Pour tenter de dénouer l'impasse dans laquelle se trouvent les syndiqués d'ABI, après plus de 13 mois de lockout, le syndicat des Métallos veut une procédure d'arbitrage accélérée. Mais la direction de l'aluminerie n'en veut pas.

Et le ministre du Travail, Jean Boulet, affirme qu'il ne peut pas imposer l'arbitrage à un employeur qui n'en veut pas. Mais il persiste dans sa volonté de dénouer ce long conflit de travail : il va proposer une hypothèse de règlement aux deux parties d'ici 10 jours.

Les 1030 travailleurs de l'Aluminerie de Bécancour ont été mis en lockout par la direction le 11 janvier 2018 à 3 h du matin, après leur rejet des offres patronales. Depuis, de nombreuses tentatives pour rapprocher les parties ont été vaines - médiateur, médiateur spécial, conseil de médiation, intervention du président de la FTQ, Daniel Boyer, et quelques rencontres avec les ministres du Travail libéral et caquiste.

Vendredi matin, Clément Masse, président de la section locale 9700 du syndicat des Métallos, affilié à la FTQ, a annoncé que lors de l'assemblée générale des membres, déjà prévue samedi, il allait proposer à ceux-ci de soumettre le différend avec ABI à l'arbitrage.

Un tel arbitrage est exécutoire et les deux parties doivent y consentir au départ.

« Nous, on parle d'un arbitrage accéléré, où les parties auraient l'occasion de se faire entendre devant un tiers arbitre, un arbitre qui serait neutre, qui écouterait les parties et qui trancherait en fonction de la position des parties et qui mettrait fin au conflit », a expliqué M. Masse en entrevue.

Mais la direction a rapidement refermé la porte entrouverte par le syndicat. « L'arbitrage ne sécurisera pas l'avenir d'ABI. Les processus alternatifs ne sont pas les solutions appropriées pour résoudre le conflit », a répondu la direction par courriel.

Ministre déterminé

Informé de la demande d'arbitrage du syndicat et du rejet de l'idée par l'entreprise, le ministre Boulet est revenu à la charge avec son idée de soumettre aux deux parties une hypothèse de règlement.

« Je ne peux pas forcer un arbitrage de différend » si la direction n'en veut pas, a-t-il insisté.

Néanmoins, il refuse de rester les bras croisés et va soumettre une hypothèse de règlement aux deux parties d'ici 10 jours. Il reviendra à la maison-mère Alcoa à Pittsburgh et à l'assemblée générale des syndiqués de se prononcer sur cette hypothèse, affirme-t-il.

« Minimalement, cette hypothèse-là contribuera à les rapprocher ou à provoquer une reprise des discussions », avance le ministre du Travail, de l'Emploi et de la Solidarité sociale.

« L'hypothèse de règlement, je vais la faire en tenant compte des critères applicables, ce qui se fait dans les entreprises semblables ou des entreprises qui évoluent dans des circonstances semblables. On tiendrait compte du marché, de l'état de la jurisprudence », a expliqué le ministre Boulet.

Il ne part pas à zéro. « Les objectifs ont été clairement identifiés par le conseil de médiation présidé par M. Bouchard (Lucien, l'ancien premier ministre) : la flexibilité opérationnelle, la productivité, la stabilité des emplois, la pérennité de l'usine et le climat de relations de travail », a précisé le ministre Boulet.

Mais Clément Masse, du syndicat des Métallos, ne semblait pas croire à la réussite d'une telle voie. « Une hypothèse de règlement ne règle pas le dossier. On ne sait pas qui va la rédiger. On ne peut pas aller donner notre point de vue ou faire nos revendications devant la personne qui va rédiger ce document-là. Ça ne réglera pas le conflit, ça c'est sûr et certain. Ça peut juste créer de l'espoir, mettre une position qui ne fera probablement pas l'affaire des parties et qui va nous remettre dans la même position dans laquelle on est aujourd'hui. »

Le ministre a rappelé que la direction d'ABI pourrait également déposer une offre globale et finale au syndicat et lui demander d'ordonner au syndicat de la soumettre au vote des membres par scrutin secret.