouloir échapper à ses responsabilités.

«Le message, j'en ai peur, pour toutes les entreprises qui cherchent à prendre l'argent du gouvernement, c'est: 'signons un paquet de contrats très vite, et les contribuables paieront les bonus de nos employés'«, s'est-il emporté.

Certains des bonus versés ne dépassent pas 1.000 dollars mais sept responsables d'AIG Financial Product devraient recevoir plus de 3 millions de dollars de primes, selon le New York Times.

Au total, en comptant les primes versées aux cadres des autres activités du groupe (en général, elles, rentables) au titre de 2008 et 2009, AIG devrait débourser cette année 1,2 milliard de dollars de rémunérations variables.

Les pouvoirs publics ont dû mobiliser plus de 170 milliards de dollars pour éviter une faillite du groupe, qui aurait pu avoir des répercussions en cascade sur l'ensemble de la finance mondiale.