Nicolas Marceau n'échangerait pas son poste de ministre des Finances contre celui de son homologue ontarien. L'économiste estime que la situation budgétaire du Québec est plus enviable que celle de nos voisins immédiats qui traînent un déficit budgétaire de 12 milliards. «Nous, notre problème c'est la dette et c'est pourquoi on ne peut plus faire de déficits», explique-t-il.    

«On a dû prendre des mesures difficiles mais on va atteindre notre objectif de ramener à zéro le déficit budgétaire québécois. La situation en Ontario, avec leur déficit de 12 milliards, est beaucoup plus problématique.

«Ils vont être obligés de prendre des mesures fiscales, de hausser les impôts pour résorber leur déficit. À cet égard, j'estime notre situation beaucoup plus enviable», souligne Nicolas Marceau.

«Nous, notre problème, c'est notre dette. Ça va nous prendre quinze ans avant de pouvoir abaisser correctement son poids par rapport à notre produit intérieur brut (PIB). Mais là encore, on va y arriver», poursuit-il.

Malgré un contexte de croissance économique anémique (0,9% en 2012 et 1,5% en 2013), Nicolas Marceau veut retrouver l'équilibre budgétaire pour que le Québec profite au maximum de la reprise lorsqu'elle s'articulera de façon plus probante.

«On voit que la situation s'améliore aux États-Unis et que l'Europe devrait sortir de la crise cette année. Il faut qu'on soit en bonne position lorsque l'activité reprendra», convient-il.

Le désengagement fédéral

Nicolas Marceau ne déposera pas de nouveau budget au printemps, mais prévoit réaliser une mise à jour économique qui fera le point sur la situation des finances québécoises. Le dépôt imminent du prochain budget fédéral ne l'inquiète pas outre mesure.

«Il n'y a pas de gros dossiers litigieux. On souhaite qu'Ottawa reconduise l'Entente Canada-Québec sur le marché du travail et son enveloppe de 116 millions qui sert à l'insertion de gens qui sont éloignés du marché du travail, tels que les nouveaux arrivants ou les bénéficiaires de l'aide sociale.

«On souhaite également avoir un signal quant au Fonds chantiers Canada qui prend fin en avril 2014. On souhaite là aussi qu'il soit renouvelé mais qu'Ottawa nous en laisse la gestion pour nous permettre d'accélérer la réalisation des projets», souligne Nicolas Marceau.

Mais ce qui inquiète davantage le ministre Marceau, c'est le désengagement progressif et systématique qu'il observe de la part gouvernement fédéral à l'égard du financement de plusieurs programmes.

«Depuis 2007, le fédéral a plafonné les paiements de péréquation. Cette seule mesure a fait perdre 7,6 milliards au Québec en quatre ans.

«Là, le fédéral se désengage du programme d'assurance-emploi en limitant son accès. C'est nous qui allons être obligé de financer l'aide sociale à ceux qui ne pourront plus avoir de chômage.

«À partir de 2017, le taux des hausses annuelles des paiements de transferts sociaux pour la Santé sera plafonné au taux de croissance du PIB alors que ces paiements de transferts sont présentement haussés de 6% à chaque année. Des hausses de seulement 2% ou 3% des paiements de transferts, ça va compromettre sérieusement l'équilibre budgétaire de bien des provinces», appréhende le ministre québécois.

En 1994-95, le fédéral s'était désengagé de plusieurs programmes de dépenses parce qu'il faisait face à déficit structurel, ce qui n'est pas le cas du gouvernement conservateur qui enregistre un déficit conjoncturel. «Ils n'ont plus aucune pression financière, se sont les provinces qui absorbent», renchérit Nicolas Marceau.

Le mois prochain, le ministre des Finances tiendra un forum de discussions sur le régime de redevances minières qui sera suivi rapidement du dépôt d'une nouvelle grille de paiements de droits miniers. Elle devra faire en sorte que toutes les compagnies qui font de l'extraction de ressources naturelles au Québec paient des droits.

«On va aussi taxer les sur-profits. On veut développer nos ressources mais il faut que ça profite aux prochaines générations. C'est une question d'équité», explique Nicolas Marceau.

Formation complétée

En selle depuis cinq mois maintenant à la direction des Finances, avec déjà un budget à son cv, Nicolas Marceau considère, aujourd'hui, avoir complété l'apprentissage de son nouveau job.

«Disons que les premiers mois ont été passablement occupés. J'ai vraiment vécu l'immersion totale. Si les choses n'ont pas toujours été faciles au début, j'ai traversé cette période avec une belle sérénité», observe-t-il.

Le seul désagrément qu'il dit vivre, c'est celui des horaires surchargés qui sont devenus son train de vie quotidien ainsi que d'avoir à supporter l'éloignement de sa famille.

Depuis le mois de janvier, Nicolas Marceau multiplie les rencontres avec différents acteurs du monde économique et financier, c'est dans la nature de la fonction que d'avoir à expliquer la réalité financière et les objectifs budgétaires du gouvernement.

«Ce que je leur dis, essentiellement, c'est que le scénario économique dont on s'est servi pour notre budget de novembre tient la route et que l'on va atteindre nos cibles de ramener le déficit à 1,5 milliard cette année et à zéro l'an prochain», rappelle encore une fois le ministre.