Pendant que les Américains allaient aux urnes hier pour remodeler le Congrès, les milieux d'affaires québécois prêtaient attention aux résultats des courses. Des entreprises d'ici actives aux États-Unis minimisent les impacts d'une nouvelle donne politique, d'autres espèrent un nouveau souffle. Mais elles devront à coup sûr surveiller la direction que prendra la politique commerciale américaine après cette élection.

Le constructeurs d'autocars Prévost a 250 employés aux États-Unis, répartis dans six États. Le plan de relance ne s'est pas fait sentir sur les activités de la société, que ce soit dans le secteur des autocars ou des maisons motorisées.

«Plusieurs de nos clients, spécialement les républicains, nous disent retenir leurs dépenses et leurs investissements, souligne le président et chef de la direction de Prévost, Gaétan Bolduc. Il y a chez eux une certaine considération que l'argent de l'État n'est pas dépensé de la bonne façon et ils sont craintifs quant à l'avenir de leur pays. Je présume donc que les élections peuvent changer quelque chose.»

Du côté de Canam, qui possède 14 usines aux États-Unis, le président du conseil Marcel Dutil minimise l'impact d'un nouveau Congrès. «En ce qui me concerne, l'année 2011 va être exactement comme les 12 derniers mois. Pas mieux pas pire.»

Au moment de recueillir les commentaires des milieux d'affaires, le scénario le plus probable prévoyait une prise de contrôle de la Chambre des représentants par les républicains. C'est sur le plan du commerce que ce scénario provoquait le plus de questions.

D'abord, il faudrait voir qui les républicains placeraient à la tête des comités de la Chambre, soutient l'ancien ambassadeur Raymond Chrétien, associé et conseiller stratégique chez Fasken Martineau. «Si ce sont des gens du Nord, c'est de bon augure. Plus ils sont loin de la frontière, moins c'est bon pour nous.»

Justement, il faudra aussi garder l'oeil sur la question du passage à la frontière, croit M. Chrétien. Les républicains sont plus insistants sur la sécurité frontalière.

Même si les républicains sont généralement plus libre-échangistes que les démocrates (un plus pour le Canada), l'influence du Tea Party représente un risque pour les entreprises d'ici, soutient Simon Prévost, président des Manufacturiers et exportateurs du Québec. «Cela pourrait se traduire par des politiques économiques plus populistes, plus américano-centrées.»

Train à basse vitesse?

Les ardeurs de Barack Obama concernant les projets de train à grande vitesse peuvent aussi être ralenties par une Chambre républicaine, note David Waldren, associé chez Secor.

Chez Stella-Jones, qui fabrique des traverses de chemin de fer, on verrait certainement d'un bon oeil la poursuite des investissements gouvernementaux dans les infrastructures. «Mais ce n'est pas quelque chose sur lequel on base nos prévisions ou notre stratégie», dit le président et chef de la direction, Brian McManus.

M. McManus ne s'inquiétait donc pas trop du résultat des élections hier. «Ça va bien pour nous actuellement, nous avons une base de demande pour maintenir les systèmes. Je ne vois pas d'impact majeur, peu importe l'issue du vote. Les deux partis soutiennent les infrastructures.»

Les sociétés québécoises de technologies de l'environnement avaient aussi de bonnes raisons de suivre la soirée électorale hier, ajoute Raymond Chrétien. «Une Chambre contrôlée par les républicains s'opposerait à toute grande politique qu'Obama voudrait passer sur l'environnement», affirme-t-il.

Chez Enerkem, société montréalaise qui développe une usine de biocarburant au Mississippi - grâce à une subvention de 50 millions US de l'administration Obama - on est moins inquiet.

«On s'attend à ce que le secteur très stratégique de la production locale de biocarburants reste une priorité, peu importe l'allégeance de la Chambre», dit Marie-Hélène Labrie, vice-présidente aux affaires gouvernementales et communications. «Le côté création d'emplois ou moteur économique va peut-être interpeller davantage les républicains, tandis que le côté environnemental interpelle plus les démocrates.»

Tant de choses à suivre alors même que, de l'avis de plusieurs, la campagne présidentielle commence aujourd'hui.