Boralex (T.BLX) s'est fait un nom dans la production d'énergie verte et veut maintenant se faire une place parmi les meilleurs producteurs indépendants du Canada.

Boralex voulait augmenter sa production d'électricité à 1000 mégawatts, un objectif qui est en bonne voie d'être atteint. Être un des cinq meilleurs producteurs privés du Canada est maintenant sa cible pour 2020.

C'est moins compromettant qu'un objectif en chiffres, reconnaît d'emblée Patrick Lemaire, PDG de l'entreprise, au cours d'une entrevue avec La Presse Affaires dans son bureau du centre-ville de Montréal.

«Ça dépend beaucoup de l'évolution du marché, précise l'ingénieur qui est à la tête de Boralex depuis 2006. Si ça stagne, personne ne va croître, mais il y aura de la consolidation. On va être là.»

Le marché des énergies renouvelables s'est rétréci au cours des dernières années. C'est la nouvelle réalité pour Boralex et ses pairs, les Brookfield Energy, Algonquin ou Innergex. Il y a les surplus d'électricité, qui ont mis un frein au développement de la nouvelle production, et le prix très bas du gaz naturel en Amérique du Nord, qui permet de produire de l'électricité beaucoup moins chère.

La crise économique et les politiques d'austérité des gouvernements ont aussi fait mal, souligne Patrick Lemaire. «Aux États-Unis, avant 2008, on avait plus de programmes, et des programmes plus généreux. On était dans une période de prospérité. Mais en période de crise, on a mis ça de côté.»

De cinq ans en cinq ans, Boralex révise son plan de match. Aujourd'hui, l'entreprise constate que la fenêtre se referme dans ses principaux marchés, notamment au Québec. «Les opportunités vont se faire plus rares, et la compétition va être plus féroce», prévoit son président.

L'objectif précédent de produire 1000 mégawatts sera atteint en 2015, comme prévu. «On est rendus à 675 mégawatts aujourd'hui et à 870 mégawatts avec notre pipeline actuel de projets. D'ici la fin de 2105, on aimerait en ajouter 150 supplémentaires pour arriver à notre 1000. Avec l'appel d'offres du Québec [450 mégawatts, sur le point d'être lancé], on pense que ce n'est pas du tout irréaliste.»

Après? C'est là que ça se complique, admet Patrick Lemaire. «On ferait bien des projets hydroélectriques, mais des opportunités, il n'y en a pas. Alors, on se concentre sur l'éolien.»

Et si l'appel d'offres pour 450 mégawatts supplémentaires au Québec devait être le dernier? Boralex ira voir ailleurs. «On ne se cachera pas que, pour quelques années, notre grand axe de croissance sera la France, parce que là-bas, ils en veulent encore, avec des objectifs bien déterminés, et ils sont encore loin de leurs objectifs.»

L'Ontario, qui veut 1000 méga-watts d'énergie éolienne, offre aussi des perspectives intéressantes pour Boralex, tout comme la Colombie-Britannique. Quant aux États-Unis, ils reprennent de l'attrait pour l'entreprise. «On a toujours fait une vigie à très haute altitude aux États-Unis, parce qu'on était assez occupés. Étant donné le ralentissement ici, notre vigie va probablement descendre plus bas.»

Boralex veut cibler les régions des États-Unis où les distributeurs signent des contrats d'approvisionnement à long terme. Sur le territoire américain, ce sont les crédits de taxe à la production d'énergie renouvelable qui sont le plus répandus. Mais ça ne cadre pas avec le modèle d'affaires de l'entreprise québécoise, dont 97% de la production est sous contrat à long terme. «On aimerait rester dans ce qu'on connaît», résume M. Lemaire.

Porte ouverte au gaz naturel

Boralex est d'abord et avant tout un producteur d'énergie verte. Mais si les gens veulent l'électricité la moins chère, l'entreprise est prête à en produire.

«Si c'est le seul axe de croissance, Boralex en fera de l'électricité avec du gaz naturel. On n'a jamais dit non. Peut-être qu'un jour, s'il y a des opportunités au Québec pour du gaz, on va y participer, s'il n'y a pas d'opportunités dans le renouvelable. Il ne faut pas oublier que la première centrale de Boralex était une centrale au gaz naturel.»

Patrick Lemaire souligne que le contexte énergétique peut changer rapidement. Les surplus d'électricité actuels, selon lui, pourraient fondre plus vite que prévu, notamment avec les rabais promis par le gouvernement aux entreprises qui investiront au Québec.

«S'il y a des investisseurs qui viennent consommer les surplus, l'avenir va s'éclaircir pour nous, les producteurs privés, et aussi pour Hydro-Québec.»

La société d'État dit que l'énergie éolienne fait grimper la facture, mais elle ne dit pas que ses propres projets font aussi augmenter le coût de l'électricité, déplore-t-il. «Le projet de la Romaine, en période de surplus, n'a pas plus de justification que l'appel d'offres qui est annoncé pour 450 mégawatts d'éolien.»

La reprise de l'économie va finir par faire diminuer les surplus, espère Patrick Lemaire. «En l'espace d'un an, les surplus qu'on a jusqu'en 2027, ils seront peut-être jusqu'en 2022. Un projet éolien, ça prend cinq ans à préparer. C'est une roue qui ne doit pas arrêter de tourner.»

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BORALEX

> Producteur indépendant d'électricité

> Capacité: 674 mégawatts, dont l'éolien: 69%; l'hydroélectrique: 23%, le thermique: 7%, et le solaire: 1%

> Employés: 247

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FORCES ET FAIBLESSES

Forces

> Expérience reconnue

> Diversification géographique

> Marché potentiel intéressant

Faiblesses

> Surplus d'électricité

> Marché actuel au ralenti

> Concurrence accrue