Les négociations entre Bombardier et un des principaux clients potentiels de la CSeries, Qatar Airways, seraient au point mort.

L'avionneur a cependant cherché à minimiser l'importance de cet écueil. Le porte-parole de Bombardier Aéronautique, Marc Duchesne, a également soutenu hier que les négociations avec un autre client potentiel, Lufthansa, «avançaient bien».

En outre, le titre de Bombardier a le vent dans les voiles: il a gagné 25 cents pour clôturer à 2,59$ hier à la Bourse de Toronto, soit une progression de plus de 10%.

 

Conditions non remplies

Selon le site internet spécialisé Flight Global, le chef de la direction de Qatar Airways, Akbar Al Baker, a déclaré cette semaine que les discussions avec Bombardier étaient maintenant terminées.

«C'est dans le congélateur parce que, pour continuer à considérer cet avion, nous avons certaines conditions que Bombardier ne veut pas accepter, a affirmé M. Al Baker, tel que cité par Flight Global. S'ils ne veulent pas, je pense que nous devrons oublier tout ça.»

En raison du décalage horaire, Qatar Airways n'a pas répondu aux appels de La Presse Affaires hier.

Sans vouloir confirmer l'arrêt des pourparlers avec Qatar Airways, M. Duchesne a soutenu qu'il n'y avait rien d'inhabituel dans ce dossier et qu'il y avait toujours des hauts et des bas dans une négociation de cette ampleur.

«Il y a toujours un certain temps où les gens se retirent de la table de négociation, a-t-il expliqué. Ils vont discuter avec la direction de leur compagnie pour ensuite revenir et continuer avec les négociations. C'est un processus qui est long et laborieux, on le voit avec Lufthansa.»

En juillet dernier, Lufthansa a signé une lettre d'intérêt pour un maximum de 30 commandes fermes et 30 options supplémentaires pour la CSeries, une nouvelle famille d'appareils de 110 à 130 places. Bombardier avait prédit une commande ferme avant la fin de son exercice financier. L'exercice a pris fin le 31 janvier, aucune commande ne s'est matérialisée.

Outre Lufthansa, seuls Qatar Airways et la société de location d'avions ILFC (International Lease Finance Corporation) ont publiquement fait connaître leur intérêt. Les médias spécialisés ont également rapporté récemment que le transporteur mongol Eznis Airways avait signé une lettre d'intérêt pour sept appareils. Mexicana se serait également montré intéressé.

Selon Flight Global, Qatar Airways s'intéressait surtout à la plus grande version de la CSeries, l'appareil de 130 places, alors que Bombardier prévoit d'abord lancer la plus petite version à 110 places.

M. Al Baker a affirmé que le désaccord portait sur tous les aspects du dossier, incluant le prix et les spécifications de l'appareil.

«S'ils nous accommodent, peut-être allons-nous reconsidérer notre position», a-t-il déclaré, tel que cité par Flight Global.

L'analyste Richard Aboulafia, de la firme américaine The Teal Group, a dit craindre une deuxième cérémonie funéraire pour la CSeries. La première avait eu lieu en janvier 2006. Bombardier avait décidé de mettre le projet sur la glace en raison d'une absence de clients.

M. Aboulafia a soutenu que ces funérailles étaient une bonne chose parce que la première version de la CSeries était carrément médiocre. Il considère que la nouvelle version est beaucoup plus intéressante, notamment en raison de la nouvelle turbo-soufflante à réducteur de Pratt&Whitney et de l'utilisation de matériaux composites. Selon lui, une nouvelle cérémonie funéraire serait très mauvaise pour l'industrie.

«Il ne faudra pas que le ralentissement économique actuel tue la nouvelle technologie», a-t-il déclaré à La Presse Affaires au cours d'un entretien téléphonique.

M. Aboulafia a affirmé qu'il était très difficile de lancer un nouvel appareil dans l'environnement économique actuel. Il s'est toutefois interrogé sur la volonté de Bombardier, sur son degré de dynamisme.

«Il faut être très agressif pour lancer un avion, il faut accepter de faire des concessions aux clients et aux partenaires», a-t-il soutenu.

Il s'est notamment demandé pourquoi Bombardier n'acceptait pas de lancer d'abord la plus grande version de la CSeries.

«Le marché est plus alléchant pour l'appareil de 130 places, a-t-il affirmé. Il y a déjà un bon appareil de 110 places sur le marché, l'Embraer 195. En termes de coûts d'exploitation, il serait plus facile pour Bombardier de battre Airbus et Boeing que de battre Embraer.»