Après le boom, l'heure est à la disette pour bien des courtiers immobiliers au Québec. Près de 1000 d'entre eux ont renoncé à leur licence depuis deux ans.

Le ralentissement du marché immobilier québécois commence à toucher la profession de courtier. Le nombre de permis d'exercice a reculé de près de 1000 depuis 2 ans, un repli jamais vu depuis le milieu des années 90.

«Historiquement, il y a toujours eu des baisses, c'est juste que ça faisait très, très longtemps qu'il n'y en avait pas eu, depuis 1996», a indiqué Robert Nadeau, président de l'Organisme d'autoréglementation du courtage immobilier du Québec (OACIQ), en entrevue à La Presse Affaires.

Au 30 avril dernier, soit la fin du dernier exercice de l'OACIQ, 16 990 courtiers et agences avaient maintenu leur permis d'exercice. Ils étaient 17 590 à pareille date l'an dernier et 17 963 l'année précédente, soit un écart négatif de 973 en 2 ans.

Pas de péril

Selon Robert Nadeau, ces deux reculs consécutifs ne mettent en lumière aucun «péril» pour la profession. Le nombre de permis est revenu à peu près à ce qu'il était en 2009-2010, souligne-t-il, alors que la province vivait un véritable boom immobilier.

Le président de l'OACIQ reconnaît toutefois que la baisse de cadence récente du marché québécois n'est pas étrangère à ce repli du nombre de licences. «C'est un marché qui est plus en équilibre, c'est certain. Il y a un climat économique un peu instable en ce moment, les gens attendent de voir s'il y aura une reprise.»

Le tsunami de projets de condos neufs à Montréal et ailleurs en province pourrait aussi avoir joué un rôle. «Au niveau du marché de la copropriété, le neuf a inondé le marché, a avancé M. Nadeau. Tant que ça ne se sera pas un peu résorbé, ç'a un effet en cascade sur toutes les autres transactions immobilières.»

Les projets neufs constituent en effet une concurrence supplémentaire au marché de la revente, lui-même saturé comme jamais. À la fin du troisième trimestre, on comptait 69 774 propriétés existantes inscrites sur le système interagences (SIA) au Québec, ce qui représente une hausse de 11% sur un an. C'est sans compter les milliers de résidences à vendre sans intermédiaire.

Les délais se sont aussi allongés. Il faut en moyenne 91 jours pour conclure une transaction dans le Grand Montréal; contre 77 il y a 2 ans.

Sur le terrain, plusieurs courtiers confirment que la partie est moins facile qu'elle ne l'était il y a deux ans. «C'est vrai que l'inventaire a augmenté, donc il faut être très actif aujourd'hui pour tirer son épingle du jeu», a observé la courtière Marie-Claude Palassio, de l'agence McGill Immobilier.

Mme Palassio a bouclé plusieurs ventes au cours des derniers mois, mais elle connaît au moins deux courtiers qui ont quitté la profession pendant cette période.

Loi plus sévère

Le ralentissement du marché québécois survient après l'adoption d'une nouvelle loi sur le courtage immobilier au printemps 2010. Cette loi a entraîné la mise en place d'examens très corsés pour les aspirants courtiers et d'une série de nouvelles exigences plus sévères pour maintenir son permis.

En entrevue à La Presse Affaires en 2010, l'ancien président de la Fédération des chambres immobilières du Québec (FCIQ), Michel Beauséjour, avait souligné que la nouvelle loi visait justement à «professionaliser» le métier de courtier. L'objectif: écarter les «peddlers» qui souhaitaient vendre des maisons en dilettante, avait-il dit.

Le nombre de permis de pratique maintenus au 30 avril (16 990) comprend autant ceux des courtiers que des agences immobilières. Notons que le nombre de licences maintenu par des agences a lui aussi fléchi, passant de 1472 il y a 2 ans à 1369 cette année.

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IMMOBILIER EN CHIFFRES

Variation des ventes en nombre et en pourcentage dans le Grand Montréal:

2008 : 40 440 (- 7%)

2009 : 41 751 (+ 3%)

2010 : 42 298 (+ 1%)

2011 : 40 354 (- 5%)

2012 : 40 089 (- 1%)

2013* : 29 236 (- 10%)

SOURCE: FCIQ

Nombre de nouvelles inscriptions et variation en pourcentage sur un an dans le Grand Montréal:



2009 : 23 442 (+1%)

2010 : 21 333 (- 9%)

2011 : 24 708 (+ 11%)

2012 : 27 102 (+ 10%)

2013* : 30 734 (+14%)

*Janvier à septembre



SOURCE: FCIQ