Face à la vigueur de la reprise économique aux États-Unis, le Comité monétaire de la banque centrale des États-Unis (FOMC), qui se réunit mardi et mercredi, va se demander si un changement de ton sur l'évolution des taux d'intérêt se justifie.

De nombreux économistes estiment que la Réserve fédérale (Fed) pourrait signaler plus fermement à l'issue de la réunion qu'elle s'apprête à relever les taux en 2015 en abandonnant son engagement à les laisser proches de zéro «pendant une période considérable».

Janet Yellen se livrera à une explication de texte à l'issue de la réunion mercredi à 14h30. Cela sera la première conférence de presse de la présidente de la Fed depuis septembre.

Déjà, lors de ses deux dernières réunions, le Comité de politique monétaire s'était interrogé sur la nécessité de garder ou non cette promesse de laps «de temps considérable» dans son communiqué. Les marchés l'interprètent généralement comme l'assurance que les taux resteront en l'état pendant six mois après la fin de la politique de stimulus monétaire et des rachats d'actifs qui est intervenue en octobre.

Cette référence à la «période considérable» avait été conservée en octobre, mais la Fed avait souligné que si les progrès de l'emploi et de l'inflation étaient plus rapides, une première hausse des taux le serait aussi.

Depuis, la première économie mondiale a montré les signes d'une accélération de sa vitalité. Les créations d'emplois de novembre sont au plus haut depuis presque trois ans (321 000) et le taux de chômage est au plus bas depuis juillet 2008, à 5,8%.

La croissance de juillet à septembre s'est révélée plus forte qu'attendu (3,5%). Quant au moral des ménages, dopé par la baisse des prix de l'essence à la pompe, il a grimpé à un sommet en sept ans se reflétant dans les ventes de fin d'année (+0,7% en novembre).

Jusqu'ici, les marchés ne s'attendaient pas à une hausse des taux d'intérêt au jour le jour avant le milieu de 2015, alors qu'ils sont maintenus historiquement bas entre 0 et 0,25% depuis décembre 2008.

«Il est temps d'abandonner la formule de la 'période considérable'. Que ce soit ce mois-ci ou celui d'après, cela va venir», a assuré Joel Naroff, économiste indépendant.

Ne pas effrayer les marchés

«Nous ne serions pas surpris si cette expression était remplacée par une formule indiquant que la Fed restera 'patiente'», estimait Paul Ashworth, de Capital Economics, reprenant le leitmotiv récemment exprimé par William Dudley, le président de la Fed de New York, lorsqu'il a évoqué la future normalisation de la politique monétaire.

Aux yeux de ces analystes, le terme «patient» évoquerait un laps de temps plus court pendant lequel les taux resteraient en l'état.

«Je n'attacherais pas trop d'importance à ce changement de vocabulaire. La différence est minime entre 'période considérable' et 'soyons patients'», souligne pour sa part Dorothy Weaver qui dirige le fonds d'investissements Collins Capital. «Ce qu'ils cherchent à faire, c'est garder leurs options ouvertes et fournir un message d'orientation monétaire sans effrayer les marchés», selon elle.

La banque centrale divulguera également mercredi ses nouvelles prévisions économiques, qui pourraient être revues à la hausse à la faveur de la chute des prix de l'énergie qui commence à dynamiser la consommation. Jusqu'ici la Fed mise sur une croissance entre 2,6% et 3% pour 2015.

Du côté de l'inflation, la Fed voudrait voir les prix remonter vers sa cible de 2%, mais les prix du pétrole ont continué de baisser et les hausses de salaire restent limitées, ce qui ne plaide pas pour un proche relèvement des taux. L'inflation sur un an, selon l'indice PCE, n'est que de 1,4%.

Entre l'appréciation du dollar et le ralentissement économique en Europe et en Asie, les risques géopolitiques sont aussi sur le radar de la Fed.

«On ne peut pas seulement considérer nos chiffres, il faut regarder par-dessus notre épaule pour voir si ce ralentissement risque d'avoir des conséquences sur notre croissance», a affirmé Mme Weaver.