Conrad Black, reconnu coupable de fraude et d'entrave à la justice, retournera en prison pendant au moins un an, a tranché la juge Amy St. Eve vendredi, à l'issue de l'audience de détermination de la peine de l'ex-magnat de la presse.

Au terme de la révision de la sentence de l'homme d'affaires, la juge St. Eve, qui avait déjà condamné M. Black il y a six ans, a choisi de le renvoyer en prison pour une période de 42 mois.

Elle a admis qu'elle se demandait encore ce qui avait pu motiver sa conduite, lui souhaitant bonne chance au passage.

M. Black, qui a vu le jour à Montréal, a déjà passé 29 mois en prison, ce qui veut dire qu'il pourrait retourner derrière les barreaux pendant 13 mois, ou moins, si son comportement est exemplaire.

À l'annonce de la sentence, la femme de M. Black, Barbara Amiel, s'est évanouie. Elle a été soignée par le personnel médical présent dans la salle d'audience de Chicago.

M. Black et ses avocats se sont entendus avec la juge à l'effet que l'accusé, désormais trouvé coupable, se rendrait aux autorités de la prison dans environ six semaines.

Plus tôt vendredi, la juge St. Eve a écouté Conrad Black, qui demandait d'être libéré sous prétexte que lui et sa famille avaient grandement souffert depuis qu'il a été déclaré coupable de fraude. Il a précisé s'inquiéter pour ses proches davantage que pour lui-même.

Les avocats de Conrad Black ont eux aussi exhorté la juge Amy St. Eve à libérer leur client, lui demandant de considérer l'âge de M. Black, comme sa bonne conduite en prison, dans sa décision. L'homme d'affaires a passé 29 mois dans une prison de la Floride avant d'être libéré sous caution l'année derrière, en vertu d'une décision de la cour d'appel.

La défense a également souligné que les sentences imposées aux collègues de M. Black avaient été plus courtes. Selon les avocats de Conrad Black, il n'y a aucune explication valable pour que celui-ci écope d'une sentence aussi longue.

Conrad Black a été reconnu coupable de trois accusations de fraude et d'une accusation d'entrave à la justice.

Me Carolyn Garland a qualifié de «tout simplement extraordinaires» les efforts déployés par M. Black en prison. Elle a dit qu'il avait conservé une attitude positive «en dépit de toute la souffrance qu'il a endurée».

Me Miguel Estrada a ajouté que M. Black avait subi «avec grâce» l'humiliation quotidienne dans la prison de Floride où il a été incarcéré. L'établissement accueille principalement des criminels violents et des gens trouvés coupables de trafic de drogue.

La défense a également indiqué que la santé de l'homme de 66 ans ne faisait que se dégrader et que la prison n'était pas un endroit pour envoyer un homme de cet âge.

M. Black souffre de haute tension et d'un niveau de cholestérol élevé, des conditions mal supervisées en prison. De plus, selon ses avocats, il est également atteint d'un cancer de la peau.

Au début du mois de juin, toutefois, une chef d'unité de la prison de Coleman, Tammy Padgett, avait soumis un document au tribunal dans lequel Conrad Black n'était pas présenté comme le détenu exemplaire que ses avocats dépeignent.

Le document indiquait plutôt que l'homme s'était arrangé pour échapper à ses responsabilités et qu'il avait utilisé d'autres détenus comme serviteurs pendant qu'il purgeait sa peine de prison en Floride.

Dans le document, Mme Padgett affirmait que l'ancien magnat de la presse avait demandé de profiter d'un traitement privilégié et qu'il s'était constitué un entourage de détenus qui agissaient comme des serviteurs à son emploi.

Elle avait précisé que les détenus en question faisaient la cuisine et la lessive pour Black, en plus de laver son plancher et de repasser ses vêtements, entre autres tâches. Elle avait ajouté que cela n'était pas du tout chose fréquente à la prison de Coleman.

Dans la salle vendredi, M. Black, qui portait un complet bleu foncé et une cravate, s'est assis auprès de ses avocats, tandis que sa femme, les traits tirés, s'est assise dans la première rangée.

M. Black a déclaré à la juge St. Eve qu'il avait lu un rapport avant d'entendre sa sentence et qu'il n'y ajouterait pas de nouvelle objection.

La juge St. Eve pouvait choisir de maintenir la sentence initiale de six ans et demi, de renvoyer Conrad Black en prison pour les accusations qui demeurent, mais pour une période écourtée, ou encore de le libérer en fonction du temps qu'il a déjà passé derrière les barreaux.

S'il avait été libéré, il aurait dû demeurer à l'extérieur des États-Unis.

L'homme d'affaires était libre sous caution depuis près d'un an.

C'est dans la salle de cour de Chicago où M. Black se trouvait vendredi matin que la juge St. Eve avait condamné l'homme d'affaires à six ans et demi de prison en 2007.

En juin 2010, toutefois, la Cour suprême des États-Unis avait invalidé les trois condamnations pour fraude prononcées contre Conrad Black. Cette décision avait restreint la portée d'une loi fédérale sur la fraude, souvent utilisée dans les dossiers de crimes économiques. Aussi, la juge St. Eve a-t-elle dû réviser la sentence de M. Black.