Le ministre grec des Finances est arrivé lundi à Londres pour continuer d'expliquer aux Européens que la dette de son pays doit être renégociée, fort du soutien inattendu du président américain Barack Obama.

Yanis Varoufakis s'est entretenu à l'abri des médias lundi matin avec son homologue britannique George Osborne qui s'était félicité, avant cette rencontre, d'avoir «l'opportunité, si rapidement après l'élection grecque, de discuter (..) de la stabilité de l'économie européenne et de la manière de stimuler sa croissance».

Dans le même temps, Alexis Tsipras, le chef du nouveau gouvernement grec issu de la victoire du parti de gauche radicale Syriza aux législatives du 25 janvier, a salué à Chypre plusieurs soutiens déjà exprimés à la position d'Athènes.

«Je ne m'attendais pas à ce que se manifestent tant de fortes puissances pour soutenir notre tentative de bâtir un nouveau cadre», a-t-il affirmé lors d'une conférence de presse aux côtés du président chypriote Nicos Anastasiades.

Il réagissait notamment aux déclarations du président américain Barack Obama qui a estimé dimanche sur CNN, à propos de la crise en Grèce, qu'«on ne pouvait pas continuer à pressurer des pays qui sont en pleine dépression», reprenant un leitmotiv du nouveau gouvernement grec anti-austérité.

Tout en reconnaissant que la Grèce avait «un terrible besoin» de réformes, M. Obama a estimé qu'«il était très difficile d'initier ces changements si le niveau de vie des gens a chuté de 25%. À la longue, le système politique, la société ne peut pas le supporter».

«À un moment donné, il faut une stratégie de croissance pour pouvoir rembourser ses dettes», a fait valoir le président américain, semblant d'accord avec l'argumentation d'Athènes sur ce point.

«Nouveau contrat pour la Grèce»

M. Varoufakis espère rallier davantage de soutiens à Londres, capitale financière européenne, où il doit rencontrer, outre George Osborne, des acteurs de la City. Le Royaume-Uni n'est pas membre de l'euro, mais sa voix et celle de sa presse économique qui alertent sur le risque du chaos, pèsent d'un poids non négligeable sur le continent.

À Paris, première étape de sa tournée européenne, M. Varoufakis a imploré dimanche l'Europe de lui accorder «un peu de temps» pour expliquer la position du nouveau gouvernement, demandant «jusqu'à la fin de ce mois (de février) pour mettre sur la table (ses) propositions détaillées».

Le ministre voudrait ensuite négocier un accord sur la dette qui pourrait déboucher sur «un nouveau contrat pour la Grèce et toutes les nations (européennes) d'ici la fin du mois de mai», a-t-il déclaré lors d'une conférence de presse avec son homologue français Michel Sapin.

«Nous avons désespérément besoin» des 7 milliards d'euros, dernière tranche de prêt de l'Union européenne qui devait être versée fin février, mais «depuis cinq ans, la Grèce a vécu dans l'attente de la prochaine tranche de prêt, comme une droguée», a-t-il souligné.

MM. Sapin et Varoufakis ont largement répété que la place de la Grèce était dans l'euro, écartant toute sortie du pays de la monnaie unique.

Désireuse comme l'Italie d'assouplir l'austérité rigoriste promue notamment par l'Allemagne, la France «accompagnera, facilitera, sera toujours là pour qu'on trouve une voie, une solution qui permette à chacun de surmonter ses difficultés», a martelé M. Sapin pour sa part.

Après Londres, le ministre grec se rendra mardi à Rome, et plus tard, à une date encore inconnue, en Allemagne, alors que les marchés se demandent combien de temps la Grèce, aux abois, pourra tenir sur le plan financier.

Berlin, «bien sûr»

Les places financières avaient dévissé mercredi après les premières déclarations du nouveau gouvernement, remettant en cause les engagements de la Grèce vis-à-vis de ses créanciers. Les actions des banques grecques avaient notamment perdu un quart de leur valeur à la Bourse d'Athènes, qui rebondissait toutefois lundi de près de 5% en milieu de séance à la faveur d'un rebond des valeurs bancaires.

Syriza vient de prendre les manettes d'un pays étouffé par une dette de plus de 300 milliards d'euros (près de 175% du PIB). La puissante Allemagne se méfie toutefois de sa volonté de sortir de la politique d'austérité imposée à la Grèce par la «troïka» représentant ses créanciers - Union européenne, Banque centrale européenne (BCE) et FMI - en contrepartie des prêts octroyés à Athènes pour empêcher la banqueroute.

Samedi, la chancelière allemande Angela Merkel a écarté toute idée d'effacement pur et simple de la dette grecque, largement détenue par les États européens, à commencer par l'Allemagne (40 milliards d'euros) et la France (31 milliards).

Sans préciser de date, M. Varoufakis a assuré qu'il se rendrait «bien sûr» en Allemagne, avec laquelle les relations du nouveau pouvoir grec sont pour l'instant glaciales, pour discuter avec son homologue Wolfgang Schäuble à Berlin et avec la BCE à Francfort.

Il a vu dimanche à Paris le commissaire européen aux affaires économiques et financières, Pierre Moscovici, et une rencontre entre Alexis Tsipras et le président de la Commission européenne, Jean-Claude Juncker, est prévue dès mercredi à Bruxelles.