Depuis 30 ans maintenant, la société Novacap a procédé à une soixantaine d'investissements directs dans des entreprises québécoises et financé pas moins de 120 acquisitions qu'ont réalisées ces sociétés par la suite.

Jacques Foisy et Pascal Tremblay, respectivement président de Novacap Industrie et président de NovacapTechnologies, nous expliquent de quelle façon ils s'y prennent pour transformer des PME québécoises en acteurs de classe mondiale dans leur secteur d'activité.

Novacap est un fonds d'équité privée qui a été créé en 1981 par le financier Marc Beauchamp, aujourd'hui président du conseil de la firme de capital de croissance.

À l'origine, Novacap était appuyée par quatre institutions financières: la Société générale de financement, la Banque Nationale, la Caisse de dépôt et la Laurentienne Assurances qui ont souscrit un capital de départ de 8 millions de dollars. Avec les années, la majorité des grandes caisses de retraite québécoises se sont jointes au financement de la société d'investissement.

Aujourd'hui, la firme gère des fonds de plus de 930 millions investis dans 22 entreprises dans lesquelles elle détient une participation de contrôle ou prépondérante. Grâce à ses partenaires financiers, Novacap a accès à plus de 3 milliards de nouveaux capitaux.

"Notre rôle est simple, dit Jacques Foisy, président de Novacap Industrie. On prend des belles entreprises et on en fait des acteurs de classe mondiale. Beaucoup d'entrepreneurs amènent leur entreprise à un niveau intéressant, mais il arrive un moment où ils veulent sécuriser leur retraite.

"On leur offre du capital de croissance qui leur permet de réaliser l'expansion à laquelle ils rêvaient sans les mettre à risque. Quand on se joint à eux, ils deviennent beaucoup plus agressifs."

Novacap Industrie a ainsi récemment réalisé la privatisation de la firme IPL, important fabricant de produits de plastique moulé de Saint-Damien, qui était coté en Bourse et qui a fait l'objet d'un rachat par son équipe de direction.

"On choisit des entreprises dans des secteurs qui sont mûrs pour une consolidation. On a privatisé IPL en octobre 2010 et on a acheté une entreprise concurrente au Missouri en février 2011. IPL réalisait des ventes de 170 millions et là, on vient d'ajouter 80 millions en revenus annuels. Il va y avoir d'autres acquisitions", prévient Jacques Foisy, qui s'est joint à la firme d'investissement en 1994.

Un autre bel exemple de la fonction consolidatrice de Novapac est sa participation dans l'entreprise Les Emballages Knowlton, une ancienne usine du groupe Clairol qui a été rachetée par son équipe de direction dans les années 90 et dans laquelle Novacap a investi en 2002.

"Certains des actionnaires voulaient prendre leur retraite. On est entré en 2002 lorsque l'usine réalisait des ventes de 60 millions. On a acheté une usine en Ontario qui était sur le point de fermer, une autre en Virginie et une dernière en Ohio.

"Le chiffre d'affaires de Les Emballages Knowlton est aujourd'hui de 400 millions. Le nombre de travailleurs de l'usine estrienne est passé de 300 à 600 et l'entreprise est aujourd'hui un leader mondial dans la fabrication de savons antibactériens et de désodorisants personnels", résume Jacques Foisy.

Technologies

Pascal Tremblay, 40 ans, s'est joint à Novacap en 2003 alors qu'il était propriétaire de Laserpro, entreprise de Sherbrooke qu'il a vendue à ses employés. Il est président de NovacapTechnologies depuis novembre 2011 où il poursuit la même démarche que son collègue.

"Quand on embarque dans une entreprise de technologies, on réalise une thèse d'investissement en étudiant particulièrement les éléments dominants de l'industrie", explique Pascal Tremblay.

C'est notamment ce qui a amené Novacap à investir de façon importante dans Stingray Digital, entreprise active dans le divertissement musical numérique.

"On a décidé de consolider mondialement ce secteur d'activité en achetant d'abord Galaxie, diffuseur de musique numérique canadien, et en réalisant par la suite pas moins de cinq acquisitions ailleurs dans le monde. On a investi jusqu'à maintenant 110 millions et on poursuit notre programme", souligne Pascal Tremblay.

La société d'investissement est aussi actionnaire à 55% de la firme Creaform, de Québec, une société qui a développé un scanner industriel unique au monde et dont les ventes mondiales sont passées de 20 à 40 millions en deux ans, soit depuis que Novacap est dans le portrait.

La firme d'hébergement de sites internet Iweb, qui fait du soutien technique pour plus de 20 000 clients de 150 pays, fait aussi partie du portefeuille de 11 entreprises de NovacapTechnologies.

Son PDG, Éric Chouinard, était du nombre des participants à une mission commerciale québécoise au Brésil la semaine dernière. Iweb pourrait ouvrir un site d'hébergement au Brésil pour se rapprocher de sa clientèle sud-américaine.

"Novacap est une société de capital de croissance, ce qui est différent du capital de risque", nuance Pascal Tremblay.

"C'est du capital patient. Nos investissements moyens ont une durée de vie d'au moins huit ans. Parfois, on peut rester plus longtemps dans une entreprise. On n'est pas pressé", insiste-t-il.

Novacap se retire d'une entreprise lorsque son investissement est arrivé à maturité. Soit que la société réalise un premier appel public à l'épargne ou qu'elle soit l'objet d'une fusion ou d'une acquisition ou que, phénomène maintes fois observé, elle soit l'objet d'un rachat par son équipe de direction.

"Nos entreprises génèrent souvent tellement de liquidités que la direction peut réaliser un rachat sans trop les endetter", observe Jacques Foisy.

À l'heure actuelle, les 22 sociétés dans lesquelles Novacap est actionnaire réalisent des revenus annuels de 1,7 milliard et elles emploient 9000 personnes, principalement au Québec.

La petite équipe de 25 personnes qui travaillent chez Novacap n'a pas beaucoup connu d'échecs en 30 ans d'histoire. Seulement deux investissements sur la soixantaine qui ont été réalisés se sont soldés par une radiation d'actifs.

"La norme dans l'industrie du capital de risque, c'est que, sur dix investissements, un seul s'avère être un champion et trois se transforment en échec. Chez nous, un investissement sur quatre obtient un rendement exceptionnel et les autres affichent un rendement très acceptable", souligne fièrement Jacques Foisy.