L'économie américaine a encaissé au premier trimestre sa pire contraction depuis cinq ans et la fin de la récession, payant un tribut plus lourd que prévu à l'hiver rigoureux qui a grippé l'activité.

Après un gain de 2,6% au dernier trimestre 2013, le produit intérieur brut (PIB) des États-Unis a plongé de 2,9% en rythme annualisé entre janvier et mars, en données corrigées des variations saisonnières, selon l'estimation finale publiée mercredi par le département du Commerce.

Ce chiffre a surpris les analystes et témoigne d'une très nette dégradation par rapport à la précédente estimation officielle publiée fin mai, qui donnait un recul de 1,0%.

Finalement, la chute de la première économie mondiale aura donc été quasiment trois fois plus rapide et a atteint une ampleur sans précédent depuis le début 2009, renvoyant à une époque où les États-Unis se débattaient encore dans la récession post-crise financière.

Alors que les élections législatives se profilent en novembre, la Maison-Blanche a aussitôt réagi en mettant ce recul sur le compte de facteurs «volatils» mais a dû concéder que la reprise économique était encore «inachevée».

L'hiver extrêmement rigoureux qui a sévi aux États-Unis est montré du doigt par les experts et a affecté la quasi-totalité des secteurs de l'économie, selon les données du ministère.

Moteur de la croissance américaine, la consommation des ménages a certes résisté en grappillant +1% mais a nettement décéléré à la fois par rapport aux trois derniers mois de l'année 2013, où sa hausse avait atteint 3,3%, mais aussi par rapport à la précédente estimation de +3,1%.

Les Américains ont notamment coupé dans leurs dépenses d'assurance-maladie (-6,4% par rapport au trimestre précédent) en pleine montée en puissance de «l'Obamacare», la très contestée réforme du secteur qui a connu de sérieux couacs au démarrage.

«La combinaison du climat, de la baisse des stocks et du chaos sur la réforme de la santé fait que ces données sont profondément non-représentatives de la tendance», affirme Ian Shepherdson, analyste chez Pantheon Macroeconomics.

Selon la plupart des experts, un retour de la première économie mondiale en récession --qui se définit par deux trimestres consécutifs de recul du PIB- est totalement exclue.

La Banque centrale américaine (Fed), qui surveille la conjoncture comme le lait sur le feu, s'attend ainsi au deuxième trimestre à une croissance «solide» qui pourrait, selon certains experts, dépasser de loin les 3%.

«L'économie américaine n'est aucunement proche de la récession», résume Sal Guatieri, de BMO Capital Markets.

Déséquilibres

Pour autant, ce mauvais chiffre de la croissance ne sera pas sans conséquences et risque de laisser des traces.

Sur les trois premiers mois de l'année, l'économie américaine a continué de montrer certains signes de déséquilibres, notamment sur son déficit commercial qui a amputé la croissance de 1,5 point de pourcentage.

Dans le détail, les exportations américaines ont reculé de 8,9% tandis que les importations - qui sont déduites du PIB - ont augmenté de 1,8%.

L'investissement privé est resté fortement déprimé, avec une chute de 11,7% par rapport au dernier trimestre 2013, notamment dans le secteur non-résidentiel.

«Tout cela signifie qu'il sera extrêmement dur de parvenir à 2% de croissance sur l'ensemble de l'année», pronostique Steven Ricchiuto, de Mizuho Securities.

Le Fonds monétaire international (FMI) semble l'avoir déjà intégré, en sabrant sa prévision pour les États-Unis à la mi-juin, à 2% contre 2,8% estimés jusque-là, et en mettant en garde contre l'érosion du potentiel de croissance des États-Unis.

Même avec un rebond au deuxième trimestre, la croissance pourrait bien être «nulle» sur l'ensemble du premier semestre, s'inquiète Chris Low, de FTN Financial Group, qui parle d'une contraction «sévère».

Si une récession semble de l'avis général exclue, l'heure est donc à un optimisme très mesuré pour les États-Unis.

«On va vers des jours meilleurs... à condition qu'un autre choc-surprise ne se produise pas», affirme Sal Guatieri.