Les Américains qui font des achats sur l'internet pourraient bientôt devoir payer des taxes. Les Canadiens n'ont pas à s'inquiéter de l'éventuel changement. Des taxes, ils doivent déjà en payer sur tout achat en ligne... même si plusieurs l'ignorent et les évitent dans certains cas!

L'idée de taxer les achats en ligne soulève de nouvelles passions au sud de la frontière. Confrontés à la difficulté de boucler leur budget, bien des gouverneurs républicains abandonnent leur traditionnelle opposition au projet et se sont prononcés récemment en faveur de ce que les Américains appellent l'Amazon tax, en référence au géant du commerce électronique.

«Il est écrit dans le ciel que les États vont collecter des taxes sur les achats en ligne. Ça va arriver - si ce n'est pas cette année, alors ce sera l'an prochain», a notamment lancé le gouverneur du Tennessee, Lamar Alexander, dans une citation rapportée par le Wall Street Journal.

Contrairement au Canada, les États-Unis n'ont pas de taxe fédérale à la consommation. Les seules taxes qui peuvent s'appliquer sur les achats électroniques sont donc celles des États. Le hic: l'État peut seulement percevoir une taxe si l'entreprise qui vend le bien a une présence physique dans l'État où réside l'acheteur. Il arrive donc souvent qu'aucune taxe ne soit payée, ce qui prive les États de 23 milliards US de revenus par année, selon la National Conference of State Legislatures.

Ironiquement, même Amazon demande maintenant aux États de taxer ce qu'elle vend! L'entreprise veut en effet offrir la livraison en un seul jour dans plusieurs régions, ce qui l'obligerait à étendre son réseau d'entrepôts et donc avoir une présence physique tant plus d'États. Tant qu'à voir ses produits taxés, elle aimerait bien que ceux de ses concurrents le soient aussi.

Les Canadiens déjà taxés

La situation n'aura pas d'impact au Canada, où les citoyens sont déjà taxés lorsqu'ils achètent sur l'internet. Le hic, c'est que, dans certains cas, ces taxes ne sont pas payées, parfois en raison de l'ignorance des consommateurs.

Un acheteur québécois qui achète d'un site québécois paiera sa TPS et sa TVQ au moment de régler son achat en ligne, comme s'il avait acheté en boutique. Le problème survient lorsqu'il achète d'un site étranger qui, bien souvent, n'est pas inscrit aux régimes de la TVQ ou de la TPS et ne percevra donc pas directement les taxes auprès de l'acheteur.

Le consommateur pourra se faire rattraper au moment de se faire livrer son bien, soit par l'Agence des services frontaliers, soit par Postes Canada ou les autres services de messagerie. Grâce à des ententes avec les gouvernements, ceux-ci peuvent percevoir la TPS et, dans certains cas, la TVQ.

«Il y a bien des cas qui passent entre les mailles du filet», dit cependant Michel Lagrange, avocat en fiscalité chez Samson Bélair/Deloitte&Touche, qui pointe notamment le cas des biens virtuels qui ne sont pas livrés par la poste.

Le devoir de «s'autocotiser

Ce que bien peu de consommateurs savent, c'est que s'ils ne se voient pas imposer l'une ou l'autre des taxes, il est de leur responsabilité de lever la main et de «s'autocotiser» en remplissant des formulaires auprès de Revenu Québec ou de l'Agence du revenu du Canada.

«On comprend que, dans les faits, ce n'est pas tellement respecté. Parfois par ignorance, parfois parce que les acheteurs ne veulent pas le faire», dit M. Lagrange.

Selon le Centre facilitant la recherche et l'innovation dans les organisations (CEFRIO), 28,2% des adultes québécois ont fait des achats en ligne au mois de mai dernier, dépensant en moyenne 313$.