Au moment où Loblaws (T.L) présente son programme d'achat local «C'est de chez nous» avec une grande campagne promotionnelle télévisée, on apprend qu'une partie de ses lasagnes sont moins de chez nous qu'auparavant. L'entreprise québécoise Tomasso Cordon Bleu a perdu un important contrat de plats surgelés de marque maison au profit d'un fabricant américain.

Pour l'entreprise québécoise, bien connue pour ses ragoûts en conserves, c'est un contrat de plusieurs millions de dollars. Tomasso Cordon Bleu a trois usines: deux dans la région de Montréal et une aux États-Unis. Des dizaines d'employés auraient perdu leurs emplois en lien avec la perte du contrat de Loblaws qui représentait une part significative du chiffre d'affaires du fabricant québécois.

Combien? Impossible de le savoir précisément puisque les porte-paroles de Cordon Bleu préféraient ne pas discuter de la situation en public. Le groupe d'épiceries Provigo, dont font partie Loblaws et Maxi, utilise toujours les services de l'entreprise pour deux produits. Il y en avait plus d'une quinzaine avant la révision des fabricants de lasagnes surgelées. Tomasso Cordon Bleu travaillait avec Loblaws depuis de nombreuses années.

Pour Sylvie Cloutier, présidente du Conseil de la transformation agroalimentaire et des produits de consommation, il s'agit d'un exemple éloquent des risques du métier.

«Tous les distributeurs vont en appel d'offres pour les produits de marque privée, explique-t-elle. C'est certain qu'ils vont choisir le moins cher.»

Dans le contexte très particulier du Québec, où la distribution alimentaire est concentrée entre les mains de trois acteurs (Provigo, Métro et Sobeys), le fabricant est donc à la merci de son client qui peut le rayer de son carnet de commandes du jour au lendemain, explique-t-elle. «Pour certaines entreprises, ça représente une part importante du chiffre d'affaires», précise Sylvie Cloutier.

Lorsqu'il s'agit de marque maison pour une enseigne, le fabricant de l'aliment demeure anonyme. Il peut donc être remplacé sans que le consommateur s'en aperçoive. On se souvient qu'en 2008, l'eau minérale québécoise Saint-Justin avait perdu le contrat des marques maison pour IGA et Provigo qui avait préféré faire affaire avec une eau importée.

Josée Bédard, directrice des affaires corporatives de Provigo, explique que pour ces marques «contrôlées», les soumissionnaires doivent remplir plusieurs critères. «Il est possible qu'un fournisseur du Québec ait perdu un contrat alors qu'un autre fournisseur du Québec en gagnait un pour un nouveau produit», précise Mme Bédard.

«Rappelons que près de 100 fournisseurs du Québec fabriquent plus de 1200 produits de marques contrôlées le Choix du Président ou Sans Nom», ajoute la porte-parole.