Le directeur général du fonds obligataire américain Pimco, Bill Gross, l'un des plus grands créanciers privés de l'État fédéral, a comparé mercredi la dette publique des États-Unis à une gigantesque fraude pyramidale.

Dans sa lettre mensuelle sur les perspectives d'investissement, M. Gross a comparé cette dette à l'escroquerie inventée par l'Italo-Américain Charles Ponzi, condamné en 1920 après avoir leurré des investisseurs avec des rendements qu'il payait grâce à l'arrivée d'autres investisseurs.

Le financier new-yorkais Bernard Madoff a été condamné en juin 2009 à 150 ans de prison pour avoir mené une escroquerie de ce type pendant plusieurs décennies.

«La dette publique, en réalité, a toujours eu des ressemblances avec une escroquerie à la Ponzi. A ceci près que les États-Unis ont, parfois, remboursé leur dette nationale, mais il y a toujours eu ce postulat que tant qu'on pouvait trouver des créanciers pour rembourser les emprunts anciens, et en acheter de nouveaux, le jeu pourrait continuer indéfiniment», a-t-il affirmé.

«Maintenant, toutefois, la croissance étant mise en doute, il semble que la Fed a poussé la logique de Charles Ponzi un peu plus loin», a-t-il poursuivi, en référence au nouveau programme d'achats de titres de dette publique que s'apprête à lancer la banque centrale américaine.

«La Fed, dans les faits, est en train de dire aux marchés de ne pas s'inquiéter de nos déficits budgétaires, et qu'elle sera l'acheteur de premier et peut-être de dernier ressort», a interprété M. Gross.

«Je vous le demande: y a-t-il jamais eu de chaîne de Ponzi plus éhontée? Non, jamais. Celle-là est tellement unique qu'elle exige un nom nouveau. Je l'appelle la chaîne de Sammy, en l'honneur de l'Oncle Sam et des hommes politiques (ainsi que des citoyens) qui nous ont conduit à ce moment critique de l'Histoire», a-t-il écrit.

M. Gross, un investisseur qui aurait beaucoup à perdre si le monde venait à douter de la capacité des États-Unis à rembourser leur dette, critique régulièrement la classe politique américaine, incapable selon lui de montrer du sérieux dans la réduction du déficit budgétaire.

De nombreuses voix se sont élevées aux États-Unis et ailleurs depuis plusieurs semaines pour tenter de dissuader la Fed d'injecter de nouvelles liquidités dans le système financier américain, de peur que cette création monétaire ne nuise à la stabilité de l'économie mondiale.

Les critiques envers la Fed d'une autre «voix respectée dans la communauté financière», selon la chaîne d'information financière CNBC, le président du fonds GMO Jeremy Grantham, attiraient également l'attention.

Dans une lettre trimestrielle aux investisseurs, il a comparé la politique monétaire des États-Unis à un film d'horreur «incroyablement terrifiant».

«Coller à une politique de taux bas, employer l'assouplissement quantitatif politique de création monétaire pour stimuler l'activité, doper délibérément les prix des actifs, ignorer les conséquences de l'éclatement des bulles spéculatives, et montrer un refus total d'apprendre de ses erreurs, a fait de la politique de la Fed une contribution largement négative à la fabrication d'une économie saine, stable, avec un emploi solide», a-t-il avancé.

Dans une note illustrée d'une fausse affiche de film d'horreur intitulé «Le Retour de la Fed Vivante» en allusion au célèbre «Retour des morts-vivants», M. Grantham a rappelé qu'il critiquait la Fed depuis 15 ans, plaidant pour que sa mission se concentre uniquement sur la stabilité des prix et du système financier, en délaissant la lutte contre le chômage.