Les rues de Houston ne sont pas encore sèches que des voix s'élèvent déjà aux États-Unis pour régler le conflit du bois d'oeuvre afin de faciliter la reconstruction.

Le gouverneur du Maine, Paul LePage, proche de Donald Trump, a ouvert le bal en début de semaine à l'occasion du sommet annuel des États et des provinces de l'Est.

« Quand vous avez huit pieds d'eau au Texas, vous allez avoir besoin de beaucoup de bois dans les prochains mois pour reconstruire cet État, a-t-il déclaré. Et il va venir du Canada et des États-Unis. »

Puis, mercredi, Granger MacDonald, président de l'Association nationale des constructeurs d'habitations des États-Unis (NAHB), lui-même promoteur immobilier au Texas, a averti dans un communiqué que la demande de bois d'oeuvre allait « fortement augmenter » avec l'effort de reconstruction.

« Avec cette crise, il est plus important que jamais que les États-Unis parviennent rapidement à un accord durable au sujet des importations de bois d'oeuvre canadien », a-t-il déclaré.

Les droits compensateurs décrétés par le département américain du Commerce sont selon M. MacDonald une « taxe sur les consommateurs qui frappera plus durement les familles qui voudront reconstruire ». En plus, ajoute-t-il, les inondations au Texas et en Louisiane vont nuire à la récolte de bois.

Un nouvel élément favorise un règlement du conflit : le secrétaire au Commerce, Wilbur Ross, a annoncé lundi que l'enquête sur les droits compensateurs imposés sur le bois d'oeuvre canadien allait se prolonger jusqu'au 14 novembre. La décision était prévue pour le 6 septembre.

Dans l'intervalle, le droit compensateur pour subventionnement décrété le 28 avril dernier, au taux variant de 3 % à 24 %, n'est plus perçu, parce qu'il avait une durée de 120 jours, selon la loi américaine.

Seul subsiste le droit antidumping de 7 % décrété le 30 juin.

« Le signal que ça donne, c'est que M. Ross veut donner une chance à la négociation », affirme André Tremblay, président sortant du Conseil de l'industrie forestière du Québec (CIFQ).

L'interprétation est la même du côté américain : la NAHB a « applaudi » la décision de M. Ross. « La prolongation va donner le temps aux parties de chercher une solution négociée. »

Ces récents développements surviennent après que l'ambassadeur du Canada aux États-Unis, David MacNaughton, eut affirmé que le Canada s'apprêtait à poursuivre les États-Unis dans le dossier du bois d'oeuvre.

En conférence de presse, la semaine dernière, le diplomate avait aussi souligné que le Canada ne cherchait qu'à combler les besoins que les producteurs américains ne pouvaient satisfaire.

Au passage, il avait dénoncé le fait que les importations américaines de bois russe avaient fortement augmenté à la faveur du conflit canado-américain.

DEMANDE FORTE

Le contexte serait fort différent si la demande de bois d'oeuvre était encore à son creux de la crise immobilière post-2008.

Mais au contraire, avant même la catastrophe Harvey, la demande et les prix se maintenaient à un niveau élevé.

Et cela continue, malgré la suspension des droits compensateurs la semaine dernière, selon le courtier William Giguere, de Sherwood Lumber, au Massachusetts.

« Beaucoup de gens s'attendaient à ce que les prix baissent, mais ils oublient que la demande est forte », dit-il.

Cela a permis jusqu'ici aux producteurs canadiens d'absorber les droits compensateurs.

« Avec la force de l'économie américaine, il n'y a pas eu de mises à pied ou d'arrêts de production dans le bois de sciage au Québec », affirme André Tremblay.

Il prévoit lui aussi que la reconstruction post-Harvey ajoutera de la pression à la hausse.

Cette semaine, on estimait à au moins 40 000 le nombre de maisons détruites par les inondations et les vents au Texas, et à 100 000 le nombre de maisons endommagées. Sans parler des commerces.

À vue de nez, Harvey pourrait faire augmenter à lui seul de 4 ou 5 % la demande de bois dans les prochains mois : il y a environ 1,2 million de mises en chantier résidentielles aux États-Unis annuellement.

« On a vu l'ampleur de la catastrophe et on est tous un peu sidérés, dit M. Tremblay. On sait que l'argent ne manque pas au Texas et qu'il y aura de la reconstruction, mais l'impact se fera sentir dans un an ou deux. »

Selon William Giguere, les gens se préparent déjà pour la reconstruction. « Les gens font des plans et nous sommes toujours au coeur de la saison de la construction », dit-il. L'ouragan Harvey aura un impact, « soit immédiatement, dans le concret, ou psychologiquement », dit-il, précisant avoir vécu la même chose après le passage de Katrina, en 2004.

40 000

Cette semaine, on estimait à au moins 40 000 le nombre de maisons détruites par les inondations et les vents au Texas, et à 100 000 le nombre de maisons endommagées. Sans parler des commerces.