Les pouvoirs publics ont séparé jeudi le bon grain de l'ivraie dans le système bancaire américain, en rendant compte des «tests de résistance» effectués sur les principales banques du pays.

Les résultats de ces audits d'un nouveau genre ont fait apparaître que dix des plus grandes banques du pays avaient besoin de lever collectivement 74,6 milliards de dollars pour renforcer leurs fonds propres.

Le Trésor américain et la Réserve fédérale ont d'ores et déjà donné six mois aux plus faibles pour remettre leurs finances en ordre. Ceux qui échoueront devront accepter de voir l'Etat monter à leur capital.

Pendant 45 jours, plus de 150 experts issus des principales agences de régulation américaines, ont épluché les comptes des banques pour estimer l'ampleur de leurs pertes en cas de dégradation de la conjoncture.

L'exercice, mené auprès des 19 principaux établissements financiers du pays, était destiné à rassurer sur la santé du système financier américain. Il a en grande partie raté son objectif, en instituant de fait un classement officiel entre les «bonnes banques» et les «mauvaises banques» du pays.

American Express, Bank of New York Mellon, Capital One Financial, Goldman Sachs, JPMorgan Chase et MetLife ont ainsi accédé au tableau d'honneur.

En revanche, Bank of America, Wells Fargo, GMAC, Citigroup, Morgan Stanley et Regions Financial vont devoir remettre leurs fonds propres à niveau d'ici au 9 novembre, selon le résultat de ces tests.

Bank of America, la plus grosse banque du pays, est la grande victime de cet exercice: elle va devoir trouver 33,9 milliards de dollars, soit près de la moitié à elle seule du besoin de financement total identifié par l'Etat. Wells Fargo, une banque au bilan traditionnellement solide mais affaibli par le rachat de son gros concurrent Wachovia, a besoin elle de 13,7 milliards.

Le président de la Réserve fédérale américaine, Ben Bernanke, a estimé que la publication du résultat de ces tests allait rassurer investisseurs et particuliers en dissipant les incertitudes qui entouraient le système financier du pays depuis sa quasi-implosion de l'automne.

Les banques insuffisamment capitalisées vont pouvoir se procurer de nouvelles ressources par émission d'actions nouvelles, par restructuration de leur dette existante, par cession d'actifs ou réduction des dividendes aux actionnaires. Et si cela ne suffisait pas, l'Etat est prêt à leur fournir des fonds supplémentaires, en échange de l'octroi de titres convertibles.

Avant même que ces résultats ne soient connus, Wells Fargo a annoncé qu'elle allait procéder à une augmentation de capital de 6 milliards de dollars et Morgan Stanley a annoncé qu'elle allait lever 5 milliards de dollars, soit nettement plus que ce qui lui était réclamé.

Citigroup a de son côté annoncé qu'elle allait convertir en actions ordinaires 33 milliards de dollars de titres hybrides détenus par les investisseurs privés et l'Etat, soit 5,5 milliards de plus que le montant annoncé en février. Ces 5,5 milliards supplémentaires permettent de combler exactement le besoin de financement identifié par les pouvoirs publics.

Si l'offre d'échange était souscrite au maximum, l'Etat fédéral se retrouverait avec 34% du capital de la banque, alors que les actionnaires actuels se retrouveraient dilués, avec 24%, a-t-elle précisé.

Pour Peter Morici, professeur d'économie à l'Université du Maryland, les investisseurs «seraient bien sots» d'investir dans une banque menacée d'une telle nationalisation partielle. Il suffit de voir le «traitement arbitraire» réservé aux créanciers de General Motors et de Chrysler, qui sont menacés de perdre la quasi-totalité de leur mise, a fait valoir l'universitaire.