La mise au rancart du mégaprojet immobilier Maison Ogilvy donnera une deuxième chance au bistro Thursday's, une institution de la rue Crescent.

Selon le projet initial de 150 millions de dollars, le Thursday's devait passer sous le pic des démolisseurs en même temps que l'Hôtel de la Montagne, cet automne. Les promoteurs prévoyaient une centaine de condos, un hôtel et un mail urbain dans ce secteur névralgique du centre-ville, mais ces plans ont été mis au rancart.

Pour la famille Ragueneau, propriétaire de l'hôtel et du resto-bar, ce changement de programme a représenté une occasion en or. « On a eu une opportunité à la fin mars, début avril, de réacquérir notre ancienne bâtisse du côté Crescent, et on est arrivé à une entente », explique Torrance Ragueneau, qui reprend le flambeau de son père Bernard.

Commotion

La fermeture annoncée du Thursday's avait causé une commotion parmi la clientèle d'habitués et les employés du bistro ouvert depuis 40 ans. L'établissement, fermé en septembre 2012, était encore considéré par plusieurs comme une institution, fréquentée notamment par les joueurs du Canadien et des Alouettes.

Torrance Ragueneau a entrepris une rénovation en profondeur du complexe, en vue d'une réouverture à la mi-février 2014. Un chantier complexe, qui a révélé un problème majeur de structure.

« C'est trois vieilles bâtisses qui sont mises ensemble, une de 1888 et deux autres de 1912, alors quand on a commencé à ouvrir, on a vu qu'il y avait de mauvaises surprises, a-t-il souligné. On remet tout ça en place pour être là pour un autre 40 ans, si je peux dire. »

Entre 80 et 100 employés seront embauchés pour travailler dans le nouveau resto-bar. La formule et le logo seront « simplifiés », mais les plats classiques resteront au menu, a indiqué Torrance Ragueneau.

Une bonne affaire

La famille Ragueneau a empoché des dizaines de millions de dollars - une soixantaine, selon diverses sources - en vendant en l'Hôtel de la Montagne et le Thursday's au consortium dirigé par Selfridges. L'entreprise ontarienne, propriétaire du magasin Ogilvy, a conservé l'hôtel, dont la démolition a commencé cet automne.

Torrance Ragueneau refuse de préciser la somme payée pour le rachat du Thursday's, mais il semble que sa famille ait fait une très bonne affaire. « On est très heureux de la transaction, c'est ce que je peux vous dire. Ils étaient contents et nous aussi. »

Selfridges affirme toujours vouloir agrandir le magasin Ogilvy, sur le terrain qui sera dégagé grâce à la démolition de l'hôtel. Son ancien partenaire Carbonleo (dérivé du promoteur Devimco), compte pour sa part construire des appartements et un hôtel sur le terrain de stationnement adjacent à l'Hôtel de la Montagne.

Si l'avenir de ces projets reste flou, la réouverture du Thursday's, elle, constitue une bonne nouvelle concrète pour la rue Crescent. Cette artère a connu des moments difficiles depuis deux ans, avec le lock-out de la Ligue nationale de hockey et les nombreuses manifestations étudiantes du printemps 2012, dit Steve Siozos, président de l'Association des marchands de la rue Crescent.

« Ça aide l'esprit dans la rue, et il y a aussi l'espoir que la bâtisse où était le Hard Rock Café soit relouée au printemps, a-t-il souligné. Ça donne un vote de confiance à la rue, aux commerces. »