Certains Canadiens vivant dans des marchés immobiliers en pleine ébullition pourraient bien être forcés de renoncer à acheter leur première maison en raison des nouvelles règles annoncées cette semaine par le gouvernement fédéral.

Bien qu'elles ne soient probablement pas dissuasives pour la majorité des Canadiens, ces nouvelles mesures pourraient rendre plus difficile l'obtention d'un prêt hypothécaire aux personnes qui se qualifiaient de justesse auparavant, selon des experts.

Le président de l'Association canadienne de l'immeuble, et courtier immobilier de Regina, Dale Ripplinger, est néanmoins d'avis que les nouvelles exigences constituent des manières raisonnables de garder un contrôle sur les dépenses.

En fait, les changements apportés visent à éviter que les Canadiens ne s'endettent trop, à l'approche d'une augmentation des taux d'intérêt, probablement un peu plus tard cette année. L'endettement est du reste un problème ayant contribué à la crise immobilière aux États-Unis.

«Si vous ne vous qualifiez pas pour un prêt hypothécaire à taux fixe de cinq ans en raison des charges de remboursement, alors vous ne devriez peut-être même pas penser à acheter une maison», a argué Jim Murphy, de l'Association canadienne des conseillers hypothécaires accrédités.

À compter du 19 avril, tous les Canadiens désirant s'acheter une maison devront respecter les exigences d'un prêt hypothécaire à taux fixe de cinq ans, même s'ils en contractent un à taux plus bas.

Cette modification fera grimper les revenus totaux requis pour devenir propriétaire, mais pas nécessairement les versements mensuels.

Au dire de Dale Ripplinger, la majorité des Canadiens prend déjà garde de ne pas dépasser ses possibilités financières. Mais les résidants de marchés en pleine ébullition, comme Vancouver, Toronto et Calgary, doivent souvent gratter un peu plus le fond de leurs poches.

Les personnes ayant trouvé la maison de leurs rêves pourraient être tentées d'agir avant même l'entrée en vigueur des nouvelles exigences, et même risquer de dépasser leurs possibilités financières, pour être sûres de se qualifier aux termes des règles actuelles.

La fin de la période des taux d'intérêt à leur creux historique ne découragera pas la plupart des éventuels acheteurs. Des taux à la hausse, les nouvelles règles, l'arrivée du printemps, saison habituellement marquée par l'activité dans le secteur de l'immobilier, et l'imminence de l'harmonisation des taxes en Ontario et en Colombie-Britannique pourraient être à l'origine d'un marché de l'immobilier en bonne santé au cours du premier semestre de 2010.

Mais M. Ripplinger estime que plusieurs personnes pourraient conclure qu'elles n'ont actuellement pas les moyens de s'acheter une maison et préférer attendre d'amasser davantage d'argent pour la mise de fonds.

Adrienne Warren, économiste à la Banque Scotia, pense que les nouvelles exigences devaient aider à réduire les «guerres d'enchères», plus particulièrement en ce qui concerne les propriétés les plus chères.

Selon elle, la Banque du Canada augmentera sont taux directeur d'un point de pourcentage, à 1,25 pour cent, en milieu d'année, puis une autre augmentation du même ordre suivra en 2011.

En vertu des modifications annoncées cette semaine par le ministre fédéral des Finances, Jim Flaherty, les propriétaires qui voudraient réhypothéquer leur maison ne pourront le faire qu'à la hauteur de 90 pour cent de la valeur de la propriété, et non plus de 95 pour cent.

De plus, une mise de fonds de 20 pour cent sera exigée pour les prêts hypothécaires assurés par la Société canadienne d'hypothèques et de logement (SCHL) pour acheter une propriété destinée à la location.

L'Association canadienne des conseillers hypothécaires accrédités ne croit pas que le marché de l'immobilier canadien est surchauffé, et Jim Murphy se réjouit que le gouvernement fédéral n'ait pas apporté de modifications qui auraient eu des répercussions sur tous les prêts hypothécaires assurés par la SCHL.

«(Le gouvernement) aurait pu agir de manière excessive, (il) aurait pu bloquer les activités du secteur de l'immobilier en décrétant des règles plus sévères dans une économie encore très fragile», a expliqué M. Murphy.