Un superprojet immobilier de 265 millions de dollars pourrait « dérailler » dans le quartier Rosemont si des citoyens mécontents réussissent à faire bloquer le rehaussement des hauteurs maximales permises à l'issue d'un référendum, affirme son promoteur.

La phase 2 du Technopôle Angus, proposée par la Société de développement Angus (SDA), prévoit une quinzaine d'immeubles sur les derniers terrains vacants des « shops Angus ». Pour obtenir la densité nécessaire à la rentabilité du projet, la SDA demande de pouvoir construire jusqu'à 25 mètres (huit étages), plutôt que les 22 mètres autorisés à l'heure actuelle. Le zonage devra aussi être modifié pour permettre l'érection de résidences.

L'ampleur du projet a suscité une vive opposition chez des citoyens riverains, qui craignent de perdre leurs vues sur le mont Royal. Ils redoutent aussi que la construction de 500 nouveaux appartements abordables ne fasse baisser la valeur de leurs propriétés, en plus d'augmenter la circulation automobile.

« S'il fallait qu'il y ait un nombre suffisant de monde pour contester, signer un registre, demander un référendum et tout, c'est sûr que ça peut faire dérailler tout le volet résidentiel, et donc le projet. » - Christian Yaccarini, président et chef de la direction de la Société de développement Angus, en entrevue avec La Presse Affaires

SUPERPROJET

Le projet de Technopôle Angus est ambitieux. Il prévoit six immeubles résidentiels, 11 bâtiments commerciaux, une rue piétonne et plusieurs places publiques. L'aspect environnemental est aussi bien présent, puisqu'une « boucle énergétique » permettra aux différents immeubles d'échanger chauffage et climatisation. Une école primaire publique est même envisagée.

Malgré la grogne de plusieurs citoyens, le projet bénéficie déjà de nombreux appuis. Le conseil d'arrondissement de Rosemont - La Petite-Patrie (RPP) a approuvé le changement au plan d'urbanisme en première lecture le 2 mai dernier, dans le but de permettre la fonction résidentielle et l'érection de bâtiments plus hauts.

Le projet a aussi reçu le feu vert du Comité Jacques-Viger (une instance consultative de la Ville en matière d'urbanisme), et il a remporté trois prix à ce jour, avant même la première pelletée de terre. Le maire de RPP, François Croteau, se range derrière la SDA, tout comme les élus de l'opposition.

« Le projet Angus II est exemplaire et trace la voie au modèle de développement du XXIe siècle que nous souhaitons à Montréal. Avec l'inclusion de 20 % de logements sociaux et 80 % de logements abordables, nous avons là une stratégie d'inclusion totale. Il faut le saluer. » - François Croteau, maire de l'arrondissement de Rosemont-La Petite-Patrie

RÉFÉRENDUM ?

La SDA tiendra ce soir une séance d'information avec les citoyens du quartier dans le but de répondre à leurs questions et inquiétudes. Le projet fera aussi l'objet d'une consultation publique formelle dans l'arrondissement le 30 mai prochain.

Des citoyens pourraient ensuite réclamer la tenue d'un référendum pour s'opposer à ce nouvel ensemble résidentiel. Plusieurs centaines de signatures devraient alors être recueillies dans un registre à la mairie de RPP en vue de déclencher officiellement cette procédure.

FONDS DE 10 MILLIONS

Le président de la SDA insiste sur l'aspect abordable de son projet pour justifier les changements demandés au plan d'urbanisme. Le Technopôle Angus prévoit 20 % de logements sociaux, en vertu d'une entente signée avec la Ville de Montréal, et 80 % de condos dits « abordables ». Ceux-ci coûteront entre 255 000 $ (une chambre) et 365 000 $ (trois chambres), taxes comprises.

« Selon notre analyse, on réalise que les premiers acheteurs ne sont pas capables d'acheter dans le quartier, sauf des appartements de 500 à 600 pieds carrés, a avancé Christian Yaccarini. Un couple dont les deux conjoints font chacun de 50 000 $ à 60 000 $ n'est pas capable d'acheter dans le quartier. C'est cette clientèle-là qu'on vise. »

Pour tenter de stimuler l'achat par les familles à revenus modérés, la SDA annoncera prochainement un nouveau fonds immobilier de 10 millions de dollars.

Ce fonds fera des prêts en deuxième hypothèque, remboursables au bout de 8 à 10 ans, pour financer 20 % du coût d'achat d'une copropriété. Un « coup de pouce » qui devrait se traduire par une économie mensuelle d'environ 300 $ et permettre ainsi à un plus grand nombre d'acheteurs de s'installer dans le quartier, avance Christian Yaccarini

La dernière phase du Technopôle Angus, prévue sur un terrain en friche de 750 000 pieds carrés, est évaluée à 265 millions. Quelque 1500 emplois pourraient être créés dans les entreprises qui s'y installeront, estime la SDA.

Photo fournie par la Société de développement Angus et Provencher-Roy

Des consultations publiques seront tenues le 30 mai prochain sur le projet de la phase 2 du Technopôle Angus. 

CARRÉ SAINT-LAURENT

Parallèlement à son projet de Rosemont, la Société de développement Angus amorcera la construction du Carré Saint-Laurent en août prochain, a confirmé hier son président Christian Yaccarini. Ce projet immobilier, marqué par des années de délais et de controverse politique, logera 900 fonctionnaires du ministère de l'Immigration au coeur du « Red Light » de Montréal. Le rez-de-chaussée abritera une soixantaine de kiosques alimentaires indépendants. Des discussions sont déjà en cours avec des restaurateurs, a indiqué M. Yaccarini. La première phase du projet, qui inclura possiblement un volet résidentiel, est évaluée à 110 millions.

Photo fournie par la Société de développement Angus et Provencher-Roy

La construction du projet Carré Saint-Laurent commencera au moins d’août prochain.