Le géant canadien des hydrocarbures Enbridge  a annoncé mardi son intention d'acheter la firme américaine Spectra Energy par l'entremise d'une transaction amicale toute en actions évaluée à 37 milliards de dollars.

Le regroupement créerait la plus grande société d'infrastructures énergétiques en Amérique du Nord et une des plus grandes sociétés du secteur de l'énergie au monde, avec une valeur combinée d'environ 165 milliards.

L'entente augmenterait en outre l'exposition de la société de Calgary aux activités liées au gaz naturel, ainsi que sa portée à travers le continent, a estimé mardi le chef de la direction d'Enbridge, Al Monaco, lors d'une conférence téléphonique avec des analystes.

«Il s'agit d'une opération transformationnelle pour les deux sociétés qui permet d'atteindre une envergure, une diversité et une souplesse financière sans égales grâce à de nombreuses plateformes pour la croissance interne», a affirmé M. Monaco, qui sera le président et chef de la direction de la nouvelle entité.

L'entente apporte une diversité bien plus importante aux deux entreprises, a souligné l'analyste Dirk Lever, de la firme AltaCorp Capital.

«Enbridge était beaucoup plus une société liée au pétrole et Spectra, au gaz naturel. En les regroupant, elles sont équilibrées», a jugé M. Lever.

Si l'entente est conclue, comme prévu, au début de l'an prochain, Spectra ajoutera ses 140 800 kilomètres de gazoducs à ceux d'Enbridge, pour un total de 165 600 kilomètres.

Selon M. Lever, la résistance à laquelle les entreprises canadiennes et américaines se heurtent pour les nouveaux projets de pipelines a forcé les entreprises à se tourner vers les fusions et acquisitions pour croître.

«Il y a eu un énorme recul en raison des groupes qui se sont exprimés contre les pipelines», a-t-il noté, malgré l'importance de ces infrastructures.

Enbridge doit affronter depuis plusieurs années une féroce opposition à son projet Northern Gateway, évalué à 7,9 milliards. De grands groupes de manifestants tentent actuellement d'empêcher la construction du projet Dakota Access, aux États-Unis, dans lequel Enbridge est en train d'investir.

TransCanada - qui a dû composer avec une forte opposition à son projet de pipeline Keystone XL avant qu'il soit rejeté par le gouvernement américain et qui fait face à une opposition soutenue pour le projet Énergie Est - a choisi d'acquérir Columbia Pipeline Group pour 13 milliards US, plus tôt cette année, pour étendre son réseau.

Compte tenu du coût et des échéanciers de ces grands projets d'infrastructures, a expliqué M. Lever, les entreprises veulent augmenter leur envergure pour répartir le risque et augmenter les occasions stratégiques.

«Les entreprises découvrent qu'elles ont accès a un plus grand nombre de stratégies si elles se regroupent, et il y a davantage d'occasions stratégiques en faisant cela qu'en construisant de nouveaux pipelines qui peinent à aller de l'avant», a-t-il observé.

«Pour l'énergie, les infrastructures sont si importantes et la taille des problèmes qui doivent être réglés est si grande, qu'il est plus probable que nous observions davantage de fusions à l'avenir», a estimé M. Lever.

Selon M. Monaco, les entreprises devront voir quels désinvestissements pourraient être exigés des autorités réglementaires, mais il n'identifie pas beaucoup de recoupements entre les activités de Spectra Energy et celles d'Enbridge.

Enbridge prendrait en charge la dette d'environ 22 milliards de Spectra. Selon M. Monaco, la nouvelle entité pourrait vendre pour environ 2 milliards d'actifs jugés non essentiels au cours de la prochaine année.

En vertu de l'entente, les actionnaires de Spectra Energy recevraient 0,984 action de la nouvelle entreprise pour chacune des actions ordinaires qu'ils détiennent. En fonction du cours de clôture des actions d'Enbridge vendredi, cela équivaut à 40,33 $ par action de Spectra, ce qui représente une prime d'environ 11,5 pour cent par rapport au cours de clôture du titre de Spectra, vendredi.