Confrontée à des accusations de connivence avec les grands noms de Wall Street, la Réserve fédérale américaine va procéder à une évaluation de ses procédures de surveillance des grandes banques, a-t-elle annoncé jeudi dans un communiqué.

La Fed a indiqué qu'elle avait demandé à son inspecteur général de passer sous revue «les méthodes» utilisées par les régulateurs dans les différentes antennes régionales du système de la Réserve fédérale pour «obtenir toutes les informations nécessaires» de la part des banques qui sont l'objet de la surveillance.

L'inspecteur général devra également étudier les modes de communication interne et notamment déterminer comment les régulateurs peuvent «être mis au courant de divergences de vues» au sein des auditeurs chargés d'opérer cette surveillance bancaire.

Le conseil d'administration de la Fed va par ailleurs lui-même évaluer sa propre surveillance des établissements financiers les plus importants. L'étude portera sur le fait de savoir si les régulateurs «reçoivent les informations nécessaires pour prendre des décisions saines et cohérentes quant à la supervision des organisations bancaires les plus importantes et les plus complexes», indique la Fed.

Ces examens internes interviennent alors que la banque centrale de New York a été récemment accusée de connivence avec certains géants de Wall Street qu'elle est censée surveiller, notamment la banque d'affaires Goldman Sachs.

Le président de la banque centrale de New York William Dudley doit témoigner vendredi devant une commission du Sénat lors d'une audition consacrée à l'amélioration de la surveillance bancaire par la banque centrale.

Garder son indépendance

Dans le discours qu'il doit prononcer devant les sénateurs qui a été publié sur le site de la Réserve fédérale jeudi, M. Dudley a rappelé que les examinateurs de la Fed devaient observer des rotations tous les trois à cinq ans afin de mieux comprendre l'établissement qu'ils surveillent «sans sacrifier leur indépendance».

Il a aussi indiqué que des mesures concrètes avaient été prises pour encourager ces examinateurs «à parler», ce qui est vu comme «une compétence première».

En septembre, une ancienne employée de la Fed de New York avait révélé dans des enregistrements datant de 2012 comment les régulateurs de Goldman Sachs n'ont pas osé confronter cette banque sur une transaction qu'ils considéraient pourtant «louche».

Il s'agissait d'une opération entre Goldman Sachs et Banco Santander où la banque espagnole, sommée d'augmenter son capital par les régulateurs européens pour absorber un éventuel choc, entendait transférer de manière comptable une partie de ses actifs à sa partenaire américaine pour atteindre plus facilement le seuil requis de capitaux propres.

L'ex-employée de la Fed, Carmen Segarra, licenciée en mai 2012, a affirmé qu'elle a été écartée du fait de son manque de déférence vis-à-vis de Goldman Sachs. La Fed de New York a rejeté cette interprétation affirmant que le licenciement de cette examinatrice était lié à ses performances.

Plus récemment, deux employés de Goldman Sachs ont été licenciés pour avoir relayé des informations confidentielles obtenues auprès de la Fed de New York et concernant une transaction en cours chez Goldman Sachs. Un jeune banquier, autrefois employé par la Fed de New York avant de rejoindre Goldman Sachs, a obtenu des informations de son ancien employeur portant sur une transaction de la banque et les a transmises à un supérieur. Les deux hommes ont été licenciés, Goldman Sachs affirmant avoir «une tolérance zéro pour ce type de conduite».

Dans l'intervention qu'il va prononcer vendredi, William Dudley, lui-même un ancien responsable de Goldman Sachs, reconnaît «les risques qu'il y a à devenir trop proche des firmes qu'on supervise».

«Nous travaillons dur pour éviter ces risques (...). Bien sûr, nous ne sommes pas parfaits», a-t-il affirmé.

«Nous ne pouvons pas déceler et corriger toutes les erreurs des institutions financières et parfois nous faisons des erreurs», a encore indiqué M. Dudley. «Mais la bonne mesure de notre efficacité en matière de surveillance est l'amélioration de la solidité et de la stabilité des banques depuis la crise financière», a-t-il assuré.