Le drame silencieux des saisies immobilières se poursuit chaque jour aux États-Unis, et le gouvernement peine à arrêter les banques dans un processus qui déprime toujours les prix des logements.

De nombreux ménages américains, souvent les plus défavorisés, continuent de payer au prix fort le rêve envolé de l'accession à la propriété.

«Plus de deux millions de propriétaires ont reçu un avis d'expulsion en 2008; en 2009, c'était près de 2,8 millions, et des millions d'autres sont prévus en 2010», d'après un récent rapport d'un inspecteur indépendant du département du Trésor.

Dans un pays où l'épargne est une vertu relativement rare, peu de familles ont les moyens de faire face quand elles ont perdu leur toit.

«Bon nombre de personnes en Amérique vivent sur la paie du dernier mois. Un mauvais coup peut les pousser vers la misère et la rue», relève Moe Bedard, créateur d'un site internet d'aide aux emprunteurs.

Avec un plan de relance de 787 milliards de dollars, un plan d'aide à l'immobilier lancé en mars 2009 a été parmi les premières mesures économiques du président Barack Obama après son arrivée au pouvoir.

Il comprenait des aides aux emprunteurs immobiliers en difficulté, ceux qui consacrent parfois la moitié de leur revenus mensuels, sinon plus, à rembourser des emprunts contractés au moment de la bulle immobilière. Avec l'aide des pouvoirs publics, ceux-ci allaient pouvoir négocier un rééchelonnement de leur dette, qui avait souvent fini par dépasser la valeur de leur logement.

Vendredi, le gouvernement a reconnu l'échec relatif de ce plan.

Alors que l'ambition initiale était d'«offrir une réduction des échéances mensuelles à 3 à 4 millions de propriétaires en danger», dans un cadre de temps non précisé, un million de ménages bénéficiaient d'un rééchelonnement provisoire ou définitif de leurs échéances au bout d'un an. Et seuls 170 000 d'entre eux avaient réussi à aller au bout des procédures, leur permettant de réduire leurs paiements mensuels de manière permanente.

Le gouvernement a annoncé des mesures plus contraignantes pour forcer les banques à faire bénéficier de ces mesures de rééchelonnement à davantage d'emprunteurs.

Elles seront forcées de plafonner les remboursements de prêts immobiliers à 31% des revenus mensuels des chômeurs.

«Nous n'avons pas d'intention ici de stopper ce qui pourrait être, au final, jusqu'à 10 ou 12 millions dans les trois prochaines années», a expliqué à la presse une conseillère économique de la Maison Blanche, Diana Farrell.

«L'objectif est de tailler juste assez dans la part de ceux à qui nous pensons pouvoir éviter une saisie», a-t-elle ajouté.

L'inspecteur du Trésor relevait dans son rapport mardi diverses difficultés, comme la complexité des procédures administratives ou l'insuffisance des efforts publicitaires auprès des populations les plus concernées. Pire, certains emprunteurs, même avec des paiements réduits, continuent d'être en retard sur leurs échéances.

D'après des chiffres publiés jeudi par deux régulateurs bancaires, 13,6% des emprunteurs américains étaient en retard sur leurs paiements mensuels au quatrième trimestre 2009.

L'énorme stock de logements saisis que les banques cherchent à vendre pèse aussi sur un marché où le faible niveau des ventes déprime les prix, et où la construction est à des niveaux historiquement faibles.

«Il faut souligner que ce n'est pas seulement important pour ceux qui sont confrontés eux-mêmes au problème des saisies, mais aussi pour l'économie plus généralement», a souligné vendredi le président de la commission des services financiers à la Chambre des représentants, le démocrate Barney Frank.