Attendue au tournant par la planète finance, la banque centrale américaine (Fed) a finalement choisi la prudence en optant jeudi pour le maintien de sa politique de taux zéro par crainte, après les récentes turbulences financières et incertitudes économiques, notamment en Chine.

À l'issue de deux jours de réunion, le Comité de politique monétaire de la Fed (FOMC) a décidé de maintenir le loyer de l'argent à son plus bas niveau (entre 0 à 0,25%) et de ne pas procéder au premier relèvement de ses taux d'intérêt en près de dix ans.

Cet attentisme semble tenir en grande partie aux récentes turbulences financières et incertitudes économiques venues des marchés émergents et notamment du premier d'entre eux, la Chine, où le ralentissement de l'activité suscite des inquiétudes croissantes.

«Les récents développements dans l'économie et la finance mondiale ont peu quelque peu freiné l'activité et sont susceptibles d'exercer une pression à la baisse sur l'inflation à moyen terme», écrit le FOMC dans son communiqué final.

La Fed a également tenu à noter qu'elle surveillerait l'évolution de la situation «à l'étranger» qui peut également faire référence à la récente appréciation du dollar, qui pèse sur les exportations américaines.

Le statu quo n'a toutefois pas fait l'unanimité au sein du Comité de direction de la Fed. L'un des membres de ce Comité, Jeffrey Lacker, a ainsi voté contre la décision finale en faisant savoir qu'il aurait été partisan d'une hausse des taux directeurs d'un quart de point (soit 0,25%), un scénario que beaucoup d'investisseurs semblaient privilégier.

Les spéculations sur les marchés vont donc repartir de plus belle avant les deux prochaines réunions de la Fed prévues d'ici à la fin de l'année. L'enjeu n'est pas mince: les investisseurs redoutent la fin de l'ère de l'argent bon marché qui a fait leur fortune sur les marchés boursiers.

Quant aux pays émergents, ils craignent qu'une hausse des taux ne provoque une fuite des capitaux hors de leurs territoires, vers des endroits plus sûrs et plus rémunérateurs.

Peu d'indices pour la suite

Le communiqué du FOMC ne leur donnera que peu d'indices supplémentaires même si la présidente de la banque centrale, Janet Yellen devrait préciser sa pensée dans sa conférence de presse, à partir de 14h30.

En brossant un tableau positif de l'économie américaine, la Réserve fédérale semble toutefois suggérer qu'un premier relèvement de ses taux directeurs est pour bientôt, en ligne avec le voeu maintes fois formulé par Mme Yellen de voir une hausse d'ici à la fin de l'année.

Selon la Fed, l'économie américaine a progressé à un rythme «modéré» tout comme les dépenses des ménages et les investissements des entreprises.

Au coeur de la crise de 2008-2009, le secteur immobilier a donné de nouveaux signes «d'amélioration» tout comme le marché du travail qui a continué à s'améliorer.

Le taux de chômage américain est tombé en août à 5,1%, au plus bas en sept ans,un niveau proche du plein emploi qui fait partie des objectifs de la Fed.

La prudence de la banque centrale se reflète également dans les nouvelles prévisions économiques qu'elle a publiées jeudi.

La Fed se montre ainsi plus optimiste pour la croissance cette année en tablant sur une expansion de 2,1% sur un an au dernier trimestre 2015, contre 1,9% attendus en juin.

La croissance américaine s'est établie à 3,7% au deuxième trimestre en rythme annualisé, marquant un rebond partiellement technique après un premier trimestre affecté par l'hiver rigoureux.

Mais la Fed se montre plus pessimiste pour 2016 en abaissant à 2,3% contre 2,5% sa prévision de croissance.

Sur le front de l'emploi, la banque centrale table en revanche sur une décrue généralisée et plus marquée que prévu auparavant du taux de chômage tant en 2015 (5,0%) qu'en 2016 (4,8%).

L'inflation devrait en revanche rester bien inférieure à l'objectif de 2% annuel visé par la Fed.

Sur fond de décrue des cours mondiaux du pétrole, les prix à la consommation ne devraient progresser que de 0,4% contre 0,7% attendus en juin.

L'objectif de 2% d'inflation annuelle ne serait au mieux formellement atteint qu'en 2018 alors que la Fed espérait jusque-là y parvenir en 2017, selon ces projections.