La direction de Papiers White Birch a annoncé jeudi soir la fermeture permanente et immédiate de son usine de Stadacona, dans la ville de Québec, au lendemain du rejet par les employés des dernières offres patronales.

Lors d'assemblées tenues mercredi, les quelque 550 syndiqués de l'usine avaient rejeté dans une proportion de 91% une offre qualifiée de finale par l'entreprise. Les travailleurs estimaient que les concessions demandées par l'employeur étaient trop importantes.

En vertu de ces offres, les employés auraient dû encaisser des réductions salariales allant jusqu'à 21%, selon le Syndicat canadien des communications, de l'énergie et du papier (SCEP). De plus, les travailleurs âgés de plus de 55 ans auraient perdu 45% de la valeur de leur rente de retraite, alors que les employés de moins de 55 ans l'auraient vu fondre de 65 pour cent, toujours selon le syndicat.

La direction avait affirmé que sa proposition faite aux syndiqués de l'usine de Québec était la dernière occasion d'éviter une fermeture permanente de l'usine. Elle ajoutait que sans baisse de salaire, des prestations de retraite et d'autres coûts, l'usine ne survivrait pas.

Le vice-président du SCEP-Québec, Renaud Gagné, estime que l'entreprise tente de faire porter la responsabilité de la fermeture de l'usine au syndicat en annonçant la fermeture au lendemain du rejet des offres. M. Gagné va jusqu'à dire que la fermeture était sans doute prévue, puisque les offres patronales étaient «tellement mauvaises».

«Ça avait peut-être d'autres intérêts, pour obtenir des concessions dans les deux autres usines, a-t-il fait valoir. Moi je crois sincèrement que cette offre a été faite dans le but de nous faire porter l'odieux de la fermeture à Québec et continuer leur stratégie d'écraser les travailleurs pour leur vider leur fonds de pension.»

De plus, le syndicat devait se rencontrer vendredi pour mettre sur pied sa contre-proposition.

De son côté, le président de la FTQ, Michel Arsenault, n'a pas été tendre envers la direction de Papiers White Birch.

«Le syndicat préparait une contre-proposition. Ce sont des voyous de la haute finance, qui n'ont aucun respect pour des gens qui ont travaillé pendant 20, 30, 35 ans. J'ai une pensée particulière pour ceux qui sont déjà à la retraite. C'est triste de voir des gens qui ont mis toute leur vie de travail chez un employeur de voir leur retraite amputée», lance M. Arsenault.

M. Gagné confirme que les conseillers juridiques du syndicat se pencheront sur la fermeture de l'usine, et il n'exclut pas de demander l'intervention du premier ministre Jean Charest.

«Ça n'a pas d'allure que cette entreprise-là débarque au Québec, saigne nos retraités et partent avec les installations», estime M. Gagné. Il cite en exemple Terre-Neuve, où le gouvernement a exproprié les actifs et les droits d'AbitibiBowater en 2009 après que la forestière eut fermée une usine.

Papiers White Birch est sous la protection de la Loi sur les arrangements avec les créanciers des compagnies depuis février 2010. La papetière est fermée depuis le 9 décembre.

Selon M. Gagné, il est possible que les créanciers s'opposent à la fermeture de l'usine de Stadacona en raison des pertes financières que cela impliquera pour eux.

Dans son communiqué diffusé jeudi soir, le président de Papiers White Birch, Christopher Brant, affirme que l'entreprise a été «forcée» de procéder à une fermeture définitive.

«Cette décision n'a pas été prise à la légère et nous avons fait tous les efforts pour éviter ce résultat», dit-il.

«La situation financière de l'usine et la détérioration économique dans l'industrie du papier journal signifient que l'heure a sonné pour Stadacona. Le rejet par le syndicat de notre offre finale ne nous a donné d'autre choix que de fermer l'usine de manière permanente», ajoute M. Brant.

Le ministre du Développement économique, Sam Hamad, a réagi à l'annonce de la fermeture jeudi soir, par la voix de son attaché de presse Harold Fortin.

«On se retrouve avec une fermeture qui est faite de manière unilatérale à notre avis, une fermeture qui est prématurée et une fermeture où on a pas donné la chance à la partie syndicale de donner sa contre-proposition», a-t-il fait valoir.

M. Fortin a indiqué que le ministre entend rencontrer le syndicat à court terme et contacter Papiers White Birch afin de demander des explications. Le gouvernement n'a pas lancé la serviette, selon lui.

«Notre rôle, comme gouvernement, c'est de s'assurer d'avoir épuisé toutes les solutions que l'ont peut, d'avoir regardé toutes les alternatives qui sont possibles pour préserver les emplois.»

Selon Michel Arsenault, le temps est venu pour le gouvernement du Québec de s'attaquer sérieusement aux régimes de retraite afin d'assurer plus de sécurité aux travailleurs.

«Je pense que ça devrait sonner une cloche chez Raymond Bachand, le ministre des Finances. Il devrait s'asseoir avec les ministres des Finances des autres provinces du Canada afin d'améliorer notre Régie des rentes du Québec, afin de faire en sorte qu'il y ait moins de pression sur les régimes complémentaires de retraite», a-t-il fait valoir.