Le Québec consomme actuellement du gaz naturel qui vient de l'ouest du Canada et des États-Unis. Les deux tiers de ce gaz naturel pourraient être remplacés par du gaz naturel renouvelable produit localement par la valorisation des déchets organiques et injecté dans le réseau d'Énergir.

« Ce sera un axe de développement très important pour nous », a annoncé hier à La Presse la présidente et chef de la direction d'Énergir, Sophie Brochu.

L'entreprise a fait évaluer par les firmes Deloitte et WSP le potentiel énergétique des déchets organiques qui peuvent être valorisés au Québec avec les technologies existantes. Il équivaut actuellement à 12 % du gaz naturel consommé au Québec. Dans 12 ans, avec les technologies en développement, ce potentiel atteindra les deux tiers de la consommation totale actuelle, estime l'étude, dont les résultats sont dévoilés aujourd'hui au congrès Québec Mines + Énergie, à Québec.

Énergir injecte actuellement dans son réseau 1 % de gaz renouvelable, qu'elle achète principalement à l'usine de biométhanisation de Saint-Hyacinthe. L'intention de l'entreprise est d'acheter de plus en plus de cette énergie renouvelable, selon un plan de match et un échéancier qui restent à préciser.

« On y réfléchit depuis 10 ans, explique Sophie Brochu. C'est très enthousiasmant, mais on a voulu une étude indépendante pour ne pas se fier à notre seule ambition. »

TOUTES LES RÉGIONS

Actuellement, le gaz naturel renouvelable produit au Québec vient essentiellement de la captation des gaz provenant des sites d'enfouissement et de la biométhanisation des déchets organiques, comme à Saint-Hyacinthe.

La valorisation des résidus forestiers et agricoles, qui en est encore à ses balbutiements, augmentera considérablement le potentiel de production de gaz naturel renouvelable. L'étude indique que la moitié de ce potentiel, estimé à 144,3 millions de gigajoules (66 % de la consommation actuelle du Québec), peut être exploité à un prix inférieur à 15 $ par gigajoule, « soit une valeur concurrentielle avec l'électricité au Québec ».

Le prix payé par Énergir pour acheter du gaz naturel renouvelable et l'injecter dans son réseau est deux fois plus élevé que pour le gaz naturel traditionnel. Il s'agit toutefois d'une option gagnante pour l'environnement, qui crée des emplois dans les régions et qui génère des revenus pour les secteurs municipal, agricole et forestier.

Et la demande est là, souligne la présidente d'Énergir, qui donne l'exemple de l'Université Laval et d'autres de ses clients comme L'Oréal Québec, qui acceptent de payer plus cher pour du gaz naturel renouvelable.

BON POUR TOUTES LES RÉGIONS DU QUÉBEC

La nouvelle industrie, qui naîtra de la valorisation des déchets organiques, profitera à toutes les régions du Québec, constate l'étude de Deloitte et de WSP. Les régions ressources pourront exploiter la biomasse forestière, les villes, leurs déchets organiques et la biomasse agricole pourra être valorisée dans les régions du Québec où l'agriculture domine.

L'étude ne tient pas compte des subventions actuelles ou futures qui favoriseront l'accroissement de la production de gaz naturel renouvelable. L'aide existe déjà pour les municipalités qui doivent investir dans la biométhanisation de leurs déchets organiques, et d'autres mesures pourraient être mises en place pour accélérer la transition énergétique.

Énergir, qui sera l'acheteur de ce gaz naturel renouvelable, apportera sa contribution pour soutenir la filière. « À court terme, il s'agit de fédérer ce qui existe, précise Sophie Brochu. Le potentiel est là, c'est une question d'organisation. »

POTENTIEL DE PRODUCTION DE GAZ NATUREL

2018 : 25,8 millions de gigajoules

2030 : 144,3 millions de gigajoules, soit 7,2 millions de tonnes de GES en moins

UN GIGAJOULE DE GAZ NATUREL ÉQUIVAUT À : 

26 litres d'essence

27 litres de mazout

277 kilowattheures d'électricité