Comme il s'y était engagé, le syndicat des Métallos a déposé jeudi sa contre-proposition à la direction d'ABI dans l'espoir de mettre fin au lockout qui y sévit depuis plus de 14 mois.

Le 11 mars dernier, les employés mis en lockout de l'Aluminerie de Bécancour ont rejeté à 82 % l'offre patronale qui incluait un protocole de retour au travail. Le syndicat des Métallos, qui est affilié à la FTQ, s'était ensuite engagé à formuler une contre-proposition exhaustive dans les jours suivants.

Le syndicat y fait effectivement d'importantes concessions. Il accepte notamment de renoncer au régime de retraite à prestations déterminées - où le risque financier est assumé par l'employeur - pour un régime de retraite à financement salarial - où le risque est assumé par les travailleurs.

Le président de la section locale 9700 du syndicat des Métallos, Clément Masse, qualifie ce geste de « concession immense ».

Il importe de souligner qu'au départ du conflit de travail, le régime de retraite et le respect du critère de l'ancienneté dans les mouvements de main-d'oeuvre étaient les deux principaux points en litige.

103 postes en moins

De plus, le syndicat accepte la réduction de 103 postes par attrition, soit l'équivalent de 10 % des effectifs de 1030 travailleurs au début du conflit. Il peut s'agir de postes vacants qui ne seraient finalement pas pourvus ou de départs à la retraite, par exemple. Il n'y aurait donc pas de mises à pied.

L'employeur insistait effectivement pour accroître la productivité dans l'usine et la compétitivité. La diminution des effectifs lui permettrait donc de réduire ses coûts.

Quant au syndicat, il fait valoir que « les nouveaux schémas d'organisation du travail permettront le respect de l'ancienneté dans les mouvements de main-d'oeuvre » - l'autre point en litige au départ.

Pour M. Masse, le tout « est une proposition responsable qui accorde de la flexibilité à l'employeur, tout en veillant au respect de l'ancienneté et des conditions de travail ».

La contre-proposition syndicale n'inclut pas de protocole de retour au travail. Le syndicat estime qu'un tel protocole doit être négocié entre les parties. La dernière proposition patronale qui avait été rejetée prévoyait un retour au travail qui s'échelonnerait sur 10 mois et à compter du 8 avril.

« Pas à genoux »

La question des salaires ne posait pas vraiment problème. Dans sa dernière offre, l'employeur proposait des augmentations de 2,55 % par année en moyenne. Le syndicat dit s'en inspirer dans sa contre-proposition.

La direction d'ABI proposait un contrat de travail d'une durée de six ans. Le syndicat offre même un contrat d'une durée de huit ans, qui commencerait à la fin de la convention collective, en novembre 2017.

L'adjoint au directeur québécois des Métallos, Dominic Lemieux, qualifie la contre-proposition du syndicat de « très lucide ». Il lance un appel non seulement à la direction d'ABI, mais aussi aux actionnaires d'Alcoa, propriétaire à 75 % d'ABI.

En rejetant l'offre patronale, le 11 mars, « nos membres ont envoyé un signal clair : ils ne rentreront pas à genoux », a prévenu M. Lemieux.

Le lockout à l'Aluminerie de Bécancour a entraîné un manque à gagner de 165 millions pour Hydro-Québec en 2018, parce que l'usine n'a pas acheté la totalité de l'électricité qu'elle s'était engagée par contrat à acheter de la société d'État. Une clause du contrat lui permet d'échapper à son obligation en cas de force majeure - « Act of God ». Un lockout est considéré comme tel dans le contrat.