Conrad Black a remporté sa bataille dans sa quête pour une libération conditionnelle lundi après qu'un arrêt de la Cour suprême des États-Unis, rendu le mois dernier, eut affaibli la loi qui avait mené à son arrestation et à son emprisonnement.

L'avocat de Black, Me Miguel Estrada, a cependant précisé que son client demeurait derrière les barreaux, du moins pour l'instant.

«Il n'a pas encore recouvré sa liberté, a-t-il annoncé dans un courriel. Les conditions seront fixées par la juge (Amy) St. Eve, dès que nous aurons l'occasion de la rencontrer.»

La juge St. Eve avait présidé le procès de Black en cour criminelle en 2007, à Chicago.

Jacob Frenkel, un ancien procureur fédéral et un expert en matière de «criminels à col blanc», croit que Black, maintenant âgé de 65 ans, pourrait être libre dès mardi, et possiblement la semaine prochaine après que la Cour d'appel des États-Unis du 7e circuit lui eut consenti l'ordonnance de remise en liberté.

Et l'ancien magnat de la presse a toutes les raisons au monde de croire qu'il n'aura pas à rester derrière les barreaux, a ajouté M. Frenkel.

Le fait que Black ait obtenu une libération sous caution laisse croire que le tribunal d'appel laissera vraisemblablement tomber la condamnation de fraude postale, a-t-il aussi noté.

«À bien des égards, une libération conditionnelle est rattachée à la probabilité de réussite, et je pense que la cour partage la vision selon laquelle Conrad Black pourrait être remis en liberté si seule la condamnation d'entrave à la justice était maintenue», a expliqué M. Frenkel.

En plus de fraude postale, Black a été reconnu coupable d'entrave à la justice, un crime plus sérieux et pour lequel l'ancien homme d'affaires canadien a été condamné à six ans et demi de prison. Jusqu'à maintenant, il a passé plus de deux ans derrière les verrous.

L'accusation d'entrave à la justice n'est pas incluse dans la récente décision de la Cour suprême des États-Unis, mais les avocats de Black pensent que cette condamnation doit également être annulée.

Dans leur requête en vue d'obtenir une libération conditionnelle, les avocats de Black ont argué que «le rejet (par la Cour suprême) de la théorie de fraude allait au coeur des points de controverse les plus importants du procès de M. Black - à savoir s'il y a eu stratagème en vue d'escroquer et si M. Black a tenté, de façon malhonnête, de faire obstruction à l'enquête sur cet acte non-criminel».

Les procureurs ripostent que Black devraient demeurer à la prison à sécurité minimale de Coleman, en Floride, parce que le jugement de la Cour suprême n'a pas rapport à l'accusation d'entrave à la justice.

Selon M. Frenkel, Black ne sera probablement pas délivré de l'accusation d'entrave à la justice.

«Néanmoins, il pourrait bien obtenir sa remise en liberté», a déclaré M. Frenkel. «Il est... plausible de penser que la juge St. Eve lui créditera les années passées en prison et mettra fin à son incarcération.»

M. Frenkel croit que le fait que Black se soit livré aux autorités judiciaires jouera en sa faveur.

Par ailleurs, M. Frenkel reconnaît que Black, en plus de compter sur des avocats combatifs, a bénéficié d'un coup de chance et qu'il devrait remercier la Cour suprême des États-Unis pour la décision rendue il y a quelques semaines en faveur de Jeffrey Skilling, un ancien dirigeant d'Enron.

Black et trois anciens dirigeants de l'empire médiatique Hollinger International ont été reconnus coupables d'avoir floué les actionnaires de la société d'une somme de 6,1 millions $ US. Black est le seul toujours incarcéré.

Mais le mois dernier, le plus haut tribunal américain a affaibli la loi des «services honnêtes», au coeur même de la condamnation de Black pour trois chefs d'accusation de fraude postale, et statué qu'elle devait être appliquée de façon plus rigoureuse.

Sans le disculper, cette décision accordait à Black une deuxième chance de contester sa condamnation.

«Il n'y a pas le moindre doute possible : Jeffrey Skilling devrait être le premier nom au haut de liste des souhaits de Noël de Conrad Black», a imagé M. Frenkel.