Malgré l'absence d'actualité déterminante concernant l'or noir jeudi, les cours pétroliers se sont effondrés au plus bas de l'année, sur la lancée d'un mouvement de défiance entamé deux semaines plus tôt face à une offre toujours élevée.

Le prix du baril de «light sweet crude» (WTI), référence américaine du brut, a cédé 2,30 dollars à 45,52 dollars à New York sur le contrat pour livraison en juin au New York Mercantile Exchange (Nymex), un niveau auquel il n'avait plus fini depuis novembre.

À Londres, le cours du baril de Brent de la mer du Nord a reculé de 2,41 dollars sur le contrat pour livraison en juillet à l'Intercontinental Exchange (ICE), là encore au plus bas de l'année.

«Le marché s'écroule vraiment», a commenté Gene McGillian, de Tradition Energy. «Tant que l'on n'aura pas l'annonce d'un accord sur des baisses de production, les investisseurs vont tirer les cours vers le bas.»

Les cours, sur une pente descendante depuis la fin avril, ont chuté encore plus brutalement, les investisseurs semblant attendre de plus en plus impatiemment l'annonce d'une prolongation des plafonds de production appliqués depuis janvier par de nombreux producteurs.

Ces quotas, que s'imposent depuis janvier les membres de l'Organisation des pays exportateurs de pétrole (OPEP) et des pays comme la Russie, ne sont actuellement censés courir que jusqu'à la mi-2017.

«Les cours sont vulnérables à une baisse à court terme puisque l'on n'a toujours pas confirmé la prolongation de ces baisses de production», a reconnu dans une note Tim Evans, de Citi.

«Mais on peut rester largement confiant quant au fait qu'un accord sera conclu à temps pour le sommet de l'OPEP du 25 mai», a-t-il nuancé, ne voyant dans la dépréciation des cours qu'une chute ponctuelle et une occasion de passer à l'achat à bon prix.

La demande inquiète aussi

Pour l'heure, néanmoins, l'affaissement du marché témoigne de la défiance généralisée des investisseurs à l'égard du manque d'effet concret de ces baisses de production.

«On en arrive à la conclusion qu'après quatre mois de mise en oeuvre de ses accords, on n'assiste à aucune amélioration conséquente au niveau des réserves mondiales», autrement dit les stocks ne se résorbent pas, a regretté M. McGillian.

Mais si les observateurs s'accordent à évoquer ce contexte de doutes, ils peinaient à expliquer ce qui avait accentué le mouvement de baisse jeudi.

«Je n'ai pas vu d'actualité marquante qui plombe en soit» le marché, a reconnu Mike Lynch, de SEER.

Comme la majorité des analystes, il mettait l'accent sur les chiffres hebdomadaires de la veille sur l'offre américaine, jugés médiocres, même si le marché avait alors résisté par une légère hausse.

Si les réserves de brut ont un peu baissé, «la production américaine continue d'augmenter sans cesse depuis trois mois», a mis en avant M. McGillian.

L'accélération continue de la production américaine inquiète les analystes qui attribuent cette reprise à la brèche ouverte par les plafonds de production de l'OPEP et ses partenaires.

À cela s'ajoute de plus en plus «une demande américaine qui semble en berne, comme en ont encore témoigné les chiffres d'hier, alors que les États-Unis restent le premier marché mondial pour le pétrole», a enchaîné M. Lynch.