Alors que les experts rendent compte d'une pénurie de logements aiguë dans le nord du Québec, le gouvernement de la province s'apprête à lancer un projet pilote d'unités de logements sociaux qui seraient mieux adaptées au climat glacial et à la culture inuite.

Un projet pilote de la Société d'habitation du Québec (SHQ), qui sera implanté à Quaqtaq, dans la région de la baie d'Ungava, devrait être prêt pour accueillir ses occupants dans les premiers mois de l'année. Deux organismes gouvernementaux superviseront les opérations.

La SHQ souhaite tester un nouveau prototype adapté à toutes les unités: un duplex d'un étage avec des appartements de deux chambres équipés d'une boîte mécanique au milieu des deux logis qui contient un réservoir d'eau, une chaudière et un système de ventilation.

Le logement a toutefois été conçu avec une meilleure isolation pour augmenter l'efficacité énergétique, des fonctions aérodynamiques pour minimiser les problèmes amenés par l'accumulation de neige et des fondations sur pieux, qui s'adaptent mieux aux variations du pergélisol.

Jean-François Gravel, un expert technique de l'agence québécoise, a expliqué que le projet visait à examiner plusieurs éléments pour vérifier lesquels pourraient faire partie des prochains projets.

Ainsi, l'idée n'est pas de répéter le modèle lui-même, mais bien d'observer ce qui fonctionne bien pour le reproduire.

Les éléments techniques, tel que la qualité de l'air et l'efficacité énergétique, seront surveillés en ligne par l'agence. Les fondations sur pieux sont largement utilisées ailleurs dans le Canada, mais ils sont trop peu étudiés au Québec, selon M. Gravel.

Les familles qui vivent là-bas donneront également leurs impressions sur les changements apportés aux plans selon les demandes d'un comité de résidants inuits qui mèneront des consultations publiques.

Les appartements comprennent un salon, une salle à manger et une cuisine combinés pour permettre aux grandes familles de se réunir. Ils incluront également un porche pour entreposer l'équipement extérieur.

Les cuisines auront aussi un îlot mobile pour donner plus d'options aux résidants, ainsi qu'une armoire avec verrou pour mettre l'équipement de chasse, et de gros blocs à découper pour préparer le poisson ou pour faire des jeux.

Alain Fournier, l'un des fondateurs de la firme d'architectes FGMDA, qui a conçu le modèle, a expliqué que ces éléments fonctionnels aidaient les Inuits à «s'autonomiser par l'architecture».

De plus en plus, les communautés des Premières Nations travaillent avec les gouvernements et les architectes pour développer des bâtiments qui les représentent davantage.

M. Fournier a récemment conçu des terminaux d'aéroports dans le nord de la province au cours des dernières années qui présentent chacun un thème choisi par les communautés autochtones. L'un d'entre eux représente un béluga, un autre, un omble chevalier, par exemple.

«Ces thèmes sont intégrés et exprimés dans les édifices et dans les oeuvres. Ce qui est important, c'est que ça vienne ultimement d'eux», a-t-il soutenu.

Lorsqu'il est temps de construire des logements sociaux, cependant, il y a certaines limites sur ce qui peut être effectué. Les coûts de construction dans cette région sont trois fois plus élevés en raison du climat, de l'éloignement et du manque de main-d'oeuvre qualifiée.

Le matériel de qualité supérieure coûte plus cher, ce qui signifie que moins d'habitations seront construites à un moment où il y a une pénurie de logements dans le nord du Québec, estimée à un manque de 900 à 1000 unités.

M. Gravel indique que la facture totale du projet pilote n'a pas encore été établie. Les coûts seront nécessairement plus dispendieux que pour des appartements normaux, mais il s'agit d'un investissement qui pourrait rapporter, selon lui.

«Toute amélioration dans l'efficacité énergétique signifie que les coûts d'opération - les factures de chauffage - sont beaucoup plus bas et l'argent économisé peut être investi à construire plus d'unités», a-t-il souligné.

Jimmy Okpik, qui gère l'habitation à Quaqtaq, ne savait pas qui sont les résidants qui testeraient ces unités, mais il est certain qu'il y aura beaucoup de volontaires.

«Il y a toujours une liste d'attente. La liste d'attente n'est jamais éliminée», a-t-il affirmé.