Homburg Invest (HI), qui ambitionne de réaliser un projet immobilier de plusieurs centaines de millions à l'ancienne gare Viger de Montréal, vit un véritable feuilleton entourant sa prise de contrôle.

Le fondateur de la firme d'Halifax, Richard Homburg, est au coeur de l'affaire. L'homme est actionnaire majoritaire de HI, avec 46,2% des actions en circulation et 72,5% des droits de vote, mais il a quitté la présidence de l'entreprise et du conseil d'administration en mars dernier.

Moins de trois mois plus tard, en juin, M. Homburg a déposé une offre par le biais d'une société qu'il contrôle indirectement - Homburg Canada inc. (HCI) - pour racheter toutes les actions de HI et fermer son capital. La proposition, qui accolait une valeur de 3,25$ l'action, aurait totalisé environ 63 millions de dollars.

Le conseil de HI a rejeté unanimement cette offre mardi dernier, jugeant qu'elle n'était pas «dans les meilleurs intérêts» de la société. Ce à quoi Richard Homburg a répliqué, dans la nuit d'hier, avec une proposition d'achat hostile reprenant en gros les termes de sa première offre.

Liens étroits

Jusqu'à hier, M. Homburg avait maintenu des liens très étroits avec HI : sa société HCI agissait comme gestionnaire pour les immeubles détenus par le groupe. La proximité entre les deux entités était si grande que le nouveau chef de la direction d'HI, Jan Schöningh, et le chef des finances, étaient rémunérés par HCI.

Or, HI a décidé hier matin de couper les ponts avec HCI. La firme a rapatrié les postes de ses deux principaux dirigeants à l'interne, en plus de rompre le contrat de gestion des immeubles. «Il y a clairement une cassure», a commenté sous le couvert de l'anonymat un analyste qui suit de près l'entreprise.

HI a refusé de répondre à la proposition hostile de M. Homburg, hier, soulignant dans un communiqué qu'«aucune offre formelle n'a été faite». Les dirigeants de HI ont aussi décliné les demandes d'entrevues de La Presse Affaires.

Distanciation

HI, qui possède une centaine d'immeubles en Europe et en Amérique du Nord, a été frappé de plein fouet par la crise du crédit. Affaibli, le groupe a décidé en décembre 2009 de se scinder en cinq entités distinctes, dont le Fonds de placement immobilier (FPI) Homburg, qui gère tous les actifs canadiens.

Ce fonds, doté d'une équipe de direction indépendante, détient notamment la Place Alexis Nihon et la Gare centrale du CN à Montréal. HI détenait au départ environ 50% des parts du FPI Homburg, un pourcentage qui a baissé graduellement jusqu'à 24,4% en date d'hier.

Les efforts pour se distancier du fondateur Richard Homburg ne sont pas fortuits, croit l'analyste qui longuement parlé à La Presse Affaires hier. Il estime que la réputation de l'homme d'affaires a été «ternie» auprès des actionnaires de HI, qui ont vu la valeur de leurs actions fondre depuis 2007.

Le FPI Homburg, pour sa part, poursuit sur sa lancée. Il multiplie les acquisitions au Québec et en Alberta depuis plusieurs mois, et son président confiait ce printemps avoir d'autres cibles en vue à Montréal, où se trouve son siège social. La valeur de ses propriétés dépasse 1,1 milliard de dollars.

Les parts du FPI ont clôturé hier à 12,48$ hier à la Bourse de Toronto, en hausse de 1,3% sur une journée et de 24% depuis un an. Selon l'analyste, les tribulations entourant la prise de contrôle d'HI ne devraient pas avoir d'incidence sur le Fonds.

Quant à HI, les discussions sur une possible prise de contrôle ont stimulé le cours de ses actions, hier. Le titre a clôturé à 2,78$ hier à la Bourse de Toronto, en hausse de 13,5% en une séance. L'action a perdu 49,5% de sa valeur depuis un an.

Fin avril, le président de HI, Jan Schöningh, affirmait que le projet d'un vaste complexe résidentiel et hôtelier à la gare Viger était toujours bien vivant. La valeur du complexe, situé non loin de la tour de Radio-Canada dans l'est du centre-ville, pourrait osciller au total entre 200 et 250 millions de dollars.