L'économie américaine n'est pas dans une bulle, a affirmé jeudi la présidente de la Banque centrale américaine lors d'un débat « historique » à New York avec ses trois prédécesseurs à la tête de la Fed, Paul Volcker, Alan Greenspan et Ben Bernanke.

« Ce n'est pas une économie qui est dans une situation de bulle », a déclaré Janet Yellen. Également interrogée sur la décision de remonter les taux directeurs de la Fed en décembre pour la première fois en près de dix ans, Mme Yellen a estimé que cela n'avait pas été une « erreur ».

La Fed a adopté depuis une attitude attentiste face au ralentissement de la croissance mondiale, mais Mme Yellen a réaffirmé que la Fed allait continuer de mener une politique de relèvement graduel de ses taux.

Ce débat a toutefois eu lieu sans la présence physique d'Alan Greenspan, 90 ans, qui intervenait en duplex de Washington. Même s'il l'a précédé à la tête de la Fed de 1979 à 1987, Paul Volcker, 88 ans, est plus jeune et avait fait le déplacement.

Des quatre, c'est Ben Bernanke, dont le mandat à la tête de la Fed a couvert la période 2006-2014, qui était le benjamin de la réunion à 62 ans. Mme Yellen, la première femme à présider la Fed, est âgée de 69 ans.

Même s'il n'était pas sur scène, Alan Greenspan a suscité l'hilarité générale en interrompant accidentellement les considérations de Janet Yellen sur l'économie d'un éternuement tonitruant.

« Il m'a laissé ça à faire! »

Ben Bernanke, qui a guidé la Fed lors de la crise financière de 2008, a affirmé pour sa part que les périodes d'expansion « ne mouraient pas de vieillesse » et qu'il n'y avait pas de raison que la période de croissance actuelle de l'économie américaine s'arrête brutalement. « Je ne vois pas de raison que l'économie entre en récession en 2016 plus qu'elle n'aurait pu le faire en 2015 ou 2014 », a-t-il dit.

Il a toutefois ajouté qu'il ne fallait pas « placer tout le fardeau sur les banques centrales » et se reposer entièrement sur elles pour faire face à d'éventuelles périodes de récession économique même si la Fed « n'était pas actuellement à court de munitions ».

Ce point de vue a été partagé par Alan Greenspan, qui a rappelé l'importance des politiques budgétaires, et non seulement monétaires. Il a cependant mis en garde contre les risques présentés par l'augmentation de la dette américaine.

« Je suis d'accord avec tout le monde », a dit pour sa part Paul Volcker, ne se disant pas particulièrement inquiet de la situation actuelle.

Interrogé sur l'explosion du bilan de la Fed après la politique de soutien à l'économie pendant la crise financière qu'il a menée et la manière de le réduire, Ben Bernanke a ironisé : « ce n'est pas à moi de m'en occuper ».

« Il m'a laissé ça à faire! », l'a interrompu Janet Yellen.

Il a plus sérieusement estimé que la réduction de ce bilan se ferait naturellement lorsque la Fed arrêterait de réinvestir le produit des titres qu'elle détient dans son bilan.

Langage codé

Interrogé sur le ton cryptique employé par les dirigeants de la Fed pour expliquer leurs politiques, Alan Greenspan, a affirmé que la difficulté était « de limiter ce que nous disons au contexte de ce que nous savons », alors que la politique monétaire relevait le plus souvent de la prévision.

Alors que la Fed a opté ces dernières années pour une communication plus « transparente », notamment à l'initiative de Ben Bernanke. Ce dernier a souligné que la « communication est très importante » et que le « plus important est d'être clair ».

Janet Yellen a aussi rappelé que la structure décentralisée de la Fed, qui compte douze antennes régionales en plus du Conseil des gouverneurs, faisait aussi que « des personnes différentes ont des intérêts et des points de vue différents, et que le but n'était pas d'avoir un seul discours ».