En dépit d'un besoin criant de main-d'oeuvre en aérospatiale, les écoles québécoises spécialisées sont à moitié vides.

Elles doivent se battre contre une perception négative, l'impression que l'industrie se débat toujours avec le chômage et les mises à pied.

Ce n'est pas le cas, a soutenu le directeur général du Comité sectoriel de main-d'oeuvre en aérospatiale (CAMAQ), Serge Tremblay, au cours d'une conférence de presse organisée à l'École des métiers de l'aérospatiale de Montréal pour faire mousser le recrutement.

En novembre dernier, le taux de chômage du secteur de l'aérospatiale tournait autour de 1% seulement.

La fermeture subite d'Aveos, en mars 2012, a fait les manchettes avec la perte de 1875 emplois au Québec. Or, l'industrie a été en mesure d'absorber la plus grande partie de ces travailleurs.

«Un comité a été mis sur pied pour aider les anciens employés à se relocaliser, a noté M. Tremblay. Selon ce comité, il ne reste que 150 personnes qui se cherchent encore un emploi.»

En outre, deux entreprises ont repris des actifs d'Aveos et veulent poursuivre des activités de maintenance au Québec, soit AJ Walter Aviation et Kelly Aviation. Ils ont besoin de 382 techniciens, et devront donc aller au-delà des employés mis à pied encore disponibles pour combler leurs besoins.

Selon un recensement effectué par le CAMAQ, le secteur manufacturier de l'industrie aérospatiale créera 2011 nouveaux emplois en 2013, soit des postes d'ouvriers spécialisés, de techniciens, d'ingénieurs et d'administrateurs. Pour remplacer les départs à la retraite, il faudra pourvoir 2216 postes additionnels. Il faudra donc dénicher plus de 4200 travailleurs au cours de l'année.

De son côté, le secteur du transport aérien et de l'entretien d'aéronefs devrait créer 312 emplois en 2013 (ce qui ne comprend même pas les besoins d'AJ Walter et de Kelly Aviation, qui n'étaient pas encore connus lors du recensement du CAMAQ). Avec les remplacements pour les départs à la retraite, on parle de 727 postes à pourvoir.

Les besoins sont particulièrement aigus pour les travailleurs en usinage, en assemblage, en câblage et en finition.

«On nous demande d'accélérer la cadence», a déclaré la directrice de l'EMAM, Josée Péloquin.

Dans le passé, cette école de niveau secondaire a déjà fonctionné 24 heures sur 24, avec 1500 élèves. Elle n'en compte présentement que 450.

«On voit qu'il y a une reprise dans l'industrie, a affirmé Mme Péloquin. Nous avons un bureau de placement, et je peux vous dire que le téléphone sonne beaucoup.»

À l'École nationale d'aérotechnique (ENA), un campus du cégep Édouard-Montpetit, on compte 900 élèves, alors que la capacité est de 1300 élèves.

«En avionique, nous pourrions avoir trois fois plus d'élèves pour répondre à la demande», a affirmé le directeur de l'ENA, Serge Brasset.

Les deux écoles ont décidé de joindre leurs forces pour accélérer le recrutement. Ils ont lancé un site internet commun et, avec l'aide d'entreprises aéronautiques québécoises, entreprendront une campagne publicitaire dans les quotidiens, sur l'internet et à la radio.

Ces entreprises ont tout intérêt à ce que les écoles fassent le plein d'élèves.

«Nous les attendons à la sortie», a lancé Stéphane Pelletier, directeur principal des ressources humaines chez Bombardier Aéronautique, une entreprise qui connaîtra une forte croissance avec la production de la CSeries.

Bell Helicopter Textron Canada ne prévoit pas augmenter le nombre de travailleurs à l'usine de Mirabel, mais elle doit quand même faire du recrutement pour faire face aux départs à la retraite. L'usine compte présentement environ 2000 employés.

«C'est difficile, le bassin de main-d'oeuvre est serré», a déclaré Dominique Gérin-Lajoie, directrice des ressources humaines chez Bell Helicopter Textron Canada.

Le recrutement est particulièrement difficile pour les plus petites entreprises, comme FDC Composites, qui a doublé son chiffre d'affaires l'année dernière et prévoit le doubler encore cette année.

«C'est un défi intéressant», a indiqué le président-directeur général de FDC, Jacques Cabana.

L'entreprise, qui fabrique des pièces en matériaux composites, emploie présentement 45 personnes à son usine de Saint-Jean-sur-Richelieu.

Sony Boudreau, coprésident de MSB Design, une entreprise de Boucherville qui fabrique des composants d'intérieurs d'avions d'affaires, doit regarder du côté de l'Europe pour combler ses besoins.

«Si seulement je pouvais cloner les employés que j'ai déjà», a-t-il soupiré.

Bombardier Aéronautique a franchi une nouvelle étape importante dans la mise au point de la CSeries. Pour la première fois, les employés de Bombardier ont mis sous tension les principaux systèmes électriques de l'avion d'essai 001 de la nouvelle famille d'appareils de 110 à 135 places.

Autrement dit, ils ont pesé sur l'interrupteur et les systèmes ont pris vie. L'appareil a également mis le nez dehors pour la première fois à l'usine de Bombardier à Mirabel.

La prochaine étape consistera à mettre sous tension les systèmes secondaires de l'appareil et l'équipement avionique de sa cabine de pilotage. Bombardier a également terminé les essais de flexion de l'aile, d'abord vers le haut, puis vers le bas, à son usine de Saint-Laurent.

Ces essais sont essentiels pour préparer le premier vol de l'appareil, toujours prévu pour la fin du mois de juin.