La prise de contrôle de la Corporation minière Osisko par Goldcorp entraînerait la disparition de la 17e société québécoise en importance inscrite à la Bourse de Toronto. «On est plus gros que Québecor. Goldcorp a fait une offre opportuniste qui ne reflète pas la valeur de notre entreprise et qui serait dommageable pour le Québec», insiste Sean Roosen, PDG de la seule société minière d'envergure au Québec.

Depuis la mi-janvier, la haute direction de la Corporation minière Osisko est largement mobilisée par l'offre publique d'achat (OPA) hostile que Goldcorp a formulée aux actionnaires de l'entreprise. Il s'agit de la quatrième offre que soumet l'entreprise de Vancouver pour acquérir Osisko.

Goldcorp offre de payer 2,6 milliards de dollars pour mettre la main sur les actifs de la minière québécoise, une offre à moitié au comptant et l'autre en échange de ses actions.

«On avait eu des pourparlers en 2008 lorsqu'on était à la recherche de financement pour lancer notre projet d'exploitation de Canadian Malartic. Ils ont eu accès à nos livres et nous ont fait une offre qu'on a refusée.

«En pleine crise financière, en 2009, on a levé 410 millions de capitaux à la Bourse et on a monté un financement de 1 milliard pour lancer les travaux à Malartic. Et quand tout ça a été fait, Goldcorp a pris une participation de 15% à notre capital», rappelle Sean Roosen.

On connaît la suite. Goldcorp a vendu sa participation dans Osisko et a réalisé un profit net de 320 millions US pour finalement revenir à la charge en 2012 avec une autre proposition d'achat qui a été refusée par le conseil d'administration d'Osisko.

Une entente de confidentialité avait été scellée et empêchait Goldcorp de solliciter directement les actionnaires d'Osisko. Cette entente a bloqué la transaction en cours puisqu'un juge doit trancher sur sa validité et entendre les parties le 3 mars prochain. Goldcorp a prolongé jusqu'au 10 mars son offre publique d'achat (OPA) hostile.

Opportunisme

Sean Roosen ne partage pas de bons sentiments à l'endroit de la direction de Goldcorp qui a fait, selon lui, une offre absolument opportuniste le 13 janvier dernier.

«Toutes les sociétés du secteur aurifère sont occupées en janvier à préparer leurs résultats financiers et le grand sommet sur l'or qu'organise BMO à la fin de février. Ils ont profité de cette fenêtre pour déposer leur offre», expose Sean Roosen.

Ceci dit, Goldcrop pourrait très bien décider de retirer son offre d'achat, comme le groupe de quincaillers américain Lowe's l'a fait il y a un an et demi avec Rona.

Le PDG de Goldcorp a d'ailleurs admis, jeudi, que si le juge donnait raison à Osisko au sujet de son obligation de garder confidentielle toute proposition d'acquisition, il pourrait décider de passer à autre chose.

«On a obtenu à la dernière assemblée annuelle, en 2013, l'autorisation de nos actionnaires à 98% d'utiliser une pilule empoisonnée en cas d'OPA hostile. On peut le faire», prévient le PDG d'Osisko.

Le groupe minier compte plusieurs actionnaires et partenaires financiers québécois importants, dont la Caisse de dépôt et placement, Investissement Québec et le Fonds de solidarité FTQ, et Sean Roosen estime qu'il a l'appui d'au moins 45% des gros investisseurs institutionnels.

«Ils souhaitent qu'Osisko développe son plein potentiel pour devenir une société minière multinationale qui contrôle son destin et conserve son pouvoir de décision au Québec.

«On a aussi l'appui de 25% de nos actionnaires de détail qui sont avec nous depuis le début et qui souhaitent participer à la formation d'un groupe minier fort, pas une division d'une multinationale contrôlée de l'extérieur», soumet le PDG.

Il constate aussi qu'Osisko a généré des liquidités de 71 millions à son troisième trimestre, alors qu'un groupe comme Agnico Eagle, qui a une capitalisation boursière de 6 milliards et 30 ans d'existence, a produit des liquidités de 80 millions durant le même trimestre. «Ça donne une idée de ce que devrait être notre vraie valeur», constate-t-il.

Des actifs et une expertise uniques

Sean Roosen insiste beaucoup sur le fort potentiel d'appréciation que la Corporation minière Osisko peut réaliser à partir de ses actifs et de son expertise, qu'il juge uniques.

«On a des propriétés à fort potentiel au Mexique et plus près de Malartic, en Ontario. Goldcorp a profité de la faiblesse de l'or pour lancer son offre, mais il y a un gouffre entre ce qu'ils proposent et la valeur qu'on peut réaliser avec la reprise attendue du cours de l'or», estime-t-il.

«On est l'un des seuls groupes aurifères au monde à avoir sa propre équipe de construction de mines. On a hérité de l'expertise de Cambior lorsque le groupe a été acheté par Iamgold. On fait tout à l'interne, et cette équipe unique va nous aider à bien valoriser nos autres propriétés», ajoute Sean Roosen.

La présence du siège social d'Osisko à Montréal assure l'injection annuelle de 30 millions dans l'économie québécoise en salaires et en achat de biens et services québécois.

Depuis 2009, Osisko a réalisé des achats de biens et services de 2,3 milliards pour, notamment, mener à bien son projet de Malartic, et plus de 2 milliards de ces dépenses ont été effectuées au Québec.

«Je veux que le drapeau d'Osisko flotte encore longtemps devant la Canadian Malartic», déclare, solennellement, le PDG de la minière québécoise.