La confiance du président du conseil d'Hydro-Québec envers le PDG Éric Martel a été « ébranlée », écrit Michael Penner dans une lettre transmise lundi au secrétaire général du gouvernement Legault, Yves Ouellet, une missive dans laquelle il annonce sa démission immédiate.

M. Penner démissionne de son poste de président du conseil, où il avait été nommé par Philippe Couillard. Ce départ était prévisible, puisque M. Penner était sur une liste d'administrateurs que le gouvernement caquiste avait dans le collimateur. Il était à couteaux tirés avec le PDG Éric Martel, surtout depuis que ce dernier avait décidé de bloquer le projet d'éoliennes d'Apuiat, près de Port-Cartier, un engagement auquel tenait le gouvernement libéral. Pierre Gabriel Côté, à Investissement Québec, est aussi dans la ligne de mire.

La vice-présidente du conseil d'Hydro, Michelle Cormier, présidente du comité de vérification, démissionne en même temps. « La confiance qui doit exister entre le président-directeur général d'Hydro-Québec, Éric Martel, et le conseil d'administration a été ébranlée », écrivent les deux démissionnaires dans leur lettre commune, obtenue par La Presse. Les démissions avaient fait l'objet d'une fuite avant même que la direction d'Hydro n'en soit informée, a-t-on appris.

UN POSTE HAUTEMENT STRAGÉTIQUE



À la dernière réunion du conseil, vendredi dernier, aucun indice de démission imminente n'avait pourtant été constaté, a confié un témoin. Mais samedi, à un événement de collecte de fonds du Musée des beaux-arts de Montréal, ceux qui connaissent Penner ont compris que quelque chose se tramait. Au lieu de circuler longuement parmi les tables pour saluer le gratin montréalais, selon son habitude, Penner était resté cloué à sa chaise.

Le poste de président du conseil d'Hydro est hautement stratégique, souvent plongé dans des luttes de pouvoir partisanes. Jacques Parizeau, premier ministre, s'était insurgé quand il avait appris que Jacques Ménard, manifestement fédéraliste, occupait cette fonction sous le gouvernement péquiste. Le banquier Ménard avait été éjecté au profit du regretté Yvon Martineau, un avocat qui était proche de Parizeau à l'époque. Lucien Bouchard avait mis Richard Drouin sur la touche pour amener André Caillé de Gaz Métro.

André Bourbeau, ex-ministre libéral aujourd'hui décédé, avait été éjecté quand le gouvernement Charest avait décidé d'y placer André Caillé - le PDG avait été délogé de son poste par Thierry Vandal, proche de la filière libérale. Plus récemment, Pauline Marois avait nommé Pierre Karl Péladeau à la présidence du conseil de la société d'État.

PROBLÈMES EN SUSPENS

Beaucoup de problèmes n'ont pas été réglés dans la haute direction de M. Martel. Un vice-président est actuellement suspendu pour des allégations de harcèlement psychologique. Un autre, toujours en poste, est visé par des allégations d'inconduite.

M. Penner, proche de Philippe Couillard, était dans la ligne de mire du gouvernement Legault. Il était connu qu'il avait, avant la campagne, démarché pour aider le Parti libéral du Québec à trouver des candidats de prestige. Les divergences de vues entre le gouvernement Couillard et Éric Martel quant au projet d'éoliennes Apuiat avaient creusé le fossé.

Le gouvernement Legault compte remplacer M. Penner rapidement. Une « courte liste » existe déjà, mais on est en train de voir quand les gens pressentis pourraient être disponibles. Québec souhaiterait une femme, ce qui serait une première pour le conseil d'Hydro-Québec, mais on prévient qu'elle n'aura pas de feuille de route partisane.