Wall Street a regagné le terrain perdu avec la crise financière, se retrouvant désormais à ses niveaux de fin 2007 après un bond de 11% en trois mois, au point que les analystes se demandent si la Bourse de New York ne va pas trop vite, trop loin.

Pour la première fois de son histoire, son indice vedette, le Dow Jones, et le Nasdaq, à dominante technologique, ont clôturé mardi au-dessus des seuils psychologiques de 13 000 points et de 3000 points, au cours d'une même séance.

Le Dow Jones évoluait jeudi à un niveau plus atteint depuis le 31 décembre 2007, le Nasdaq retrouvant également son niveau d'avant la crise de 2008.

Au total, le Dow Jones a bondi de 11,45% en trois mois, et d'environ 8% depuis le début de l'année 2012.

De son côté, l'indice élargi Standard & Poor's 500, qui réunit 500 grandes valeurs de Wall Street, et qui est très suivi par les marchés en raison de sa diversité, a franchi le seuil des 1400 points jeudi en séance pour la première fois depuis le 6 juin 2008.

Ces performances boursières inédites en près de quatre ans alarmaient certains analystes, pour qui la vigueur de cette croissance ne semblait pas justifiée.

«Bien que nous croyions que les facteurs pour un marché haussier sont là, les statistiques suggèrent que la progression est allée trop loin, trop vite et doit ralentir», fait valoir Frederic Dickson, de DA Davidson.

«Le marché en ce moment est relativement insouciant. On a parfois l'impression que tout est résolu, qu'il n'y a plus de problèmes en Europe», remarque Gregori Volokhine, de Meeschaert Capital Market.

Le bond des indices reflète l'enthousiasme grandissant des investisseurs vis-à-vis de l'économie américaine, ainsi que le retour d'une certaine confiance dans le secteur bancaire, considéré comme un baromètre de la reprise économique.

Le succès de 15 des 19 plus grandes banques américaines aux tests de résistance imposés par la banque centrale des États-Unis (Fed) est vu par beaucoup comme le signe qu'une page se tourne depuis l'éclatement de la bulle financière en 2008 et l'effondrement de la banque d'affaires Lehman Brothers.

Également, en toile de fond, la décrue du chômage aux États-Unis continue de rassurer les investisseurs, tout comme la résolution de la crise grecque.

«Les choses semblent aller mieux. En Europe, aux États-Unis, en Chine. (...) Il n'y a pas de récession aux États-Unis, les indicateurs économiques y sont rassurants tout comme en Asie», résume Alec Young, de S&P Capital IQ.

Reste que, «malgré le rebond actuel, la plupart des gens ne croient pas» à la formation d'une bulle spéculative, indique Gregori Volokhine.

«Il y a encore beaucoup d'argent qui dort sur le marché», relève Dick Green, du site d'analyse financière Briefing.com, constatant une très faible volatilité. «Un grand nombre de sceptiques ne parviennent pas à accepter ce rebond du marché depuis trois ans» et à s'y rallier, ajoute-t-il.

Le Dow Jones a célébré vendredi sa troisième année consécutive de rebond après avoir clôturé à son plus bas en douze ans le 9 mars 2009, en pleine crise financière, à 6547,05 points. Il s'est apprécié depuis cette date de 101,28%.

«Nous ne pensons pas que le marché soit surévalué», abonde Alec Young. «Nous avions un objectif de 1400 points (pour le S&P 500) en 2012, et nous l'avons presque atteint, comme prévu. C'est une évolution tout à fait conforme à nos prévisions.»

Mais, pour lui, «il sera difficile d'aller beaucoup plus haut». «C'est pourquoi nous ne conseillons pas à nos clients d'investir en ce moment. Il faudra attendre un moment de correction, mais je ne vois pas quel en sera le déclencheur».