Si vous avez l'impression que le prix des maisons a explosé en parcourant les petites annonces ces derniers temps, vous n'avez pas rêvé. L'accessibilité à la propriété s'est dégradée au Québec, qui enregistre un des pires reculs de tout le pays.

Selon les données publiées hier par RBC, la portion du salaire avant impôts nécessaire à l'achat d'un bungalow a atteint 34,5% au quatrième trimestre de 2009, en hausse de 1,1% sur un an. Un bond presque quatre fois supérieur à la moyenne canadienne.«Il semble que la hausse des prix commence à faire sentir son effet négatif sur l'abordabilité», a commenté Robert Hogue, premier économiste à la RBC, en entrevue à La Presse Affaires.

Seule la Colombie-Britannique a vu son accessibilité se dégrader davantage que le Québec. La portion de salaire nécessaire à la possession d'un bungalow - la mesure étalon de l'indice RBC - atteint 69% à Vancouver, ce qui en fait de loin la ville la plus chère au pays. À Montréal, le ratio a grimpé de 0,9% au quatrième trimestre, à 39,1%. Cela se compare à 49,1% à Toronto, 40,4% à Ottawa, 37,1% à Calgary et 32,9% à Edmonton.

S'il est moins facile qu'avant d'acheter une maison au Québec, la situation n'est pas inquiétante pour le moment, dit toutefois Robert Hogue. «On est un peu au-dessus de la moyenne historique, mais pas de façon dramatique.»

Hausses en février

Et à quoi peut-on s'attendre pour les premiers mois de 2010? Les données publiées hier par l'Association canadienne de l'immeuble (ACI) pointent vers une dégradation accrue de l'accessibilité.

Partout au pays, les prix ont poursuivi leur forte progression en février. La valeur moyenne des maisons existantes a bondi de 18,2% sur un an, à 335 655$. Au Québec, la hausse atteint 10,7%, à 240 172$.

Le nombre de transactions a grimpé de 44% par rapport à février 2008, battant des records au Québec et en Ontario, ajoute l'ACI. En rythme annualisé, le nombre de transactions a cependant reculé de 1,5%, à 42 799 logements. L'activité a baissé à Vancouver, tandis qu'elle est demeurée vigoureuse à Toronto.

Ce léger recul de la revente, combiné à une hausse des nouvelles inscriptions et des mises en chantier, laisse croire que le marché se calme peu à peu. Un grand soulagement pour bien des économistes inquiets d'une surchauffe.

«Il y a des signes encourageants que les conditions du marché deviennent plus viables», a indiqué Douglas Porter, de la BMO. Selon lui, les données publiées hier par l'ACI laissent croire que le marché immobilier canadien aura frôlé - et évité - une bulle.

Le scénario d'une bulle serait aussi évité au Québec, estime Desjardins. Et ce, malgré l'explosion des prix depuis 2000.

En 10 ans, le coût des propriétés a augmenté de 112% dans la province, alors que la croissance des revenus s'est limitée à 33%, indique l'institution dans une étude. Le marché résidentiel est devenu «excessivement cher», mais la baisse des taux hypothécaires a «sauvé la mise», fait valoir Desjardins.

Le risque d'assister à un recul des prix est très faible d'ici deux ans au Québec, ajoute l'étude. La remontée des taux à partir de l'été prochain sera toutefois à suivre, puisqu'elle risque d'affecter la situation économique des ménages.

Robert Hogue, de RBC, entrevoit quant à lui un refroidissement en douceur du marché immobilier, au fur et à mesure que les taux hypothécaires se redresseront. «La Banque du Canada va y aller doucement pour s'assurer de ne pas causer de tort à l'économie», prévoit l'économiste.