Passer de la découverte à l'exploitation commerciale d'un gisement est un long parcours semé d'embûches que Stornoway est sur le point de compléter avec succès avec la mise en production de sa mine de diamant. Une grande première au Québec.

Comparée aux autres mines de diamant canadiennes, situées plus au nord, la mine Renard de Stornoway jouit d'un atout majeur. C'est la seule mine de diamant au Canada qui est accessible par la route sept jours sur sept.

Patrick Godin, directeur et chef de l'exploitation de Stornoway, le reconnaît, c'est ce qui a contribué à faire de la construction de la mine un succès. Les budgets et l'échéancier ont été respectés, et Stornoway réussira même une grande première, soit l'alimentation de sa mine par du gaz naturel livré trois fois par jour à partir de Montréal.

L'appui de deux partenaires importants, la Caisse de dépôt et Investissement Québec, a aussi fait une différence, dit Patrick Godin.

Arrivé presque au bout du chemin, alors que la mine a commencé à extraire ses premiers diamants, l'ingénieur minier souligne que la chance n'a pas eu de rôle à jouer dans ce parcours. « On a travaillé tellement fort », dit-il.

La productivité de tout le monde qui a travaillé au chantier a été au-delà des espérances, selon lui. « Il y a eu 3,5 millions d'heures travaillées et aucun grief. J'en suis fier parce qu'au Québec, on parle trop souvent de projets qui tournent mal. »

Le projet Renard n'est pas encore terminé que le nom de Stornoway circule déjà comme acheteur potentiel pour la mine de Snap Lake, dans les Territoires du Nord-Ouest, que le géant De Beers veut vendre.

« On va commencer par finir ce projet-là », rétorque Patrick Godin quand on l'interroge sur la suite des choses.

Acheter ou être achetées, c'est souvent le chemin tracé d'avance pour toutes les sociétés minières. Le patron de Stornoway n'écarte rien. « J'espère que non [que Stornoway ne sera pas achetée], mais ce sont les actionnaires qui décident », dit-il.

Stornoway a bien l'intention de regarder toutes les occasions qui s'offriront, avance diplomatiquement Patrick Godin, que ce soit une mine existante ou un projet en cours.

L'entreprise poursuit des activités d'exploration dans trois projets diamantifères : Adamatin, à 100 km de sa mine Renard, Pikoo, en Saskatchewan, et Qilalugaq, au Nunavut.

« On veut continuer. »

Photo Hugo-Sébastien Aubert, La Presse

Stornoway prévoit un volume de 1,7 million de carats par année pour la mine Renard.

Un marché très particulier

Dans un de ses livres, l'auteure Kim Thúy raconte comment elle a fui le Viêtnam avec au poignet un bracelet de plastique rempli de diamants, qui était toute la fortune de la famille.

Le diamant, surtout utilisé en joaillerie, peut aussi être une valeur refuge, comme l'or. Mais contrairement à l'or, il n'est négocié sur aucun marché, ce qui lui donne une place unique dans le monde minier.

Presque toute l'industrie de l'extraction du diamant est aux mains d'un très petit nombre de grosses entreprises, comme De Beers et Rio Tinto. Stornoway est un peu l'exception qui confirme la règle.

Sa mine Renard entre en exploitation sous de bons auspices, estime Éric Lemieux, qui suit le marché du diamant pour la firme PearTree. « Les plus grosses mines sont en fin de vie et comme l'offre n'est pas si importante, ça va soutenir les prix », avance-t-il.

Il peut s'écouler 20 ans entre la découverte d'un gisement et la mise en exploitation d'une mine de diamant. L'activité d'exploration est en baisse, notamment au Canada, où le ministère des Ressources naturelles a constaté une réduction de 50 % l'an dernier des dépenses d'exploration dans les Territoires du Nord-Ouest, capitale canadienne du diamant.

Une baisse de l'offre est donc prévisible vers 2020-2021 en raison de cette baisse des dépenses d'exploration.

Stornoway est une des rares nouvelles mines de diamant à commencer à produire. De Beers espère mettre en production sa mine de Gahcho Kué, dans les Territoires du Nord-Ouest, plus tard cette année.

Les diamants de joaillerie comme ceux que produira Stornoway sont un produit de luxe associé aux événements importants, au mariage, au glamour. Comme les autres produits de luxe, la demande varie avec les cycles économiques, mais elle se maintient.

« Avec l'enrichissement de la population en Chine et en Inde, le marché oriental va être important », croit l'analyste.

PHOTO FOURNIE PAR LES DIAMANTS STORNOWAY

« Il y a eu 3,5 millions d’heures travaillées et aucun grief. J’en suis fier parce qu’au Québec, on parle trop souvent de projets qui tournent mal », affirme Patrick Godin, directeur et chef de l’exploitation de Stornoway.