Alors que le débat sur la taille maximale des immeubles fait rage autour du Centre Bell et sur l'emplacement de la Maison Alcan, l'arrondissement de Ville-Marie souhaite rehausser la hauteur permise sur une portion de la rue Amherst, en lisière du Village gai.

La modification proposée vise à augmenter la limite de 16 à 25 mètres au nord du Marché Saint-Jacques, près de la rue Ontario. Sans faire trop de bruit, ce changement au plan d'urbanisme fait l'objet d'audiences de l'Office de consultation publique de Montréal (OCPM) depuis deux mois.

Le projet résidentiel Carré des Arts prévoit la construction d'un immeuble d'une cinquantaine d'appartements sur un terrain de stationnement, qui intégrera aussi une ancienne église voisine. Le promoteur ne prévoit pas construire jusqu'à 25 mètres, mais il a besoin d'un rehaussement de la limite pour intégrer les éléments mécaniques sur le toit du bâtiment, a expliqué Jean Pelland, associé principal chez Sid Lee Architecture, qui a dessiné les plans.

«C'est une tête d'îlot, et selon moi, notre démarche est pertinente dans ce coin-là, d'autant plus qu'on ne viendra pas surplomber les bâtiments environnants», a fait valoir l'architecte à La Presse Affaires.

Jean Pelland souligne que deux immeubles voisins dépassent déjà la hauteur de son projet, dont une tour résidentielle de 33 mètres située juste au nord. Qui plus est, le bâtiment de cinq étages conçu par Sid Lee ne devrait pas être plus haut que le Marché Saint-Jacques, édifice patrimonial récemment rénové.

Craintes des citoyens

Divers citoyens et organismes ont exprimé des réserves quant au rehaussement proposé de la hauteur maximale et à l'aspect cubique du bâtiment. Éric Sève, qui habite le quartier, a ainsi qualifié le projet de «rétrograde» pendant les audiences de l'OPCM.

«Pour moi, il ressemble à un marché de dupes dans lequel on a un entrepreneur qui arrive, qui consent à intégrer une ancienne église à un projet, mais qui va négocier ça en échange de nombreux aménagements aux règlements urbains, ce qui va lui permettre d'augmenter la hauteur du bâtiment», a avancé ce citoyen.

Michel Goudreault, gestionnaire du Marché Saint-Jacques, a pour sa part estimé que «l'aspect architectural de ce bâtiment-là ne cadre absolument pas dans son environnement».

Il faut dire que la question des hauteurs maximales est revenue à l'avant-scène de l'actualité depuis quelques semaines à Montréal, avec son lot de controverses. Cadillac Fairview demande à la Ville de rehausser de 120 à 210 mètres les limites au sud du Centre Bell, tandis qu'un autre promoteur souhaite ériger une tour de 30 étages sur l'emplacement de la Maison Alcan, au grand dam de plusieurs urbanistes.

Plusieurs éloges

Malgré certaines critiques, le projet du Carré des Arts, beaucoup plus modeste, s'est aussi attiré plusieurs éloges. Catherine Thibault, du bureau d'urbanisme Rayside Labossière, situé à un jet de pierre, a souligné devant l'OCPM la «haute qualité architecturale» du projet, ainsi que l'intégration réussie de l'ancienne église.

Le comité consultatif d'urbanisme de l'arrondissement de Ville-Marie a pour sa part émis un avis préliminaire favorable au projet en février dernier.

L'OPCM doit rendre son rapport d'ici septembre. Les modifications proposées - incluant le rehaussement des hauteurs permises - devront ensuite être soumises au conseil municipal.

Le promoteur Jean Lachapelle, qui a notamment réalisé le projet Lofts GenX dans Hochelaga-Maisonneuve, bénéficiera ensuite d'un délai maximal cinq ans pour réaliser son projet. Celui-ci n'a pas rappelé La Presse Affaires.