La crise économique menace de replonger dans le marasme plusieurs pays d'Europe de l'Est qui avaient crû trouver, en intégrant l'Union européenne (UE), la voie garantie vers la prospérité.

Les États de l'ex-bloc soviétique qui étaient jusqu'à tout récemment désignés comme des «tigres» en raison de la forte croissance annuelle de leur produit intérieur brut (PIB), parfois de l'ordre de 10%, voient l'activité s'effondrer. Et les tensions sociales monter.

 

Au début de mars, le premier ministre hongrois, Ferenc Gyurcsany, a sonné l'alarme en prévenant ses homologues de l'Europe de l'Ouest qu'il fallait agir pour éviter que ne tombe «un nouveau rideau de fer» sur la région.

Il a plaidé, à l'occasion de la tenue d'un sommet sur la crise réunissant les dirigeants européens à Bruxelles, pour un plan d'aide de 160 à 190 milliards d'euros.

L'appel n'a pas été entendu, les chefs d'État préférant opter pour des interventions plus ciblées s'articulant à travers de grandes organisations internationales comme la Banque mondiale ou encore le Fonds monétaire international (FMI), qui pourrait voir ses ressources sensiblement majorées pour faire face à la crise.

«Je ne crois pas qu'il soit nécessaire de séparer plusieurs pays au sein de l'UE. Je soutiendrai une aide de l'UE à tout pays qui en a le besoin, pas spécialement l'Europe de l'Est», a précisé le premier ministre tchèque, Mirek Topolanek, qui chapeaute à l'heure actuelle l'organisation européenne.

Diversité économique

La divergence de ton entre M. Gyurcsany et M. Topolanek reflète la diversité économique qui existe parmi les pays d'Europe centrale et d'Europe de l'Est, portés pendant des années par un afflux massif de capitaux de l'Ouest.

Selon l'Institut viennois d'études économiques comparées, seules la République tchèque, la Pologne et la Slovaquie, qui a récemment adopté l'euro, peuvent espérer voir leur PIB croître en 2009.

Les autres pays de la région membres de l'UE devraient «au mieux stagner» durant cette période tandis que les États les plus affectés subiront une «sévère récession», prévient l'organisation.

Les pays baltes sont particulièrement touchés, comme en témoigne la difficile situation de la Lettonie, qui a vu son PIB s'effondrer au cours du quatrième trimestre après avoir été l'un des champions de la croissance de l'UE.

Plusieurs milliers de manifestants ont défilé en janvier dans les rues de la capitale, Riga, pour protester contre les coupes budgétaires envisagées par le gouvernement de centre-droit, qui a fini par démissionner.

L'État vient d'annoncer une réduction de 15% des revenus des fonctionnaires qui est certaine d'être mal accueillie dans un climat social tendu.

La Hongrie, qui s'est vu attribuer une aide de 20 milliards US à l'automne pour faire face à la crise, a aussi sabré dans les conditions des fonctionnaires à la demande du FMI. L'organisation internationale en fait l'une de ses exigences principales.

Bien qu'ils rechignent à lancer un plan d'aide massif, les pays d'Europe de l'Ouest suivent de près les démêlés économiques des pays de l'Est, notamment parce qu'ils craignent un éventuel contrecoup sur leur système bancaire des investissements massifs réalisés dans la région durant les années de prospérité.

La Banque européenne pour la reconstruction et le développement (Berd) pense que l'UE devrait minimalement revoir les critères de convergence économique régissant l'entrée dans la zone euro pour montrer sa «solidarité» avec les pays touchés. Plusieurs sont confrontés à une forte dévaluation de leur devise nationale, alimentée par la chute des exportations.

«Depuis de nombreuses années, l'intégration croissante de l'Europe a été une source de prospérité et de bénéfices mutuels et nous n'avons pas le droit de laisser ce processus se retourner», prévient le président de la Berd, Thomas Mirow.