Photo fournie par Mercer

Martine Ferland a été nommée en septembre présidente du groupe Mercer au siège social new-yorkais de la multinationale du conseil en avantages sociaux et régimes de retraite.

(New York) Le savoir-faire québécois traverse les frontières depuis des années grâce à l’ingéniosité et au dynamisme d’une multitude de nos entreprises innovantes.

Mais aujourd’hui, c’est aussi le talent de nos gestionnaires qui est reconnu et recherché par des entreprises mondiales, comme vient de le démontrer Martine Ferland, qui a été nommée en septembre présidente du groupe Mercer au siège social new-yorkais de la multinationale du conseil en avantages sociaux et régimes de retraite.

Comment fait-on pour se retrouver à la tête d’une entreprise qui compte 23 000 employés dans 40 pays et qui réalise un chiffre d’affaires de 4,7 milliards US ?

Je ne sais pas exactement. J’ai d’abord eu la chance de travailler dans un domaine que j’adore. Au fil des ans, à travers des challenges différents, je suis devenue plus efficace, plus innovante.

J’ai toujours aimé travailler en équipe. Autant dans l’organisation de la vie familiale qu’au travail, il faut s’épauler et collaborer. J’ai aussi développé une habileté à regrouper les gens autour d’objectifs à atteindre. Et il faut surtout savoir se réinventer. On vit dans un monde qui se transforme constamment, il faut être en mesure de vivre avec le changement.

Vous arrivez à la tête du groupe Mercer au terme d’une carrière qui s’est déroulée au cours des dernières années essentiellement sur la scène internationale. Expliquez-nous le cheminement qui vous a conduite à vous expatrier au cours des 13 dernières années.

J’ai entrepris ma carrière chez Towers Perrin à Montréal à titre d’analyste en actuariat. J’accompagnais les employeurs à avoir les programmes les mieux adaptés à leurs besoins pour ce qui touche les systèmes de rémunération, les stratégies d’embauche et de rétention de personnel et les programmes de retraite.

J’étais curieuse et je voulais toujours en connaître plus sur les entreprises, peu importe leur secteur d’activité. En 2002, on m’a demandé de prendre la direction générale du bureau de Montréal.

Puis, en 2005, on m’a dit qu’on avait un rôle pour moi à New York, soit de travailler avec nos clientes multinationales américaines et de m’occuper de toutes leurs activités en ressources humaines pour leurs activités à l’extérieur de l’Amérique. Je devais constamment voyager en Europe et en Asie.

J’ai hésité, parce que j’avais encore trois adolescents à la maison, mais on a décidé de tenter l’expérience et de faire le saut. Ç’a été vraiment l’ouverture à l’international pour moi. Depuis 2005, je suis en voyage trois semaines sur quatre.

En 2010, lorsque Towers Perrin a fusionné avec Watson Wyatt, on m’a demandé de m’occuper de l’intégration des deux firmes au Canada. Ce que j’ai fait à partir de New York.

Puis, en 2011, j’ai reçu une proposition de Mercer, qui voulait que je prenne la présidence des activités de retraite du groupe pour l’Europe et le Pacifique, et l’appel de l’international l’a remporté sur le retour au Canada. Je n’étais pas prête encore à revenir chez nous…

Oui, parce que ce nouveau défi a impliqué que vous déménagiez de New York à Londres. Est-ce que les facteurs familiaux auraient pu influer sur votre décision ?

Non, parce qu’à l’époque, deux de mes enfants avaient terminé leurs études et avaient commencé à travailler. Notre plus jeune a décidé de poursuivre ses études universitaires à Vancouver. Donc, mon mari et moi avons apprivoisé la réalité du nid vide à Londres.

En 2015, Mercer m’a nommée présidente de la région Europe-Pacifique. À l’époque, Mercer avait trois directions géographiques – Amérique du Nord, Europe-Pacifique et Pays émergents – et trois directions de produits – les programmes de santé, la gestion de carrière et les ressources humaines et enfin les programmes de retraite et de placement.

Je suis passée de présidente des activités de retraite et de placement à présidente de toutes les activités européennes et asiatiques de Mercer.

Et, cette année, ç’a été le grand appel qui a annoncé votre retour, depuis le mois de septembre, à titre de présidente du groupe Mercer à New York. Quelles sont vos responsabilités exactement ?

L’annonce de ma nomination a coïncidé avec une réorganisation de nos activités mondiales. On a ramené de trois à deux nos grandes divisions, qui sont États-Unis–Canada et Activités internationales, qui regroupe maintenant nos activités Europe-Pacifique et Pays émergents.

Les deux entités génèrent des revenus à peu près équivalents.

Je suis responsable de toutes les activités mondiales de Mercer et je réponds de notre PDG qui, lui, s’occupe essentiellement de stratégie.

Comment vivez-vous la disparition progressive des programmes de retraite à prestations déterminées ? La réduction de cette activité qui était centrale pour une firme comme la vôtre doit avoir un impact sur vos revenus ?

Oui, c’est certainement un enjeu. Il y a de moins en moins de nouveaux adhérents aux régimes à prestations déterminées, mais les régimes existants continuent à être administrés.

Notre rôle aujourd’hui est de conseiller les employeurs à offrir les meilleures plateformes d’investissement pour l’accumulation de l’épargne de leurs employés.

On ne fait pas que du conseil pour la retraite, on le fait aussi pour la gestion des ressources humaines et les programmes de santé. Mercer est la plus grande firme au monde pour l’implantation de plateformes de gestion de ressources humaines en infonuagique.

Que ce soit pour les services de paie, la gestion des congés et des vacances, les déménagements… tout se fait aujourd’hui avec une seule application à partir de notre réseau mondial.

On a réalisé plusieurs acquisitions et de nouveaux partenariats pour faire développer nos services en ligne. On réussit à mieux engager les employés en leur offrant des plateformes qui leur sont accessibles et on va continuer de le faire.

Non seulement c’est une Québécoise qui occupe le poste de présidente globale de Mercer, mais c’est aussi un Québécois qui est à la tête de la division États-Unis–Canada. Est-ce un hasard ?

Oui, c’est Louis Gagnon qui est maintenant le président de la grande division États-Unis–Canada. Ce n’est pas une question de hasard, c’est une question de talent.

J’ai nommé Louis un mois après ma nomination comme présidente de groupe, et son choix s’est fait à la suite d’une recherche à l’interne et à l’externe.

Oui, Louis est québécois, de Shawinigan. Mais il a passé près des deux tiers de sa vie professionnelle chez Mercer dans des postes à Chicago et à Detroit. Il était président de Mercer Canada, et c’est lui qui dirige maintenant tout le groupe nord-américain.

Pour terminer, quels conseils donnez-vous aux gens qui souhaiteraient faire une carrière internationale comme la vôtre ?

Il ne faut pas seulement soupeser les avantages et les inconvénients de s’expatrier, il faut en avoir le goût, parce que c’est un changement de vie. Mon mari et moi, on en discutait récemment et on s’est rendu compte que l’on était vraiment prêts à réaliser ce type de vie.

Je dois voyager trois semaines sur quatre pour aller rencontrer nos clients et mes collègues partout dans le monde. J’aime ça, il faut être en mesure de comprendre et s’adapter aux différences culturelles et aux mentalités. Moi, ça me nourrit, j’étais faite pour ça.