Même si Hydro-Québec a déjà rejeté l'idée, les tarifs d'électricité variables selon les heures de la journée devraient être une réalité au Québec l'hiver prochain.

Il s'agit de l'une des principales recommandations de la Régie de l'énergie, à qui le ministre des Ressources naturelles Pierre Arcand avait demandé de lui suggérer des moyens d'améliorer les pratiques tarifaires dans le domaine de l'électricité et du gaz naturel.

Après un an de travail, la Régie a produit un rapport de 120 pages qui contient 22 « pistes de solution », dont La Presse a pris connaissance.

Le ministre Pierre Arcand voit d'un oeil favorable l'introduction d'une tarification dynamique au Québec, sur une base volontaire, a-t-il fait savoir. « Nous entendons donner suite à l'avis de la Régie et veiller à la mise en place prochainement de certaines des pistes de solutions proposées, au bénéfice des consommateurs. »

La tarification dynamique permet aux consommateurs qui en ont la capacité de déplacer leur consommation d'électricité dans les périodes où les tarifs sont les plus bas et de réduire leur facture.

Selon la Régie, la variation des tarifs d'électricité selon les heures de la journée ne permettrait pas de diminuer beaucoup la demande de pointe en hiver, mais « toute réduction de la demande durant ces heures serait bénéfique », estime-t-elle.

En outre, il est temps d'exploiter les possibilités des nouveaux compteurs qui ont nécessité un investissement d'un milliard de dollars.

La tarification dynamique est aussi la solution proposée par la Régie pour la recharge des véhicules électriques, afin de réduire cet impact sur la demande d'électricité en périodes de grands froids.

La tarification variable aurait pour effet de stimuler l'innovation technologique et le développement de solutions de gestion de la consommation d'électricité. Hydro-Québec y gagnerait avec une réduction, même minime, de la demande à la pointe, et les consommateurs aussi, du moins ceux qui peuvent réduire leur consommation quand les prix sont les plus élevés.

UN TARIF L CONCURRENTIEL

La Régie estime que le tarif industriel d'Hydro-Québec (tarif L) est encore l'un des plus avantageux en Amérique du Nord et dans le monde, même si les grandes entreprises ont été nombreuses à s'en plaindre, en raison de la baisse des prix des autres formes d'énergie, dont le gaz naturel.

« L'avantage comparatif du tarif L s'est légèrement effrité au cours des 15 dernières années par rapport aux tarifs industriels offerts sur les marchés nord-américains et internationaux, reconnaît le rapport. Toutefois, il demeure toujours parmi les plus bas de la fourchette. »

La Régie souligne aussi que la disponibilité de l'électricité, la stabilité des prix et le faible taux d'émission de gaz à effet de serre « procurent un avantage additionnel » aux clients industriels du Québec.

En revanche, le rapport souligne que le Québec doit maintenir la possibilité de conclure des contrats spéciaux à tarifs plus bas dans certains cas et à condition que ce soit limité à des secteurs qui font face à des situations exceptionnelles.

PANNEAUX SOLAIRES ET STOCKAGE

Malgré la baisse du prix des panneaux solaires, l'autoproduction d'électricité est très peu répandue aux Québec. Selon Hydro-Québec, un peu plus d'une centaine de clients produisent une partie de leur électricité, surtout avec des panneaux solaires. Cette filière est appelée à se développer, estime la Régie de l'énergie, mais compte tenu des bas prix de l'électricité au Québec, « il n'y a pas lieu pour l'instant d'ajouter des efforts en ce sens », conclut-elle.

SERRES ET STATIONS DE SKI

La Régie est d'avis qu'il est préférable d'aider les entreprises par des mesures fiscales que par des rabais de tarifs d'électricité. Toutefois, dans le cas des serres et des stations de ski qui réclament depuis longtemps des tarifs d'électricité plus bas, le rapport suggère de leur offrir des options comme la tarification dynamique pour les aider à réduire leur facture.

Dans le cas des stations de ski, le remplacement des canons à neige existants par des équipements plus performants devrait être appuyé par Hydro-Québec et Transition énergique Québec, nouvel organisme dont la mission est d'investir dans l'efficacité énergétique.

SUBVENTIONNER L'EXTENSION DES GAZODUCS

La disponibilité du gaz naturel est limitée et l'extension des réseaux de distribution est difficile, compte tenu de l'étendue du territoire et du petit nombre de consommateurs potentiels. La Régie estime qu'il est important, surtout pour les entreprises, d'avoir accès à cette forme d'énergie à un prix compétitif. Il faut « envisager des aides publiques dans les cas où l'extension de réseau gazier est non rentable sur la base de tarifs raisonnables », suggère-t-elle au ministre.

L'INTERFINANCEMENT RESTERA

Au Québec, les consommateurs résidentiels paient leur électricité moins cher que ce qu'il en coûte pour la transporter et la distribuer chez eux. C'est une décision politique qui est très critiquée par les entreprises, qui paient plus cher et subventionnent en quelque sorte le secteur résidentiel à raison d'un milliard de dollars par année. Bien que la Régie estime que cet interfinancement entre les différentes catégories de consommateurs devrait disparaître un jour, elle est d'avis qu'il ne doit pas être éliminé. En tenant compte de « l'importance historique des tarifs de l'interfinancement dans le contexte énergétique québécois, la Régie ne considère pas que son abolition complète soit souhaitable ou envisageable dans un horizon prévisible ».