Le gouvernement Charest tarde trop à permettre l'entrée en vigueur de la nouvelle loi sur le courtage immobilier au Québec, déplorent des intervenants de ce secteur.

Conséquence? Des améliorations importantes au cadre professionnel du courtage qui visent à renforcer la protection du public en immobilier demeurent figées sur les tablettes législatives.

En fait, la nouvelle loi sur le courtage immobilier a été adoptée à l'Assemblée nationale en mai 2008, après des années de consultations et de discussions dans le secteur.

Mais sa mise en application, d'abord prévue pour cet automne, se bute au retard du gouvernement à publier le «projet de règlement» qui doit préciser l'application de la prochaine loi du courtage immobilier.

«L'entrée en vigueur de la nouvelle loi est attendue avec impatience dans le secteur de l'immobilier. D'autant plus que c'est un bon projet pour mieux protéger le public, parce qu'il responsabilise davantage les courtiers et les agences», commente Michel Beauséjour, chef de la direction de la Fédération des chambres immobilières du Québec.

On s'impatiente aussi dans le milieu des juristes - avocats, notaires - qui travaillent beaucoup en immobilier.

«C'est de plus en plus urgent que cette réforme législative se mette en place. Il faut cesser de tourner en rond», indique Yves Joli-Coeur, avocat montréalais spécialisé en droit de l'immobilier et de la copropriété.

Auteur d'ouvrages grand public dans ce domaine, et formateur au Barreau du Québec, Me Joli-Coeur dirige aussi le Salon de l'immobilier, qui regroupe chaque année en novembre des dizaines de professionnels et de conseillers en immobilier résidentiel.

D'ailleurs, la nouvelle loi du courtage devait faire partie des sujets importants présentés au prochain Salon, qui aura lieu dans quelques jours au Palais des congrès de Montréal.

Mais l'organisme le plus engagé dans l'implantation du nouveau cadre législatif, l'Association des courtiers et agents immobiliers du Québec (ACAIQ), a décidé de ne pas participer au Salon en raison du retard du gouvernement Charest à divulguer les règlements de la nouvelle loi.

Au siège social de l'ACAIQ, à Brossard, on a aussi décliné une demande d'entrevue de La Presse Affaires.

«Nous attendons le projet de règlement par le gouvernement avant de faire tout autre commentaire aux médias», a indiqué Dominique Racine, porte-parole de l'ACAIQ.

Pour Me Joli-Coeur, ce mutisme de l'ACAIQ ainsi que le retard du gouvernemental Charest nuisent à l'intérêt du public en immobilier.

«Pourtant, avec la quantité énorme d'argent qui circule en immobilier, le public est en droit d'obtenir une meilleure protection», indique l'avocat.

«La plupart des courtiers font un bon travail pour leurs clients vendeurs ou acheteurs. Mais j'en vois encore qui acceptent toutes sortes de mandats, en copropriété par exemple, qui dépassent amplement leurs compétences.»

D'ailleurs, la responsabilisation accrue et individuelle des courtiers en immeuble est au coeur de la prochaine loi québécoise.

À ce titre, l'ACAIQ devra muter de son rôle actuel d'association professionnelle à celui d'un organisme d'autoréglementation du courtage immobilier.

Aussi, ses futures responsabilités sont calquées sur celles des ordres professionnels, d'où l'importance du «projet de règlements» attendu du gouvernement Charest.

Mandat rehaussé

D'une part, l'ACAIQ continuera de gérer l'homologation et les permis requis des courtiers et des agences en immobilier.

Mais ce mandat sera rehaussé par les normes de responsabilités plus strictes qui seront imposées de façon individuelle aux courtiers et aux agences.

D'autre part, le rôle élargi de l'ACAIQ comprendra la gestion de mécanismes de recours et d'indemnisation pour les consommateurs victimes de fautes professionnelles, de la part d'un courtier immobilier ou de l'agence à laquelle il est associé.

Au cabinet du ministre des Finances, on confirme que le «projet de règlement» concernant la nouvelle loi sur le courtage immobilier attend encore le feu vert du Conseil des ministres.

Cette autorisation est requise pour la publication des règlements dans la Gazette officielle du Québec, ce qui déclenchera une période de 45 jours de consultations finales.

«La nouvelle loi du courtage immobilier est un sujet qui nous importe beaucoup, mais c'est assez complexe», a indiqué Catherine Poulin, porte-parole du ministre Raymond Bachand.