Les difficultés financières de la station de ski Tremblant causent des soucis au gouvernement du Québec, qui a presque fait une croix sur les généreux prêts et subventions consentis au promoteur immobilier Intrawest.

Pour développer le centre de villégiature de cette montagne des Laurentides, Québec a consenti à Intrawest, au cours des années 90, quatre prêts sans intérêt totalisant 21 millions de dollars. L'essentiel de ces prêts (90%) n'est pas garanti.

Selon ce qui avait été convenu à l'époque, Intrawest devait commencer à rembourser ces sommes à partir de 2000 et avoir complètement repayé ces prêts en 2006. Or, Intrawest n'a pas encore remis un sou à Québec, a révélé Jacques Daoust, PDG d'Investissement Québec, en marge de la Rencontre économique 2010, qui s'est tenue hier à Lévis.

Le gouvernement du Québec a pourtant donné du lest à Intrawest, en lui permettant de rembourser ces 21 millions de dollars à partir de 2010... Mais devant la perspective que l'entreprise de Colombie-Britannique lui fasse faux bond, le gouvernement s'est discrètement préparé au pire.

«Comme tout banquier qui se respecte, nous avons pris des réserves», dit Jacques Daoust. Ainsi, un total de 19 millions de dollars en réserves a déjà été passé dans les charges du gouvernement.

Même si Intrawest est un mauvais payeur, Québec était encore disposé à lui octroyer une subvention de 32 millions de dollars en 2008, pour que l'entreprise parachève son projet de construction. Le gouvernement n'a (heureusement) pas déboursé cette somme, étant donné que ces travaux d'expansion n'ont pas encore été entrepris.

Intrawest se trouve en de sérieuses difficultés financières depuis son rachat par un fonds d'investissement new-yorkais, Fortress Investment Group. En 2006, au sommet de la bulle immobilière, Fortress a offert une prime de 20% aux actionnaires de ce promoteur immobilier, tout en prenant à sa charge une dette de 950 millions. Mais pour financer cette transaction totalisant 2,8 milliards, Fortress a lourdement endetté Intrawest, de sorte que l'entreprise de Vancouver était vulnérable à tout ralentissement de l'économie.

Juste avant Noël, Intrawest a loupé un paiement de 524 millions. Cette échéance avait déjà été reportée de deux mois par les créanciers, au nombre desquels se trouvent la firme Davidson Kempner et les restes de la banque d'affaires Lehman Brothers, en faillite.

Ces créanciers ont donc entrepris la liquidation des principaux centres de villégiature de l'entreprise, dont Whistler Blackcomb, en Colombie-Britannique, afin d'obtenir le remboursement de leurs prêts impayés. Cette vente aux enchères, annoncée cette semaine dans le Wall Street Journal, entre autres médias, doit se tenir le 19 février prochain, alors que les Jeux olympiques d'hiver de Vancouver battront leur plein. Mais on ne pourrait imaginer meilleure publicité pour vendre la station de Whistler, où se tiendront les compétitions de descente en ski!

Si Intrawest réussit à trouver les millions manquants ou à convaincre ses créanciers de la refinancer de nouveau, cette vente aux enchères pourrait bien ne pas avoir lieu. Mais la vente possible et à courte échéance de la grande station Tremblant a semblé prendre de court les dirigeants du Québec inc. qui sont réunis à Lévis.

La Caisse de dépôt et placement du Québec comme la Société générale de Financement (SGF) n'ont pas encore été sollicitées par qui que ce soit.

Seule la rentabilité potentielle du centre de villégiature inciterait la Caisse à investir dans la station Mont Tremblant, a indiqué son président et chef de la direction, Michael Sabia.

La SGF, quant à elle, a récemment investi dans le secteur, en injectant 35 millions dans le développement de la station de ski le Massif, de Charlevoix. «Il s'agit d'un grand projet qui comporte beaucoup de développement, alors que Tremblant est déjà passablement développé», note Pierre Shedleur, PDG de la SGF.

Loto-Québec attend néanmoins la construction d'un hôtel et d'un centre des congrès sur le versant Soleil de la montagne afin d'accroître la clientèle à son casino, qui a ouvert ses portes en juin dernier. La venue d'un nouveau propriétaire pourrait donc retarder la réalisation de ce développement.

Pour joindre notre journaliste: sophie.cousineau@lapresse.ca