Cinq ans après la crise financière, les régulateurs bancaires américains ont approuvé mardi les textes d'application de la règle de Volcker, un volet contesté par les banques de la loi Dodd-Frank sur la réforme de Wall Street, qui veut limiter la spéculation bancaire.

La règle de Volcker «vise l'important objectif de limiter les risques excessifs pris par les institutions de dépôt et leurs filiales», a souligné le président de la réserve fédérale, Ben Bernanke dans un communiqué.

Les autorités voudraient empêcher les grandes banques de prendre des positions risquées alors que leurs dépôts sont assurés par l'État. Les faillites bancaires dans le sillage de la crise de 2008, mais aussi l'épisode de la «Baleine de Londres», où un trader de JP Morgan Chase avait misé sur des positions intenables provoquant une perte de 6,2 milliards de dollars, ont pesé pour beaucoup dans la genèse de la nouvelle règle.

Elle tire son nom de l'ancien président de la Fed et ex-conseiller économique du président Obama, Paul Volcker, 86 ans.

«Avec la règle de Volcker, il sera hors-la-loi pour les banques d'utiliser de l'argent assuré par le gouvernement pour faire des paris spéculatifs qui menace le système financier tout entier», a souligné le président Obama.

Le texte approuvé mardi par cinq régulateurs stipule que les banques ne pourront plus «faire de négoce à court terme de titres, de produits dérivés et de contrats sur les matières premières pour leur compte propre».

La réglementation interdit aussi aux banques de posséder ou de participer à «des fonds de placement ou des fonds spéculatifs».

Des exceptions permettent toutefois aux institutions de poursuivre ces investissements dans des opérations de couverture si elles «démontrent» que celles-ci sont destinées à se protéger de risques «identifiés». Elles sont autorisées à investir au nom de clients à condition que ces opérations soient très documentées. Elles pourront également faire le négoce d'obligations gouvernementales, d'États et de municipalités.

Le texte s'appliquera à partir du 21 juillet 2015, mais les régulateurs pourraient envisager de prolonger ce délai encore d'un an, a indiqué à la presse un haut responsable d'un des régulateurs.

«Parvenir à approuver (ce texte) a pris plus longtemps que prévu mais les cinq agences (de régulation) ont travaillé dur ensemble pour résoudre de nombreuses difficultés et répondre à de multiples questions du public», a concédé Ben Bernanke.

La loi, qui fait 70 pages, est précédée d'un préambule de près de 900 pages. Les régulateurs ont reçu quelque 18.000 lettres de la profession durant la rédaction du texte.

Le texte définitif d'application de la loi a reçu mardi l'approbation des trois régulateurs bancaires - la Réserve fédérale (Fed), la Federal Deposit Insurance Commission (FDIC) et l'Office of the Comptroller of the Currency (OCC) - ainsi que des deux agences qui surveillent les marchés - la SEC et la Commodity Futures Trading Commission (CFTC).

«Cette règle est conçue pour réduire de façon significative les risques pour notre économie et les marchés financiers, tout en préservant la vitalité des marchés américains de capitaux», a affirmé Marie Jo White, président de la SEC.

Une des priorités «était de s'assurer que cette règle se focalise sur les plus gros acteurs sans imposer de fardeau supplémentaire aux petites banques locales», a estimé Thomas Curry, qui dirige l'OCC.

Des poids lourds du secteur comme JP Morgan, Morgan Stanley et Goldman Sachs pourraient voir leurs volumes d'affaires diminuer du fait de ces nouveaux interdits, estimaient les analystes, mais de nombreuses banques ont déjà commencé à réduire leurs activités de négoce dans l'attente de la loi.

Mardi, la Chambre de commerce américaine, un groupe ultra-libéral qui soutient les intérêts des milieux d'affaires américains, a dénoncé la règle de Volcker comme étant «la règle la plus complexe de la loi Dodd-Frank déjà très complexe», estimant qu'elle «pourrait évincer des firmes de certains marchés, rehausser le coût du capital et placer les États-Unis en position de faiblesse face à la concurrence mondiale».