Lentement mais sûrement, le secteur minier se réveille de la torpeur dans laquelle il était plongé depuis deux ans. Grâce à la remontée des prix des métaux entamée l'an dernier, les entreprises québécoises ressortent les projets mis sur les tablettes.

« Le contexte est plus encourageant qu'il y a un an », confirme Mathieu d'Anjou, économiste principal chez Desjardins, lors d'un entretien avec La Presse.

La vive remontée des prix des métaux de base enregistrée en 2016 s'est un peu calmée depuis le début de 2017, souligne-t-il. Ce rebond s'explique parce que les prix avaient trop baissé, selon lui. « Il y avait beaucoup de négativisme au sujet de l'économie mondiale. »

Depuis, des signes encourageants ont continué d'apparaître. Les intentions d'achat des entreprises manufacturières sont à la hausse autant aux États-Unis qu'en Europe et en Chine, explique Mathieu d'Anjou. Les gouvernements de plusieurs pays ont aussi des projets d'investissement importants dans les infrastructures, notamment le Canada et les États-Unis, ce qui est porteur pour le fer et l'acier.

Du côté de la demande, les perspectives sont donc favorables à une augmentation soutenue des prix. C'est du côté de l'offre qu'il y a plus d'incertitudes, estime l'économiste. 

Dans le fer et l'aluminium surtout, les producteurs peuvent facilement augmenter l'offre, ce qui aurait pour effet de contrarier la tendance à la hausse des prix.

Le fer et l'aluminium sont les deux principaux produits d'exportation du Québec, après les avions. Des projets d'investissement considérables pourraient redémarrer à la faveur de la hausse des prix.

Les perspectives sont mitigées pour le cuivre, le zinc et le nickel. Le prix du cuivre, par exemple, devrait augmenter en raison de la baisse de l'offre due à la grève à la mine Escondido, au Chili, la plus importante au monde.

Le cours de l'or devrait souffrir de l'augmentation des taux d'intérêt et de la hausse du dollar américain, selon les spécialistes.

Les gros canons et les petits

L'indice le plus convaincant de l'amélioration du climat minier est sans doute le retour des profits des géants du secteur.

BHP Billiton, la plus importante entreprise minière du monde, est passée d'une perte de 5,7 milliards US pour la deuxième moitié de 2015 à un profit de 3,2 milliards US pour la même période en 2016.

Rio Tinto affiche un profit de 4,6 milliards US pour 2016, après une perte de 866 millions US l'année précédente.

Le scénario est le même pour Glencore, qui exploite la mine Raglan (cuivre et nickel) dans le nord du Québec. Les pertes de 2015 se sont changées en un profit de 1,4 milliard US en 2016.

Au Québec, les dépenses d'exploration et de mises en valeur des entreprises du secteur minier ont commencé à se redresser, selon l'Institut de la statistique du Québec, même si on est encore très loin des sommets de 2011.

Du côté des petites entreprises, « le climat est beaucoup plus positif », selon Valérie Filion, directrice générale de l'Association de l'exploration minière du Québec, de retour du congrès de l'Association canadienne des prospecteurs et entrepreneurs du Canada, la grand-messe de l'industrie qui a lieu chaque année à Toronto.

Il y a une tendance à la hausse dans les intentions d'investissement des entreprises, quoiqu'elles se montrent plus prudentes que par les années passées, selon elle.

La remontée du prix du fer a redynamisé les projets sur la Côte-Nord, note Josée Méthot, présidente de l'Association minière du Québec (AMQ). « On sent un regain d'énergie », estime-t-elle.

La faiblesse du dollar contribue à cet optimisme, selon elle, puisque les entreprises ont des coûts de production en dollars canadiens et des revenus en dollars américains.

Le pire est-il derrière pour le secteur minier ? La présidente de l'AMQ n'ose pas trop s'avancer sur le terrain des prévisions. « On peut être optimiste tant que le prix du fer restera à ce niveau-là », estime-t-elle.

Des projets relancés

Le fer du lac BloomLe prix du fer a atteint 80 $US la tonne à la fin de 2016, et c'est le signal qu'attendait Champion Iron Mines pour relancer la mine du lac Bloom, fermée par son ancien propriétaire en décembre 2014. Les résultats d'une étude de faisabilité indiquent que la mine serait rentable avec un coût de production de 44,42 $US la tonne. L'entreprise est maintenant à la recherche de financement pour son projet évalué à 326 millions.

Le fer de ScheffervilleTata Steel s'apprête, de son côté, à commencer l'exploitation d'un gisement de fer à Schefferville, projet estimé à 1,5 milliard. IOC, filiale de Rio Tinto, vient d'annoncer un investissement de 79 millions qui permettra de prolonger la vie de sa mine de fer Wabush 3.

L'aluminium du SaguenayLe prix de l'aluminium est en hausse de 20 % depuis un an, et la division aluminium de Rio Tinto a contribué pour 947 millions US aux profits de 4,6 milliards de l'entreprise. Ces facteurs, conjugués à une augmentation de la demande, pourraient faire bouger les projets d'expansion qui sont dans les cartons depuis des années au Saguenay.

L'aluminium de Bécancour et de Sept-ÎlesLes surplus d'électricité et l'ouverture du gouvernement du Québec envers les investissements importants pourraient accélérer les augmentations de production déjà prévues par les alumineries ABI (Bécancour) et Alouette (Sept-Îles).

L'or de l'Abitibi et de la Baie-JamesEn Abitibi, la remontée des cours de l'or et la faiblesse du huard stimulent l'exploration depuis l'été dernier, souligne Josée Méthot, de l'AMQ. Akasaba, la nouvelle mine d'or appartenant à Agnico Eagle, pourrait obtenir le feu vert réglementaire cette année. La région de la Baie-James connaît aussi une mini-ruée vers l'or depuis que Goldcorp a commencé à exploiter la mine Eleonore en 2015. Plusieurs sociétés juniors d'exploration misent sur le territoire environnant.