Dans les semaines et les mois à venir, des centaines de milliers d'Américains sans emploi auront épuisé leur droit aux allocations chômage alors qu'il n'a jamais été aussi difficile de trouver un travail aux États-Unis.

Ces allocations sont généralement versées pendant 26 semaines, à raison de 350 $ US en moyenne par semaine. L'an dernier, le Congrès a étendu à deux reprises la période de paiement des allocations, prolongeant leur versement jusqu'à 59 semaines dans les États les plus touchés par le chômage.Mais à l'heure où la récession traîne en longueur, une vague de salariés licenciés au début de l'an passé ne va plus en bénéficier.

D'après Wayne Vroman, économiste à l'Urban Institute, quelque 700 000 personnes dont les allocations été prolongées pourraient arriver en fin de droits d'ici le second semestre 2009.

Certains vont trouver un nouveau travail mais les perspectives sont sombres: les licenciements devraient se poursuivre et nombre d'économistes s'attendent à ce que le taux de chômage, qui s'élève déjà à 8,5% - son plus haut niveau depuis un quart de siècle -, n'atteigne la barre des 10% avant la fin de l'année. «Cela va être un problème énorme», prévient Wayne Vroman.

En mars, 663 000 postes ont été supprimés dans le pays et, depuis l'entrée des États-Unis en récession au mois de décembre 2007, un total de 5,1 millions d'emplois ont été perdus.

Si la crise se prolonge en mai, il s'agira de la plus longue récession depuis la Grande Dépression des années 1930.

Les Américains dont les allocations chômage arrivent à leur terme comptent les jours, prennent des petits boulots et s'inquiètent de l'avenir. «Ma plus grande peur est que nous perdions la maison», explique Hernan Alvarez, 54 ans, un ouvrier du bâtiment d'Orlando, en Floride, qui a perdu son emploi en juillet et dont les allocations doivent prendre fin dans quatre semaines. «La seule chose que je peux faire, c'est continuer à chercher du travail et espérer que demain sera mieux qu'aujourd'hui.»

Près d'un quart des chômeurs étaient sans emploi depuis six mois ou plus en mars, soit la proportion la plus élevée depuis la récession de 1981-82. Et la situation devrait empirer: les employeurs demeurent réticents à embaucher plusieurs mois après la fin officielle d'une récession. Lors des récessions de 1990-91 et de 2001, le taux de chômage culminait plus d'un an après le début de la reprise.

Marié et père de quatre enfants, Sterling Long est pourtant prêt à saisir tout emploi proposé pour subvenir aux besoins de sa famille. Cet habitant de Pittsburgh, âgé de 40 ans, a enchaîné les petits boulots depuis son licenciement d'une entreprise de plomberie en mars 2008. Il appréhende l'expiration de ses allocations chômage en avril.

«Je travaillerai chez McDonald's», dit-il. «Je n'ai aucune fierté tant que les personnes dans cette maison mangent et ont de l'eau chaude...»

À l'image de nombreux chômeurs de longue durée, Sterling Long a cherché à élargir son champ de compétence. Trois mois durant, il a consacré ses week-ends à travailler pour décrocher un permis de chauffeur. Cela l'a amené à charger des marchandises pendant deux mois dans l'entrepôt d'un supermarché. Depuis, plus rien.

D'après des experts, des coupons d'alimentation et d'autres programmes sociaux permettent partiellement d'aider les allocataires en fin de droits. Certains acceptent aussi des petits boulots s'ils en trouvent, observe Rebecca Blank, économiste à la Brookings Institution.

Ainsi, Rainie Uselton, 39 ans, licenciée l'an dernier d'un restaurant, qui s'occupe aujourd'hui d'une amie de sa mère à temps partiel en échange d'un repas, d'un abonnement pour les transports et de 50 $ US par semaine. Grâce à cette somme, elle espère payer les réparations de sa voiture avant la fin de ses allocations chômage dans quatre semaines. «S'endormir prend un peu plus de temps à cause de tous les scénarios» qui tournent «dans votre tête», confie cette habitante de Pittsburgh.

Le chômage est si élevé dans certains États que des allocations supplémentaires sont versées, permettant à des personnes qui n'en auraient plus eu droit de pouvoir respirer un peu. En vertu d'une législation fédérale, les États où le chômage est jugé particulièrement aigu doivent verser des allocations pendant 13 à 20 semaines supplémentaires. Une mesure déjà entrée en vigueur dans 18 États, soit deux fois plus qu'au cours des deux dernières récessions.