Même si son carnet de commandes n'est pas dégarni, la société GBO vient de remercier 40% des employés de son usine de Sainte-Marie de Beauce, faute d'argent pour acheter ses matériaux de production.

Son manque de liquidités est si criant que le vénérable fabricant des portes et des fenêtres de marque Bonneville pourrait être contraint de cesser ses activités, a appris La Presse Affaires.

«Je suis très inquiet pour notre avenir. Notre situation est très précaire: on vit au jour le jour», dit François Chevarie, vice-président et chef de l'exploitation de GBO.

Auparavant connu sous le nom de Groupe Bocenor, GBO éprouve des difficultés financières depuis plusieurs années.

En 2004, cette société manufacturière s'est re- structurée après avoir eu recours à la protection des tribunaux. À son dernier exercice financier terminé le 28 février, GBO a encore perdu 4,6 millions de dollars sur des ventes de 18,9 millions.

Toutefois, l'entreprise fondée en 1946 par Henri Bonneville espérait tourner la page avec le plan de redressement mis en point par l'homme d'affaires Dennis Wood et son fils Christopher, président du conseil et chef de la direction de GBO.

L'entreprise a vendu ses usines qui étaient peu ou pas rentables, comme sa fabrique de fenêtres en CPV de Saint-Joseph et son usine de portes d'acier de Lévis. L'argent récolté a servi à réduire son endettement. Au 31 mai, la dette totale de l'entreprise était légèrement inférieure à 1 million de dollars.

GBO s'est concentrée sur sa spécialité: des portes et des fenêtres en bois de haute qualité de marque Bonneville. (À ne pas confondre avec les Maisons Bonneville, une entreprise distincte.)

L'entreprise a déployé une équipe de ventes plus imposante. Ses efforts sur le marché américain ont commencé à porter leurs fruits. En avril, par exemple, l'entreprise a décroché un contrat de 1 million US pour un immeuble de 750 fenêtres de Brooklyn.

Le carnet de commandes de GBO s'élève actuellement à plus de 3,5 millions de dollars, précise François Chevarie.

Le problème, c'est que ces contrats tardent à se traduire par de nouvelles entrées de fonds. Entre-temps, les efforts de promotion supplémentaires grugent les liquidités.

GBO n'arrive pas à acheter assez de matériaux pour exécuter ses contrats, explique François Chevarie. Surtout que les fournisseurs de l'entreprise, qui ont été échaudés par le passé, ne sont pas nécessairement disposés à lâcher beaucoup de lest. «Nos fournisseurs sont épuisés. Ils ne sont plus capables de nous soutenir», dit ce dirigeant.

Faute de matières premières, GBO a dû réduire sa cadence de production. L'entreprise beauceronne a licencié 40 employés il y a deux semaines et 20 autres vendredi dernier, soit 40% des 150 salariés qui travaillent à l'usine de Sainte-Marie. Les délais de livraison atteignent 12 semaines, comparativement à un maximum de 3 semaines auparavant. La survie de l'entreprise, qui emploie 200 personnes au total, paraît maintenant compromise.

François Chevarie raconte que la direction de GBO a fait la tournée de toutes les banques et institutions financières à la recherche de crédit. En vain.

Le Fonds de solidarité de la FTQ, qui était actionnaire de GBO à hauteur 25,4%, a d'ailleurs cédé en juin la totalité de sa participation à Montblanc Capital Corp., firme d'investissement de Toronto.

GBO a cogné à la porte d'Investissement Québec. Mais cette société d'État qui peut consentir des prêts directs aux entreprises a exigé des engagements supplémentaires des actionnaires actuels. «Nous ne sommes jamais les seuls à assumer le risque», explique Chantal Corbeil, porte-parole d'Investissement Québec.

Dennis et Christopher Wood sont les premiers actionnaires de GBO, avec une participation de 55,4% qu'ils détiennent à parts égales par l'entremise d'une société à numéro. Il a été impossible de joindre Christopher Wood, grand patron de GBO, hier.

D'après nos informations, toutefois, la famille Wood ne souhaite pas investir davantage dans GBO, après y avoir engagé près de 10 millions de dollars. Cela fait déjà 10 ans que la famille porte cette entreprise à bout de bras, y consacrant temps et énergie.

Les actions de GBO, qui se négocient sur la Bourse de croissance du TSX, ne valent plus que 8 cents chacune. Il s'agit du cours plancher de la dernière année.