Ce n'est que vers la fin de 2014 que la Réserve fédérale américaine (Fed) envisage désormais de relever une première fois son taux directeur. Ce faisant, elle veut stimuler davantage la reprise qu'elle juge encore modeste et s'assurer que l'inflation, qui ralentit depuis peu, évolue près de son taux cible, désormais explicitement fixé à 2%.

La Fed revoit quelque peu à la baisse ses perspectives de croissance pour 2012 et 2013. Elle s'attend maintenant à ce que l'expansion de la première économie du monde évolue entre 2,2% et 2,7% cette année. En novembre, la tendance de projection des 12 présidents des réserves régionales et des 5 membres du Bureau des gouverneurs était de 2,5% à 2,9%.

Pour l'an prochain, la fourchette de novembre de 3,0% à 3,5% est ramenée à de 2,8% à 3,2%. «Les tensions sur les marchés financiers mondiaux continuent de poser des risques baissiers importants aux perspectives économiques», réitèrent les autorités monétaires dans leur communiqué.

Pour 2014, la Fed voit une accélération de la croissance de l'ordre de 3,3% à 4,0%, tout en précisant que le rythme de croissance à long terme sera plutôt de 2,3% à 2,6%, soit un dixième de moins que sa projection de novembre. Il s'agit là d'une estimation du potentiel de croissance.

Étant donné l'amélioration des conditions du marché du travail, la Fed envisage que le taux de chômage pourrait se situer de 8,2% à 8,5% en décembre. C'est deux dixièmes de moins que sa projection automnale. En décembre 2013, il devrait s'élever aux alentours de 7,4% à 8,1%, ce qui est aussi un peu mieux que la projection précédente.

La Fed croit que le taux de chômage devrait s'établir entre 5,2% et 6,0% à long terme, une évaluation du plein emploi, ce qui est hors d'atteinte dans son horizon de prévision.

Dans un effort de transparence, la Fed a publié un nouveau tableau. Il indique à quel moment chacun des 17 membres de son comité de politique monétaire voit le début du resserrement monétaire.

Six seulement le fixent avant 2014, autant après. Six des dix-sept voient même le taux encore inchangé à la fin de 2014.

Devant pareille évidence, son engagement du 9 août de ne pas resserrer le taux cible avant le milieu de 2013 ne tenait plus. La nouvelle formule retenue, «au moins jusque vers la fin de 2014», convient mieux.

Cette précision a toutefois entraîné la dissidence de Jeffrey M. Lacker qui aurait préféré qu'on ne donne pas de telles indications.

Depuis décembre 2008, la Fed veut que le taux auquel les banques se prêtent entre elles pour une période d'un jour évolue dans une fourchette de 0% à 0,25%. Jusqu'en août dernier, elle s'était contentée de répéter de décision en décision que ce taux exceptionnellement faible était en place «pour une durée prolongée».

Cette plus grande transparence, qui n'est pas un engagement formel, a été bien reçue sur les places boursières nord-américaines. Elles ont inversé leur tendance baissière et leurs indices ont terminé la séance avec des gains appréciables.

Le dollar américain s'est aussi replié contre la plupart des autres monnaies. Après une ouverture à la baisse, le huard a gagné 63 centièmes et cotait 99,65 cents US, au fixing de 16h.

L'annonce de la Fed va sans doute compliquer davantage la normalisation du taux directeur de la Banque du Canada. Elle prévoit que l'inflation aura retrouvé sa cible de 2% au milieu de 2013, ce qui présume de hausses de taux d'ici là, susceptibles d'apprécier le huard.

En conférence de presse, le président de la Fed, Ben S. Bernanke, a aussi expliqué que la politique monétaire a un effet sur le taux d'inflation. Voilà pourquoi la Fed se rallie à plusieurs autres banques centrales en adoptant une cible de marche des prix de 2% à long terme. C'est le meilleur taux, a-t-il expliqué, pour assurer la stabilité des prix à long terme sans courir le risque dangereux de déflation.

«Nous n'avons pas un mandat de ciblage de l'inflation, s'est toutefois défendu M. Bernanke. Nous avons le double mandat de favoriser la stabilité des prix et le plein emploi.»

La Fed entend suivre davantage l'indice des prix des dépenses personnelles de consommation (IPDPC) plutôt que l'indice des prix à la consommation (IPC) comme le fait par exemple la Banque du Canada.

L'IPDPC reflète mieux les coûts des dépenses de santé et les changements dans les habitudes de consommation que l'IPC, plaide-t-il. En outre, le poids du logement y est moins déterminant, bien que les deux mesures évoluent de manière bien similaire.